France
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« Pour la France » : hommage à un frère militaire, tombé sans avoir combattu

Le second long-métrage de Rachid Hami est consacré à Jallal, mort en 2012 à 24 ans lors d’un rite d’intégration de l’école de Saint-Cyr Coëtquidan.

L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR

« Mort pour la France » adjoint-on généralement, à titre honorifique, au nom des militaires tués au combat. Mais qu’en est-il quand cette mort survient dans les rangs de l’armée, entre ses murs, révélant en son sein dysfonctionnements et dissensions ? C’est la question, parmi bien d’autres, que pose le second long-métrage de Rachid Hami, inspiré du cas réel de son frère Jallal Hami, décédé en 2012, auquel le film est dédié.

Le récit qu’il en tire s’ouvre dans l’enceinte de l’illustre école militaire de Saint-Cyr. Réveillées en pleine nuit, les nouvelles recrues sont soumises au rite d’intégration, dit pudiquement « bahutage », une parodie d’opération commando où on les pousse à traverser un étang. Aïssa (Shaïn Boumedine, découvert dans Mektoub, My Love. Canto uno en 2017), élève officier de 24 ans, congestionné par le froid, ne s’en relèvera pas. Sa famille, d’origine algérienne, qui attend des funérailles dignes de ce nom, se heurte à la fermeture de l’institution, qu’on n’appelle pas pour rien la « Grande Muette », peu prompte à reconnaître ses torts – trois militaires ont été condamnés pour homicide involontaire en 2020.

Une forme de raideur

Pour la France met en scène cette confrontation, sans pour autant virer à la charge, mais en décrivant un champ complexe de forces et de tensions, lié à l’histoire de l’immigration comme à la blessure des identités flottantes. Rachid Hami n’hésite pas à convoquer le passé par flash-back successifs, entre l’Algérie de la décennie noire et un Nouvel An passé à Taïwan en compagnie du grand frère, Ismaël (Karim Leklou). Ces décrochages temporels et géographiques donnent de la chair au récit, et consistent à conjurer la mort inaugurale en complétant a posteriori le portrait de famille. Pour la France ouvre ainsi la porte du romanesque à des personnages trop souvent réduits à un imaginaire social.

L’ensemble n’est pourtant pas sans faiblesses. Une limite se signale dans l’excessive retenue de la mise en scène qui, par souci de transparence, se refusant à céder à la colère comme au désarroi, s’astreint tout du long à une forme de raideur, et stagne dans le vague registre du « drame ».

Sans doute est-ce une façon, aussi, de ne pas se laisser écraser par un tel sujet – la mort d’un frère –, de garder la tête froide. C’est à ce prix que le film trouve une forme de mesure et de finesse. Laconique sur certains points, tout en déviations et retours sur lui-même, il sait aussi ne pas trop en dire, pour ne pas élucider complètement ce deuil impossible. Alors, le spectateur y trouve sa place, et peut ainsi le partager.

Film français de Rachid Hami. Avec Karim Leklou, Shaïn Boumedine, Lubna Azabal, Samir Guesmi, Laurent Lafitte (1 h 53).

Mathieu Macheret

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