France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Poutine souffle le chaud et le froid, agitant la menace nucléaire d’une main, jouant la diplomatie de l’autre

Lors de la conférence de presse du sommet de l’Union économique eurasienne à Bichkek, au Kirghizistan, Vladimir Poutine a envoyé des signaux contradictoires à l’Occident, évoquant tout à la fois un possible règlement diplomatique de la guerre en Ukraine et un changement de la doctrine nucléaire russe qui lui permettrait de frapper le premier, à titre préventif.

Le quotidien britannique The Guardian a choisi de voir le verre à moitié plein en titrant sur “la possibilité d’un accord pour mettre fin à la guerre en Ukraine” suggérée par le président russe. “Le processus de règlement dans son ensemble, oui, ce sera probablement difficile et cela prendra du temps. Mais d’une manière ou d’une autre, tous les participants à ce processus devront être d’accord avec les réalités qui se dessinent sur le terrain” a-t-il ainsi déclaré vendredi 9 décembre devant les journalistes.

Ces remarques, note le Guardian, sont faites “quelques jours seulement après que Poutine a semblé préparer les Russes à une guerre prolongée en Ukraine”, et affirmé que son opération militaire pourrait être un “processus à long terme”. Tout en niant le moindre problème dans sa planification : “tout est stable. Il n’y a pas de questions ou de problèmes là-bas.” Une contradiction flagrante avec la réalité du terrain, donc, mais qui interroge sur ses réels objectifs.

“Réfléchir” à des frappes nucléaires préventives

Plus inquiétant, lors de la même conférence de presse à Bichkek, Poutine a également suggéré que la Russie pourrait changer sa doctrine nucléaire, consistant à ne pas être la première à utiliser des armes nucléaires dans un conflit, quelques jours après avoir mis en garde contre la menace “croissante” d’une guerre nucléaire, rapporte la chaîne d’information CNN.

“Tout d’abord, les États-Unis ont développé le concept d’une frappe préventive. Deuxièmement, ils développent un système de frappe visant à désarmer l’ennemi”, a énuméré le président russe, faisant référence auConventional Prompt Global Strike”. Puis il a ajouté, avec son sourire matois, que Moscou devrait peut-être penser à adopter les “idées développées par les Américains pour assurer leur propre sécurité”.

Se faisant plus glaçant, il a ensuite précisé sa pensée : si un seul missile “pénétrait” sur le territoire russe “des centaines” d’ogives répondraient, a-t-il affirmé, cité par la chaîne d’information conservatrice Fox News. “Il ne restera plus rien de l’ennemi, car il est impossible d’intercepter une centaine de missiles.” Mais il s’est finalement voulu rassurant en insistant sur le fait qu’il ne faisait “qu’y réfléchir”. Une leçon de chaud et froid par le maître du Kremlin.

Échanges asymétriques

Toujours au Kirghizistan, Poutine a insisté sur le fait que la Russie “ne vendrait tout simplement pas” son pétrole aux pays qui imposent un plafond de prix à 60 dollars le baril, comme en ont décidé lundi dernier le G7, l’Union européenne et l’Australie, rappelle la chaîne qatarie Al-Jazeera. “Nous envisagerons une éventuelle réduction de la production si nécessaire”, a-t-il ajouté, qualifiant le plafonnement des prix de “décision stupide” qui est “nuisible aux marchés mondiaux de l’énergie”.

Enfin, Poutine s’est exprimé sur l’échange de prisonniers qui a eu lieu la veille – entre la star de basket américaine Brittney Griner et le marchand d’armes russe Viktor Bout –, se montrant satisfait de son marché et laissant entendre que d’autres échanges étaient “possibles”.

Outre le retour de Griner, l’administration Biden tente depuis des mois de négocier la libération de l’ancien Marine Paul Whelan, “arrêté en Russie en 2018 pour espionnage et purgeant une peine de 16 ans de prison”, rappelle le site d’information politique américain The Hill. Mais Washington n’a pas encore été en mesure de répondre aux exigences de Moscou sur ce dossier.

CNN explique que la Russie ne souhaiterait l’échanger que contre l’ancien colonel Vadim Krasikov, “un espion russe qui purge une peine d’emprisonnement à perpétuité pour meurtre en Allemagne”. Mais le gouvernement allemand n’étant pas disposé à le libérer, les négociations sont au point mort.

Le New York Times quant à lui fait un parallèle entre la libération de Brittney Griner et la guerre en Ukraine de façon générale. “Le président russe veut poursuivre sa guerre en Ukraine de la même manière qu’il a obtenu jeudi la libération d’un important marchand d’armes russe, en infligeant tant de souffrance aux gouvernements occidentaux qu’ils finissent par conclure un accord”, analyse le quotidien. Cet échange pourrait-il être le signe d’une faiblesse occidentale, voire le prélude à une détente par lassitude ? “Rien ne garantit que la stratégie fonctionnera. […] Joe Biden n’a montré aucune inclination à céder sur le soutien des États-Unis à l’Ukraine”, conclut le New York Times.