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Procès en appel des attentats de janvier 2015: «On a tous des frustrations»

Au début du procès, on avait eu un doute. Convoquée par la défense au procès en appel des attentats de janvier 2015, l’ancienne juge antiterroriste Nathalie Poux n’avait pas répondu à sa citation à comparaître. Puis le président de la cour Jean-Christophe Hullin lui avait écrit un mail de relance auquel elle avait répondu. Elle serait là.

Chacun s’en doutait, la séance des questions de la défense sur les zones grises de l’enquête, les scellés inexploités, les sujets laissés pour plus tard n’auraient rien d’agréable pour elle. L’ex-juge antiterroriste a donc pris les devants, et a déplié dans un long préambule sa propre version de l’enquête sur les attentants des 7 et 9 janvier 2015, qui ont vu les frères Kouachi et Amedy Coulibaly tuer 17 personnes, à la rédaction de Charlie Hebdo, à Montrouge (Hauts-de-Seine) et au magasin Hyper Cacher de la porte de Vincennes à Paris.

Large veste gris taupe sur les épaules, cheveux blond platine, gênée par une frange qui lui couvre les yeux et l’oblige à secouer régulièrement la tête, la magistrate résume : « C’est un dossier important qui m’a occupée durant quatre ans. »

Des enquêteurs de police judiciaire près des bureaux de Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015 à Paris. © Photo Dominique Faget / AFP

« Je ne vais pas parler des attentats eux-mêmes, si ce n’est pour dire que les attentats ont peut-être été un choc, mais pas une surprise », dit-elle. La juge antiterroriste qu’elle était – de 2009 à 2019 - avait « senti les choses venir », étant, souligne-t-elle, « la plus pessimiste ». « J’ai été cosaisie dans le dossier Merah, qui était le révélateur de ce qui passerait en 2015. Ce qu’avait fait Mohamed Merah n’était que le début », dit-elle.

Mais Nathalie Poux avait d’autres clés de compréhension, et non des moindres. Elle avait aussi fait « quelques actes » dans le dossier réunissant, en 2010, Amedy Coulibaly et Chérif Kouachi aux côtés de l’ancien djihadiste algérien Djamel Beghal pour « association de malfaiteurs terroristes ».

J’avais mis en examen Chérif Kouachi et Amedy Coulibaly. J’avais l’impression de les avoir vus alors qu’ils étaient morts en janvier 2015.

Nathalie Poux, ancienne juge antiterroriste

« J’avais mis en examen Chérif Kouachi et Amedy Coulibaly, poursuit-elle. J’avais l’impression de les avoir vus alors qu’ils étaient morts en janvier 2015. » La position de « mentor » de Djamel Beghal, plusieurs fois condamné pour des faits liés au terrorisme, vis-à-vis des terroristes de janvier 2015 l’avait « perturbée ». « Je me disais qu’il avait pu donner son aval à des actions sur le territoire national », ajoute-t-elle. Mais les perquisitions visant Beghal, alors détenu, furent vaines.

« On retrouve des personnes qui étaient dans ce précédent dossier, poursuit-elle. Ces personnes étaient connues des services spéciaux. Nous avons fait des demandes de déclassification pour savoir ce que les services de renseignement avaient pu faire. »