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Réguler les influenceurs : que prévoit la future loi ?

Une proposition de loi pour encadrer la profession d’influenceurs est discutée au Parlement. Le texte, ambitieux, aura un impact important sur la façon dont les influenceurs et les influenceuses se comportent sur les réseaux sociaux.

Un texte pour « lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux ». C’est comme cela que la proposition de loi sur le travail de l’influence a été présentée par ses deux rapporteurs, Arthur Delaporte (Nupes) et Stéphane Vojetta (Renaissance). L’objectif du texte est d’encadrer davantage cette profession, encore très nébuleuse, mais de plus en plus populaire sur les réseaux sociaux et auprès des jeunes. Et toujours plus visible.

Passé jusque-là relativement inaperçu, le texte a soudainement fait parler de lui avec la publication d’une tribune dans Le Journal du Dimanche. La tribune, signée par des influenceurs et des youtubeurs, appelait les parlementaires à ne pas « casser » leur modèle économique vertueux, mais a fait polémique sur la façon dont les signatures ont été récoltées.

La proposition de loi doit être examinée par la commission des affaires économiques le 28 mars 2023, avant de passer en séance publique le 30e. S’il est adopté, au bout de son processus parlementaire, qui nécessitera aussi un passage au Sénat, le texte transformera probablement une part de l’écosystème français des influenceurs. Voici tout ce qu’il faut savoir.

Un meilleur encadrement

Une définition de l’influenceur

Le texte propose un large éventail de mesures, mais cherche tout d’abord à encadrer plus formellement la profession. Les influenceurs sont donc précisément définis comme étant des personnes « qui mobilisent leur notoriété pour communiquer au public par voie électronique des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ». Cette promotion se fait « en contrepartie d’un bénéfice économique ou d’un avantage en nature. »

Le texte cherche à encadrer les pratiques des influenceurs // Source : Canva
Le texte cherche à encadrer les pratiques des influenceurs // Source : Canva
Le texte cherche à encadrer les pratiques des influenceurs // Source : Canva

Précision importante : le texte note qu’il faut que la contrepartie ait une « valeur est supérieure aux seuils fixés par décret » pour qu’une personne soit considérée comme « exerçant l’activité d’influence commerciale par voie électronique ». En clair : le texte propose d’instaurer un montant minimum de rémunération pour atteindre le statut d’influenceur.

Encadrement de l’agent d’influenceur

La proposition de loi veut aussi réguler le métier d’agent d’influenceur, dont le rôle est de plus en plus important : négociation des prix des contrats des influenceurs, choix de ce qui sera promu, etc. Désormais, pour être agent, un contrat écrit avec la personne représentée devra être établi. Les agents doivent faire en sorte d’éviter « les situations de conflits d’intérêts » et prendre « toutes mesures nécessaires pour garantir la défense des intérêts » de leur star.

Des règles durcies pour les influenceurs

Les promotions de NFT et de crypto interdites

Bruno Le Maire avant d’ores et déjà déclaré qu’il souhaitait que les influenceurs soient « soumis aux mêmes règles publicitaires que les médias ». Les influenceurs auront donc interdiction de faire la promotion de certains types de produits ou d’activités.

« Sauf exception », les influenceurs auront interdiction de faire la promotion d’actes en lien avec la chirurgie esthétique ou la médecine, mais aussi de mettre en avant certains produits et services financiers (notamment les crypto-monnaies et les NFT). La promotion de produits illicites et contrefaisants reste complètement interdite.

Déclarer les images retouchées et les promotions

« Les images ayant fait l’objet d’une modification par tous procédés de traitement d’image doivent être accompagnées de la mention : « Images retouchées » », selon le texte. La phrase reste pour l’instant vague. Mais, en cas d’application rigoureuse, on peut imaginer qu’elle imposerait aux influenceurs de préciser s’ils ont recouru à des filtres sur des selfies, ou si certains clichés sont retouchés avec Photoshop ou un autre logiciel.

Les promotions doivent être « explicitement indiquées par une mention claire, lisible et identifiable sur l’image ou la vidéo », et ce, durant l’intégralité de la promotion. Il existait déjà l’obligation pour les influenceurs de préciser lorsqu’une publication était sponsorisée, mais dans de nombreux cas, elle restait mal appliquée ou ignorée.

Des clauses spéciales pour les résidents de Dubaï

De nombreux influenceurs français n’exercent pas sur le territoire national, mais à l’étranger — notamment Dubaï. La ville au Moyen-Orient s’est transformée en quelques années en paradis pour les créateurs de contenus, et l’éloignement peut faire croire qu’il est possible de contourner les règles françaises, sans risque et sans contrainte.

Dubai attire les influenceurs // Source : Canva
Dubai attire les influenceurs // Source : Canva
Dubai attire les influenceurs // Source : Canva

Pour y remédier, le texte indique que si un influenceur « n’est pas établi sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne », il devra « désigner un représentant légal […] pour ses activités d’influence commerciale par voie électronique sur le territoire français ». Le représentant légal et l’influenceur « sont soumis au droit français pour tout ce qui relève des activités d’influence commerciale par voie électronique à destination de la population française. »

Ainsi, pas question d’essayer de contourner les réglementations en vigueur. Tous les contrats commerciaux devront être établis avec les représentants légaux des influenceurs s’ils ne sont pas établis dans l’Union européenne.

Le label « influenceur responsable »

Une mesure retient particulièrement l’attention. Le texte propose d’instituer « un label national ‘Relations influenceurs responsables’, pouvant être accordé à toute personne morale contribuant, dans le cadre de ses activités, à la prévention des arnaques et des dérives des personnes exerçant l’activité d’influence commerciale par voie électronique. »

On n’en sait pas plus sur ce label. La mesure soulève néanmoins de nombreuses questions. Comment le label sera-t-il attribué ? Par qui ? Les influenceurs le recevant auront-ils des avantages, auront-ils des missions supplémentaires ? Le texte n’explique rien, et se contente de dire que « les modalités d’application du présent article sont fixées par décret. »

Un statut de « signaleur de confiance »

Dernière mesure aux contours incertains : le statut de « signaleur de confiance ». « L’autorité administrative compétente octroie […] le statut de signaleur de confiance à des personnes morales dont l’un des objets est de lutter contre la violation des dispositions du Code de la consommation et de la présente loi », peut-on lire dans le texte. Ces signaleurs de confiance ne sortent pas de nulle part : ils sont décrits par le règlement européen du DSA.

Selon le texte européen, le statut de signaleur de confiance est « attribué dans chaque pays à des entités ou organisations en raison de leur expertise et de leurs compétences », et ils ont pour mission d’aider à la modération des plateformes. Lorsqu’ils font un signalement, « leurs notifications seront traitées en priorité. »

La proposition de loi prévoit un mécanisme semblable au niveau français, exprès pour les influenceurs. Les signaleurs de confiance devront vérifier que la loi est bien respectée, et faire des signalements en cas de fraude. Les réseaux sociaux devront « prendre les mesures […] nécessaires pour veiller à ce que les notifications soumises par des signaleurs de confiance, agissant dans leur domaine d’expertise désigné […] soient traitées prioritairement et donnent lieu à des décisions dans les meilleurs délais. »

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