France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Réseau de proxénétisme démantelé : "Elles étaient exploitées de manière absolument industrielle dans toute la France"

Le 29 novembre, un vaste réseau de proxénétisme a été démantelé. Depuis trois pays différents, les enquêteurs ont relevé 12 personnes suspectées d'être responsable de l'organisation qui a exploité une cinquantaine de victimes.

En coordination avec les autorités espagnoles et colombiennes, l'Office central de lutte contre la traite des êtres humains a interpellé douze personnes qui pourraient être à l'origine d'un large réseau de prostitution en France, depuis la Colombie, le Vénézuala, le Pérou et le Paraguay, selon une information de France Inter et du Parisien

La promesse d'une vie meilleure

Les victimes des proxénètes se sont vues offrir une vie pleine de belles promesses, entre rêve à la française et emploi légal dans l'hexagone. Le piège s'est ensuite refermé sur ces femmes, ayant entre 20 et 40 ans, soudain forcées à se prostituer à "un rythme très soutenu", d'après les propos d'Elvire Arrighi, qui dirige l'Office central de lutte contre la traite des êtres humains, recueillis par nos confrères de France Inter

Dans un premier temps, les victimes étaient contraintes de rembourser le prix de leur trajet jusqu'en France. Par la suite, l'obligation de verser la moitié de leurs revenus à leurs "employeurs". Elvire Aghiri précise à France Inter, que l'organisation est faite pour que les victimes ne puissent pas s'en sortir.

"Si on imagine qu'une passe d'une demi-heure va être facturée 50 euros, ça fait 25 euros pour la victime, 25 euros pour le réseau. À raison de 10 passes par jour, cela fait 250 euros par jour pour la victime. Il est évident que ce sont des sommes extrêmement importantes, qu'elles ne pourraient que difficilement gagner dans leur pays d'origine, et qui donc font qu'elles restent sous emprise de ce réseau, puisqu'elles ont besoin d'envoyer de l'argent à leur famille". 

"Une organisation quasi industrielle"

L'enquête menée par le Junalco (Juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée), révèle que tout le réseau a été pensé pour exploiter ses victimes à grande échelle. Entre recrutement de petites mains pour s'occuper des questions logistiques, "standardistes" pour recevoir les appels des clients et têtes de réseaux bien cachées en Colombie... rien n'a été laissé au hasard. 

L'organisation est bien rodée. On retrouve les profils des prostituées sur internet, où des sites spécialisés dans l'escorting existent par dizaines. Chaque page propose un numéro de téléphone, il est alors possible pour le client d'appeler pour prendre rendez-vous. Une quarantaine de téléphones à doubles puces, situés en Espagne mais ayant des numéros français, ont été retracés. 

Les personnes qui répondaient aux téléphones n'étaient pas les victimes, mais des organisateurs qui agençaient à leurs dépens leur planning de clients. "Les victimes n'étaient à aucun moment maîtresses de leur emploi du temps, et se voyaient imposer un rythme de travail extrêmement soutenu", rapporte la directrice de l'OCRTEH. 

Des millions d'euros de profit

Les enquêteurs ont découvert que, la plupart du temps, le prix pour une demi-heure passée avec l'une des victimes était de 50 €, la moitié revenant aux proxénètes était donc de 25 €, multipliés par une dizaine de passes par jour. En un an, mis bout à bout, ces chiffres atteignent des sommes importantes, entre 4 et 5 millions d'euros. Mais pour les autorités, il ne s'agit que de la fourchette basse. 

Pour la directrice de l'Office central de lutte contre la traite des êtres humains, "nous pensons qu'il y avait en réalité plutôt 20 ou 30 millions d'euros par an générés par cette activité prostitutionnelle". 

Une enquête internationale

Les enquêteurs ont, pour le moment, identifié une cinquantaine de victimes. Depuis deux ans, après une première plainte déposée par deux femmes à Bordeaux, des investigations sont menées pour découvrir qui est derrière ce sordide réseau. Ces années d'investigations ont pu être financées grâce à des fonds européens.

La directrice de l'OCRTEH mentionne le fait que cette enquête prouve que "particulièrement dans le domaine de la traite des êtres humains, la criminalité organisée n'a pas de frontières, et il est absolument déterminant pour la police de démontrer que les enquêtes n'ont pas de frontières non plus". 

L'interpellation des douze suspects a pu se faire grâce à une coordination internationale. Le coup de filet était simultané, entre la France, la Colombie et l'Espagne. Dans l'hexagone, quatre personnes ont été interpellées et un mandat d'arrêt européen a été émis pour six personnes en Espagne, elles seront bientôt remises à la France. Deux personnes ont été arrêtées en Colombie, un couple entre un Colombien et une Vénézuélienne. Ils sont suspectés d'être à la tête de ce trafic d'envergure.