France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Pas de retraite ni de cession de ferme pour les agriculteurs

En prévoyant de reculer l’âge de départ de tous les travailleurs et notamment des paysans, le gouvernement a mis la MSA (Mutualité sociale agricole) dans l’embarras. Mettant parfois un coup d’arrêt aux départs en retraite d’exploitants agricoles sur le point de céder leur ferme à de jeunes repreneurs. Point besoin de grève ni de manifestation pour ce genre de blocage.

C’est notamment le cas de Vincent et Rémi (les prénoms ont été modifiés) qui veulent prendre leur place dans le Gaec (Groupement agricole d’exploitation en commun) familial où l’on élève des vaches limousines. Leur mère, âgée de 59 ans et leur père, qui a 6 ans de plus, ont entrepris de faire valoir leurs droits à la retraite et ainsi permettre la transmission de leur exploitation à leurs deux fils.

Un travail de longue haleine qui nécessite de l’anticipation. Les parents se rendent alors à leur caisse locale de la MSA pour instruire leur dossier et faire réaliser une simulation sur le montant de leur pension et la date de leur départ. Pour le papa, âgé de 65 ans, le dossier est vite bouclé et la date de départ rapidement connue. « Sa pension sera d’environ 1200 €, grâce notamment aux lois Chassaigne 1 et 2 », explique sa belle-fille. Mais pour la maman, c’est une autre affaire. Impossible d’estimer le montant et la date de sa nouvelle vie après le travail. « Le logiciel est bloqué durant 8 mois, le temps que la réforme des retraites aboutisse », lui rétorque-t-on.

Une situation ubuesque, selon le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef), qui laisse dans l’incertitude cédants et repreneurs. « Que peut faire le futur paysan en attendant que la ferme se libère ? », interroge Sophie Bezault, directrice du syndicat agricole. « Pointer au chômage ? Pas sûr qu’il puisse prétendre aux droits assedic. Travailler sur la ferme ? Avec les faibles trésoreries des exploitations, c’est rarement envisageable ».

Le cas n’est pas isolé. En Corrèze, Annick Champeaux et son mari cherchent eux aussi à céder leur ferme et à partir en retraite. « Mais comment trouver un repreneur lorsqu’on ne sait pas quand il pourra nous remplacer ? ». Usés par un travail qui les passionne pourtant toujours autant, ils avouent être stressés par cette incertitude administrative.

Contactée par l’Humanité, la MSA avoue avoir « mis à l’arrêt ses outils de simulation pour éviter que les personnes envisageant un départ en retraite dans l’année qui vient ne se déterminent en fonction de calculs qui seront caducs dès lors que la loi sera promulguée ». La situation est appelée à durer: la loi doit encore passer devant le Conseil constitutionnel, puis attendre les neuf mois de délais lié au déclenchement d’un Référendum d’initiative populaire (RIP) pour être promulguée.

Avec un quart des chefs d’exploitation qui ont plus de 60 ans, cette « pause administrative » n’a rien d’anecdotique. Lors d’une rencontre avec le Ministre de l’Agriculture le 20 février, puis avec Emmanuel Macron quatre jours plus tard, le Modef a évoqué cette situation qui vient renforcer la détermination du syndicat paysan à faire tomber la réforme gouvernementale.