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Réforme des retraites : Article 40 et « basses manœuvres »… La bataille se poursuit à l’Assemblée

A l’Assemblée nationale,

D'un grand « gloup », Eric Coquerel avale à la hâte sa bouteille d’eau. Saisi en tant que président de la commission des Finances par la majorité, le député insoumis a la bouche sèche au moment d’annoncer sa décision sur la proposition de loi du groupe centriste Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer, Territoires). Le texte, qui vise à abroger une partie de la réforme des retraites du gouvernement, doit être examiné ce mercredi en commission des Affaires sociales. Mais est-il pour autant conforme à la Constitution ?

Depuis plusieurs jours, la majorité brandit l’article 40 et la recevabilité financière pour torpiller le texte avant son arrivée dans l’Hémicycle le 8 juin… Et s’éviter un dangereux vote sur une réforme toujours aussi décriée à travers le pays.

« Cela donne l’impression d’une majorité aux abois »

« J’ai décidé de rendre recevable la proposition de loi », balaye, non sans surprise, Eric Coquerel lors de sa conférence de presse, donnant le feu vert à l’examen du texte. Dans un long argumentaire s’appuyant sur la « jurisprudence », le député insoumis défend « une application souple » de la Constitution et dénonce les pressions venues de l’exécutif ces derniers jours. « J’ai vu la Première ministre se transformer en constitutionnaliste […] C’est vrai de la part du gouvernement, mais aussi de la majorité, et pas toujours de manière très courtoise », grince l’élu LFI de Seine-Saint-Denis, alors qu’Elisabeth Borne a jugé « inconstitutionnelle », le 17 mai dernier, la proposition de loi Liot. Ce mardi matin encore, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, tançait sur France 2 son adversaire politique, le rappelant à sa « mission institutionnelle ».

« Cela donne l’impression d’une majorité aux abois », réplique à la mi-journée Christine Pires Beaune, députée PS membre de la Commission des Finances. « J’ai envie de leur dire solennellement "laissez-nous faire notre travail de législateur !" La décision d’Eric Coquerel n’est pas politicienne, pas partisane. Si on devait appliquer de manière bête et méchante l'article 40, 90 % des propositions de loi et des amendements n’arriveraient pas en discussion », ajoute l’élue socialiste du Puy-de-Dôme.

La majorité a encore une arme en main

Les macronistes, qui espéraient bien s’être débarrassée de ce sujet explosif, voient donc revenir le spectre d’un vote la semaine prochaine. Aurore Bergé, la présidente du groupe Renaissance, évoque alors, en conférence de presse, l'« indignation » de la majorité par rapport à la décision d’Eric Coquerel. « C’est un détournement de la procédure [et] une utilisation partisane, politique, de la responsabilité qui est la sienne ». Le camp présidentiel reste fidèle à sa ligne : la loi Liot est « irrecevable » car elle aggrave de « plus de 20 milliards » les dépenses publiques, une intiative financière qui n’est pas du ressort des parlementaires.

« On ne ment pas aux Français en portant, avec la plus grande démagogie, un texte dont chacun sait ici, pertinemment, qu’il serait censuré par le Conseil constitutionnel », enfonce dans l’après-midi Elisabeth Borne lors des questions d’actualité au gouvernement. Les macronistes n’ont toutefois pas dit leur dernier mot et pourraient voter en commission la suppression de l’article 1 du texte Liot (qui annule le report de l’âge légal à 64 ans). 

Si tel était le cas, le groupe centriste devrait réintroduire sa mesure d’abrogation par amendement avant le 8 juin… laissant alors la possibilité à la présidente de l’Assemblée nationale de l’écarter elle-même au nom de l’article 40. « Il faut respecter les règles du jeu ! Même si cela donne un peu l’impression qu’on fait des manœuvres », reconnaît en privé un député Renaissance. Charles de Courson, député Liot, soupire. « On entend des rumeurs de maneouvres pour empêcher le vote, ce serait un précédent d’une extrême gravité, dit-il, renvoyant les journalistes « au prochain épisode ». Malgré sa promulgation le 15 avril dernier, la réforme des retraites n'a pas fini d'agiter la classe politique.