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Quentin Zuttion : « Je vais adapter ma BD en court-métrage »

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C’était une surprise ou, pour vous, votre BD pouvait être primée ?

Quentin Zuttion. Il a fallu que je redescende. J’ai été un peu surpris, ça gonfle l’ego très vite (rires). Je suis honoré parce que le jury était composé de personnes incroyables. Quand on a dit mon nom, je me suis pris pour Léa Seydoux. J’ai fait des câlins aux gens, c’étaient les César. J’ai aussi appelé ma maman, comme un bon petit garçon fier de ce qu’il a fait.

Comment est née l’idée de cet album?

Elle vient d’une anecdote très bête de mon enfance : je me déguisais et je jouais au prince et la princesse avec un ami un peu plus âgé que moi. Je jouais à mourir à répétition pour qu’il soit obligé de m’embrasser. Ce qui parlait de beaucoup de choses : d’amour, de désir, de quête identitaire, du jeu et de ce qu’on met derrière. En l’occurrence, pour moi, c’était un peu de la manipulation. Je testais les petits papillons que j’avais dans le ventre. Dans la BD, j’ai extrapolé en retraçant aussi les histoires de deux autres personnages : la grande sœur et la maman. Pour parler d’amour à trois âges différents et de désillusions.

Vous avez mis du temps à écrire cette BD, parce qu’elle était personnelle ?

Je pense. Et aussi parce que je voulais faire mes preuves dans de la fiction pure. Même si je triche un peu : ce n‘est jamais de la fiction pure. Par exemple, pour la Dame Blanche (2021), ma grande sœur est infirmière en maison de retraite. Je fais un livre par membre de ma famille. Dans Touchées (2019), l’un des personnages retrace le parcours de mon autre grande sœur. Maintenant, mon petit frère attend la sienne avec impatience.

Cette BD n’était pas destinée à un jeune public…

Pas du tout ! D’ailleurs, la sélection jeune nous a beaucoup surpris, au début. Mais elle fait sens aussi. Des ados peuvent se l’approprier facilement. Ça dépend surtout de l’éducation qu’on donne à ses enfants. S’ils ont une ouverture à la culture, il n’y a pas de problème. L’un des personnages a sept ans et qui entend de graves choses, comme tous les enfants. Cette BD parle aussi de séparation, de divorce.

Aujourd’hui, cela fait sens pour vous que cette BD ait figuré dans la sélection jeunesse ?

Cela fait sens aussi par rapport à l’actualité. Ces dernières semaines, on entend beaucoup parler du jeune Lucas. À 13 ans, il a subi du harcèlement homophobe et a fini par mettre fin à ses jours. On dit que ça va mieux, et c’est vrai. À mon époque, au collège et au lycée, quand on avait ces désirs en nous, on pouvait très facilement se cacher pour mourir. On entend Macron dire qu’au collège, c’est trop tôt pour parler de désir, de sexualité, de genre… J’ai envie qu’on en parle dès le CP, avec des mots adaptés à des enfants de cet âge. L’argument principal, est : « On a peur, on va les déranger. On ne va pas leur mettre des idées dans la tête, ça va les perturber. » Pour mon histoire personnelle, c’est le fait qu’on n’en ait jamais parlé qui m’a perturbé et fracassé la tronche. C’est de m’être détesté à partir du moment où j’ai ressenti du désir pour ces garçons. D’avoir commencé à me râper la peau à la pierre ponce le matin, à 12 ans, parce que je faisais des rêves où je suçais une bite. Alors, bien sûr que si : à 12 ans, on sait si on est PD. Les petits connards et connasses, dans les cours de récré, nous insultent avant qu’on ait compris nous-même notre sexualité. Moi, on m’a appelé PD à six ans. Je ne savais pas ce que c’était, mais par contre, j’ai compris que c’était mal. C’est ça qui fracasse, qui fait que la sexualité des jeunes homosexuels se construit d’abord par la violence et le rejet.

Quels sont vos prochains projets ?

Une prochaine BD, mais qui ne sera pas pour tout de suite. Parce que je suis fatigué. Je vais prendre un peu mon temps. J’y adapte un roman en BD. Ça sera chez Dupuis, en 2024. Mais je ne sais pas vraiment quand. Cela fait un moment que j’ai envie de me confronter à autre chose, je vais adapter Toutes les princesses en court-métrage. J’ai une productrice et on cherche les sous.