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Reportage: en première ligne au Samu d’Angoulême avec les assistants de régulation

Reportage: en première ligne au Samu d’Angoulême avec les assistants de régulation
Au Samu, les assistants régulateurs sont vos premiers interlocuteurs. Ils doivent évaluer l’urgence d’une situation en instantané.

Renaud Joubert

Par Jean-François BARRÉ - jf.barre@charentelibre.fr, publié le 8 février 2023 à 20h15.

Ils sont assistants de régulation médicale. Au centre 15, au Samu du centre hospitalier de Girac, ils sont les premiers à décrocher les appels d’urgence. Leur métier évolue. L’hôpital recrute.

Elle est tombée comment, dans l’escalier ? » Au bout du fil, le mari. Sophie Bourrier est médecin régulateur au Samu centre 15, dans les entrailles de l’hôpital d’Angoulême. C’est elle qui valide, qui prend la décision. C’est rarement elle qui prend les appels. La vieille dame dans l’escalier, c’est Maxime Diaz qui lui a transmis. Lui, il est ARM, assistant de régulation médicale, comme ses deux autres collègues qui occupent le bocal du 15 en journée. Il est ancien sapeur-pompier, est entré au Samu il y a huit ans. Le même parcours que Bertrand Laberthonnière, 40 ans, le regard vissé sur l’immense écran courbe, à la fois tour de contrôle et salle d’attente virtuelle...

Elle est tombée comment, dans l’escalier ? » Au bout du fil, le mari. Sophie Bourrier est médecin régulateur au Samu centre 15, dans les entrailles de l’hôpital d’Angoulême. C’est elle qui valide, qui prend la décision. C’est rarement elle qui prend les appels. La vieille dame dans l’escalier, c’est Maxime Diaz qui lui a transmis. Lui, il est ARM, assistant de régulation médicale, comme ses deux autres collègues qui occupent le bocal du 15 en journée. Il est ancien sapeur-pompier, est entré au Samu il y a huit ans. Le même parcours que Bertrand Laberthonnière, 40 ans, le regard vissé sur l’immense écran courbe, à la fois tour de contrôle et salle d’attente virtuelle pour les appels en attente. « Tout sur l’écran, tout dans l’oreillette ».

 Ils sont en première ligne. Ils sont les piliers et l’ossature d’un service comme ça.

Depuis douze ans, Bertrand décroche le téléphone au centre 15. « Pas seulement. Il explique : on localise, on identifie, on évalue l’appel d’urgence. On priorise, on oriente » vers le médecin urgentiste, ou vers le généraliste qui a établi ses quartiers dans le bocal voisin. Il décide, aussi. « Mon mari a fait un malaise, il ne respire plus ». C’est l’assistant qui déclenche. « On envoie les secours avant même la régulation » parce qu’il vaut mieux rappeler une ambulance que prendre du retard. « Et on guide les gens au téléphone, pour engager les premiers secours, effectuer un massage cardiaque ». C’est un métier sensible. « Savoir faire les gestes, c’est une chose, savoir les faire faire, c’est très différent », commente le Dr Sophie Bourrier. Au téléphone et à distance, en attendant l’arrivée des secours. Les assistants gèrent leur intervention de A à Z, s’il faut trouver un lit ou orienter un hélico.

Des écrans, un casque, une salle d’attente virtuelle. L’univers de la régulation.
Des écrans, un casque, une salle d’attente virtuelle. L’univers de la régulation.

Renaud Joubert

De l’autre côté des écrans, Marie Michenau acquiesce. À 29 ans, ancienne ambulancière pour qui le SAMU était une vocation, elle est entrée en formation sur le terrain, au centre 15, à Girac, s’apprête à entrer à l’école. Dans l’équipe, elle sera la première des quatre recrues à intégrer cette nouvelle formation. Et au terme de son année d’études à Poitiers, elle reviendra à l’hôpital d’Angoulême qui finance sa formation. Marie est, comme les plus anciens, en contrat avec Girac. « Quand on les forme, c’est pour les garder », lance, comme une évidence le Dr Bourrier.

