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Rachid Hami, cinéaste au nom du frère

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Rachid Hami devant le portail des Invalides à Paris, le 13 janvier 2023.
ANAÏS BARELLI POUR M LE MAGAZINE DU MONDE
Par Christophe Ayad

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PortraitIl rêvait de faire du cinéma et son frère Jallal, d’intégrer l’armée. Ce dernier est mort en 2012 lors d’un bizutage à Saint-Cyr. De ce drame, qui a donné lieu à trois condamnations pour homicide involontaire en 2020, Rachid Hami a fait la matière de son second film, « Pour la France », en salle le 8 février.

Il arrive que l’actualité, en percutant certaines vies, jusqu’à les faire exploser en morceaux, affermisse aussi des volontés, trace des destins, irradie un parcours. Le drame est entré dans la vie de Rachid Hami le 30 octobre 2012, quand il a vu arriver deux hommes en uniforme et képi, la mine grave, au domicile parisien de sa mère. « On a compris tout de suite pourquoi ils étaient venus, la seule question qu’on a posée c’était : “Comment” ? », raconte-t-il.

Son frère Jallal Hami, le deuxième d’une fratrie de trois, est devenu ce jour-là « le noyé de Saint-Cyr » : un brillant étudiant de Sciences Po à Paris, né en Algérie et qui a grandi en Seine-Saint-Denis, entré à la très conservatrice école des officiers de l’armée de terre de Saint-Cyr Coëtquidan (Morbihan), décédé lors d’un exercice en groupe de traversée de nuit d’un étang glacé revêtu de tout son barda et d’un casque lourd. On appelle ça un « bahutage », en fait un bizutage, dans le jargon de l’institution militaire qui se plaît encore à y voir une « transmission des traditions ».

Le lendemain, l’aîné de la famille et sa mère se rendent à Rennes pour reconnaître le corps. Le procureur leur annonce qu’une enquête est ouverte pour homicide involontaire. « Nous savions que le temps de l’enquête et de la justice serait long, raconte Rachid Hami, qui ne se doutait pas alors qu’il faudrait attendre huit ans pour le procès. A ce moment-là, ce qui compte pour nous, c’est que Jallal soit enterré avec les honneurs qu’il mérite. »

Commence une longue épreuve de force avec l’armée de terre sur les modalités de l’inhumation de Jallal. C’est, entre autres, le sujet du deuxième long-métrage de fiction de Rachid Hami, 37 ans, Pour la France, où il s’inspire de son histoire ; lui et son frère Jallal y sont interprétés par les comédiens Karim Leklou (BAC Nord…) et Shaïn Boumedine (Mektoub, My Love). Le film, présenté lors de la dernière Mostra de Venise, sort en salle le 8 février.

Bras de fer militaire

Malgré les promesses du commandant de l’école de Saint-Cyr, au lendemain du décès, l’armée refuse les honneurs militaires à Jallal et envisage de l’inhumer dans le carré musulman du cimetière de Bobigny. Un double affront pour une famille qui a toujours mis un point d’honneur à se considérer comme Française avant tout.

« L’armée ne s’est pas bien conduite. Nous considérions que la mort de Jallal, par la faute de ses camarades, était une trahison. En refusant de le reconnaître comme l’un des siens, l’armée le trahissait une seconde fois », explique Rachid Hami. Puis il tempère : « L’armée n’est pas pire que le reste de la société, elle se conduit comme elle. »

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