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Pollution du plastique : cinq graphiques pour comprendre l’urgence d’agir

Non, ne le chantez plus à chaque évocation du sujet : le plastique, ce n’est pas fantastique. D’ailleurs, le groupe Elmer Food Beat avait revu son vieux titre, en 2019, pour le transformer en : « Le plastique, c’est dramatique. » La conclusion musicale est aussi, de façon bien moins légère, celle de l’Organisation des nations unies (Onu). En mars, les pays membres ont adopté le principe de préparer un accord international contraignant pour mettre fin à la pollution plastique, en particulier dans les océans, bientôt peuplés de davantage de déchets que de poissons. C’est dans cette optique que 200 pays se sont réunis, cette semaine en Uruguay, pour préparer le terrain de ce texte. Pourquoi maintenant ? Parce que les signaux d’urgence se multiplient.

Trois fois plus qu’aujourd’hui : c’est la croissance attendue de l’usage et la quantité de déchets liés au plastique, d’ici 2060, si rien ne change. L’estimation est signée de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), dans une étude publiée cette année. L’organisme s’est penché sur les tendances à venir d’usage et de pollution liés au plastique d’ici 2060, en prévision des discussions mondiales sur le sujet.

Graphique montrant la croissance inarrêtée de l'usage du plastique depuis 1950 et une croissance similaire du nombre de déchets de plastique

Cette hausse extrêmement rapide et récente suit la même logique que les émissions de carbone : le plastique classique est directement lié à l’usage du pétrole, dont il est issu. Sa production a donc grimpé en flèche depuis les années 1980. En 2019, 460 millions de tonnes de plastique ont été utilisées (et donc produites) dans le monde, contre 130 millions en 1990 et seulement 2 millions en 1950.

Notre dossier sur l’urgence à agir face à la pollution plastique

La production et l’usage de plastique ne seraient pas, en eux-mêmes, un problème aussi grave si la durée d’usage des produits de cette matière n’était pas si court. Comme le souligne l’OCDE, « le cycle de vie actuel est loin d’être circulaire » : un objet produit est très rarement réutilisé, la fabrication de matière plastique donne donc lieu à des déchets en quantité colossale. Leur volume a quasiment doublé entre 2000 et 2019, passant de 156 millions de tonnes de déchets plastiques à 353 millions de tonnes?. Outre la quantité, ces déchets proviennent pour près de deux tiers d’objets dont la durée de vie est inférieure à cinq ans : emballages (40 %), produits de consommation (12 %) et textiles (11 %).

Graphique montrant les secteurs qui utilisent le plus de plastique, à savoir les emballages, les produits de consommation et le transport

Une des raisons principales : il est très difficile de recycler cette matière pour plusieurs usages, à la différence du verre, par exemple. Même lorsque cela est possible, les réseaux et technologies n’existent pas toujours. Ainsi, en 2019, d’après les calculs de l’organisme, seulement 9 % des déchets plastique ont été recyclés. Cette part tient compte des pertes de matière qui se produisent au cours du processus.

Graphique montrant que seuls 9% des déchets sont actuellement recyclés, et qu'on attend que cette part atteigne 17% en 2060sans action supplémentaire

Pour le reste, près de la moitié de tous les rejets mondiaux terminent leur vie dans des décharges contrôlées. Près d’un cinquième est incinéré et à peu près autant de déchets font l’objet d’une mauvaise gestion : ils atterrissent dans des décharges sauvages, sont brûlés à ciel ouvert ou rejetés dans l’environnement. Le problème pourrait-il être réglé en augmentant le recyclage ? C’est un levier d’action important, mais malheureusement insuffisant. La quantité de plastique recyclé devrait doubler dans les prochaines années ; malgré cela, il ne représenterait que 12 % de l’utilisation totale de plastique en 2060.

Le problème est sérieux donc. Mais n’est-il pas celui d’autres pays lointains ? C’est la question qui peut intervenir lorsqu’on observe une carte de la répartition de la pollution de plastique dans les océans. L’Inde, la Chine, les Philippines, la Malaisie et, un peu plus près de nous, la Turquie font partie des pays associés aux plus gros rejets de plastiques dans les océans, d’après une étude publiée en 2021, à partir des rivières de ces pays.

Cartes montrant les exportations et importations de déchets plastiques par pays

Sauf que ces pays reçoivent aussi la gestion d’une partie de nos plastiques usés. Près de 7 déchets plastiques sur 10 proviennent de pays à haut revenu, parmi lesquels figure la France. Plusieurs textes internationaux encadrent en effet le commerce de déchets, dont le plastique. Le but ? Favoriser un recyclage de ces matières : puisque des pays d’Asie figurent parmi les plus gros producteurs de produits en plastique, nous leur exportons une partie de nos déchets pour qu’ils y soient recyclés et que les containers ne voyagent pas à vide au retour.

Problème : ces pays figurent aussi parmi ceux dans lesquels la mauvaise gestion des déchets pèse le plus. Des enquêtes ont ainsi révélé que des déchets y ont pu être exportés illégalement et, loin d’être pris en charge, ont été rejetés dans des décharges sauvages. Une situation accrue par la décision de la Chine de ne plus recevoir de déchets plastiques étrangers, en 2018. De quoi expliquer que l’océan Pacifique figure parmi les zones maritimes les plus polluées par les objets plastiques. Une meilleure gestion du circuit des déchets, à l’échelle régionale et mondiale, figure ainsi parmi les préconisations de l’OCDE.

Si l’on pense surtout aux sacs plastiques que l’on retrouve dans les estomacs d’oiseaux marins ou de tortues, un autre enjeu moins visible concerne la pollution liée au plastique : les microplastiques. Ces particules mesurant moins de 5 mm sont plus difficiles à surveiller et sont documentées depuis peu de temps, mais suscitent une inquiétude grandissante, notamment parce qu’elles entrent dans les organismes. « On assiste à une contamination globale de la chaîne alimentaire marine », expliquait en janvier la biologiste brestoise Ika Paul-Pont, en soulignant qu’« on mange, on inhale et on ingère du plastique au quotidien ».

Deux graphiques montrant la hausse de la surface de macroplastiques et microplastiques sur la surface des océans. Les microplastiques contrinueront d'augmenter en quantité quel que soit le scénario.

Si ces microplastiques ne représentent qu’une part des déchets plastiques recensés, ils sont aussi un problème à retardement : ces minuscules particules peuvent être générées par les morceaux de plastique qui se désagrègent dans la nature, mais aussi par le simple usage quotidien de produits intégrant du plastique : vêtements synthétiques, pneus, cosmétiques. « Les plastiques aujourd’hui accumulés dans les cours d’eau continueront de se déverser dans la mer pendant des décennies, même si nous parvenons à réduire sensiblement la mauvaise gestion des déchets plastiques », alerte le rapport de l’OCDE. L’enjeu ne concerne donc pas la seule gestion des déchets, mais bien de l’usage du plastique en général.

Pollution platique : il y a urgence !