Rater un appel, c’est impossible

L’hôpital a besoin d’eux et cherche à recruter. La prochaine formation, en interne, débutera en mars. « Il y a des candidatures, pas suffisamment, ou qui ne répondent pas forcément à nos critères », tempère Rémy Loyant, président de la CME de Girac et patron du Samu. En 2022, le 15 a reçu 200 000 appels. « C’est +15 % traduit le patron. Une campagne nationale a dit aux gens de faire le 15 avant d’aller aux urgences, ils n’ont retenu que la première partie. Ils banalisent le 15. On peut être appelés à 2 heures du matin pour savoir combien d’eau il faut dans le biberon »… Il n’y a plus de gardes, c’est le seul service qui répond jour et nuit.

Dès lors, il sait ce qu’il doit aux dix-sept assistants qui épaulent les huit médecins régulateurs du service. « Ils sont en première ligne. Ils sont les piliers et l’ossature d’un service comme ça ». Sans le droit à l’erreur. « Rater un appel, c’est impossible. Autrement, c’est dramatique », confirme Bertrand Laberthonnière,

C’est un métier difficile. il faut être motivé, plutôt ordonné dans sa tête. On est toujours dans l’anticipation.

Ils n’ont pas les yeux rivés sur l’écran qui leur indique qu’ils ont décroché 100 % des appels en moins d’une minute, que 43 % l’ont été moins de quinze secondes, mais tous ont ces chiffres à l’esprit. Leur titre, c’est assistant. Ils ne sont reconnus personnel médical que depuis la mi-janvier, sont payés 1 800 euros par mois, alternent les nuits et les journées, mais sont conscients que leur responsabilité est énorme. « C’est un métier difficile. il faut être motivé », euphémise Bertrand Laberthonnière, « plutôt ordonné dans sa tête. On est toujours dans l’anticipation ». La société évolue et les choses se sont emballées. « Il y a un an, on recevait 30 appels le week-end. Aujourd’hui c’est soixante », souligne Rémy Loyant. Le 15 est en train de changer.

La part des choses

Évaluer, discerner, prioriser. « J’ai reçu un appel d’un brûlé, se souvient Maxime Diaz. Ça datait de trois jours. De l’huile de friture. Je l’ai incité à consulter son médecin. Un de ses amis a rappelé. « Il n’est est pas brûlé partout ? » « Ben quand même ». On a envoyé une ambulance. Il a fini aux grands brûlés ». C’est toute la difficulté. « Nos patients, c’est nos yeux. On se fie à ce qu’ils disent ». Quitte à parfois déclencher pour rien, pour cette dame qui décrivait un fauteuil où il n’y avait personne « mais vous voyez bien qu’il est en arrêt cardio respiratoire ». C’est elle qui a été transportée en psychiatrie.

Il faut faire la part des choses, « entre ceux qui hurlent pour un bobo et ceux qui restent très calmes alors que c’est hyper grave ». Les assistants de régulation bossent beaucoup, « mais humainement, c’est enrichissant ». Ils se font parfois insulter, prennent le détresses de plein fouet, savent gérer l’agressivité, se font parfois engueuler parce qu’ils n’ont pas de solution. « Émotionnellement, c’est parfois dur ». Mais « on a aussi des gens qui appellent pour nous remercier, ou pour s’excuser d’avoir été odieux tout à l’heure ». Ils ont surtout le sentiment d’être utiles, de sauver des vies.

Le casque bourdonne. Une femme s’inquiète. Son fils a eu la scarlatine, sa fille présente des symptômes. L’opérateur jette un œil à la pendule. « Il est 12 h 24. le cabinet médical est fermé ». Le 15 est ouvert.

Girac recrute et forme

Assistants de régulation, nouvelle génération. « Tout est parti de l’histoire de Strasbourg » reconnaît Rémy Loyant. En 2017, un appel traité par le mépris par deux opératrices du Samu s’était soldé par la mort d’une patiente et l’affaire avait fait scandale. « Il a fallu s’interroger sur la formation, uniformiser ».
Elle est aujourd’hui plus pointue. Un mois de théorie, de maîtrise du logiciel, puis une période en doublette, au centre 15, « le temps nécessaire » et une année de formation à l’école avant de revenir prendre un poste, diplômé. Si le profil « type » est souvent celui d’anciens pompiers, d’ambulanciers, qui connaissant le terrain et sont capables de s’adapter à distance parce qu’ils visualisent les choses, aucun prérequis n’est imposé. Pas plus qu’un niveau de diplôme.
La première étape, c’est un CV, une lettre de motivation, adressés à recrutement@ch-angouleme.fr