France
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Réforme des retraites : « Un coin est enfoncé entre les classes moyennes et les classes populaires »

auteur

Pierre-Cyrille Hautcoeur

Directeur d'études à l'EHESS

L’historien Pierre-Cyrille Hautcœur rappelle, dans sa chronique, que c’est l’effondrement des marchés financiers dans les années 1930-1940 qui a conduit à préférer les systèmes de répartition, plus égalitaires, aujourd’hui dans le collimateur de la réforme.

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Grâce aux débats récents sur les retraites, un objectif majeur – mais jamais avoué – de la plupart des gouvernements français depuis plus de vingt ans perce enfin au grand jour : basculer d’un système de retraite de type bismarckien à un système beveridgien. Ces deux systèmes se distinguent économiquement, mais aussi politiquement. En matière économique, un système bismarckien (Otto von Bismarck, 1815-1898, chancelier d’Allemagne) est neutre au sens où il redistribue des uns vers les autres : les cotisations comme les prestations sont proportionnelles aux salaires ; pour la plupart des retraités, les pensions du système constituent l’essentiel de leur revenu.

En revanche, dans un système beveridgien (William Beveridge, 1879-1963, économiste britannique), seule une retraite minimale est assurée universellement, financée par l’impôt. Ceux qui veulent davantage épargnent individuellement ou collectivement (par des fonds de pension). Politiquement, le système beveridgien sépare les classes populaires, seules dépendantes du système et bénéficiaires d’une certaine redistribution, des classes moyennes, solidaires des plus aisés dans la gestion financière de leur épargne. Inversement, le système bismarckien rapproche classes populaires et moyennes dans le souci du bon fonctionnement de la répartition, mais aussi patrons et salariés, qui cogèrent le système.

En France, comme dans nombre de pays, le système de retraites fonctionne depuis 1945 par répartition, du fait de l’effondrement de la valeur des capitaux lors des guerres mondiales et de la crise des années 1930. Ces expériences ont en effet conduit les classes moyennes à préférer un système de retraite socialisé et presque universel : même les professions libérales, initialement hostiles, ont fini par le rejoindre, et les négociations entre régimes professionnels aux situations démographiques différentes ont conduit à une homogénéisation progressive qui a renforcé l’adhésion au système. La réforme initialement proposée par le président Macron (la « retraite par points ») visait d’ailleurs à accroître cette homogénéité.

Capitalisation

Mais le vent a tourné : sous prétexte de lutte contre le chômage, les gouvernements ont réduit les cotisations et compensé le manque à gagner par des impôts affectés. L’Etat prend ainsi le contrôle de l’assurance-retraite et impose un ensemble de transformations. D’une part, en laissant croître les déficits sans ajuster les cotisations, il met une pression à la baisse sur les prestations. D’autre part, en assimilant les cotisations aux impôts, il suscite la crainte de tous ceux qui se pensent pénalisés par l’impôt. Enfin, en suggérant que le rendement financier individuel du système est faible, il laisse espérer à ceux qui en ont les moyens de tirer bénéfice d’instruments de capitalisation.

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