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Pour les opposants à la suppression des vols intérieurs, Paris a bel et bien reculé

Après de longues négociations, un accord a été conclu entre la Commission européenne et le gouvernement français sur l'interdiction des vols intérieurs en cas d'alternative en train de moins de 2h30. Pour l'Union des aéroports français (UAF), la branche européenne du Conseil international des aéroports (ACI Europe) et le Syndicat des compagnies aériennes autonomes (Scara), c'est l'heure de compter les points. Les trois associations professionnelles, qui ont porté plainte auprès de Bruxelles contre la proposition française originelle, affirment avoir été entendues mais ne sont pas encore pleinement satisfaites.

Bien que la mesure ait bien été validée par Bruxelles, Jean-François Dominiak, président du Scara, est assurément le plus satisfait. Celui qui a quitté son poste de PDG d'ASL Airlines France il y a quelques jours n'hésite pas à affirmer que cette décision de la Commission européenne est une victoire. S'il regrette que les professionnels du transport aérien n'aient pas été consultés en amont de la rédaction de ce texte, il déclare ainsi « être heureux de la décision de l'Europe qui reconnaît à bon droit ce que nous contestions et qui ouvre une porte insoupçonnée. »

Son principal motif de satisfaction est la limitation de la durée de la mesure à trois ans, et cela pour une raison précise. En raison de la compensation à 100 % des émissions de CO2 imposée sur les vols intérieurs à partir de 2024, il estime que les vols domestiques ne pourront plus être considérés comme polluants lorsque cette mesure sera réévaluée dans 24 mois (condition posée par Bruxelles pour sa prorogation). Selon lui, les lignes pourront logiquement rouvrir. Il regrette seulement que la connectivité de l'aéroport d'Orly soit affectée pendant trois, notamment au détriment des passagers volant vers l'outre-mer.

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Paris a reculé

Thomas Juin, président de l'UAF, se satisfait tout autant de cette limitation temporelle, mais aussi de la nécessité pour l'Etat français de réévaluer la mesure chaque année. Ce qui répond aux principaux griefs exposés par les plaignants auprès de la Commission européenne. Il juge ainsi que Bruxelles a « amoindri la portée du texte de loi français », là où Olivier Jankovec, directeur général de l'ACI Europe, parle même d'un recadrage. Comme Jean-François Dominiak, le patron des aéroports français espère que les compensations à partir de 2024 de l'intégralité des émissions de CO2 sur les vols intérieurs français rendra caduque cette mesure d'interdiction. Néanmoins, il attend encore de voir quels seront les critères d'évaluation avant de se réjouir.

Thomas Juin glisse également que la décision européenne « s'est faite attendre », ce qui est symptomatique selon des « difficultés juridiques » engendrées par ce décret qui doit mettre en œuvre l'article 145 de la loi du 22 août 2021 dite « Climat et résilience », tout en étant conforme à l'article 20 du règlement européen CE n° 1008-2008 qui permet de limiter le trafic aérien « lorsqu'il existe des problèmes graves en matière d'environnement ». Or, selon Thomas Juin, cette disposition communautaire est destinée à prendre des mesures temporaires pour parer à une urgence et non à combattre sur le long terme contre le réchauffement climatique. Il estime ainsi que l'on a « tordu le droit » dans cette histoire.

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L'histoire n'est pas finie

Les trois représentants du secteur attendent désormais la publication du traité pour l'analyser en détail. Jean-François Dominiak vise la consultation publique à laquelle il entend participer. Thomas Juin et Olivier Jankovec devraient pour leur part continuer à agir de façon coordonnée sur le sujet, comme depuis le début du dossier avec une plainte commune notamment. « Nous allons le regarder, et nous nous réservons la possibilité de saisir le conseil d'Etat, voire le Tribunal de l'Union européenne. L'histoire n'est pas finie », prévient le président de l'UAF.

Il n'est de toute façon toujours pas convaincu que « ce type de mesurette change la donne sur les émissions de CO2 du transport aérien en France et en Europe », préférant renforcer les obligations sur l'utilisation des carburants d'aviation durables (SAF) ou encore les compensations. De son côté, le directeur général de l'ACI Europe émet d'ores et déjà des doutes sur l'efficacité et la proportionnalité de la mesure, au vu de son « impact très marginal sur la réduction des émissions de CO2 » face à « l'ampleur du problème du réchauffement climatique ».