France
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Rouen Sur les ponts de Seine coule la colère

Envoyée spéciale.

Mission accomplie. À Rouen, trois ponts enjambant la Seine sont simultanément noirs de monde. 23 000 personnes ont défilé, mardi 31 janvier, sur ce parcours de manifestation des grands jours, soit 3 000 de plus que le 19 janvier. « C’est énorme », constate Yann Mallet, secrétaire général CGT des dockers, en regardant la foule serpenter du pont Pierre-Corneille vers le suivant. À l’arrière d’un camion, un faux cercueil contenant un ouvrier mort pose le niveau de détermination face à une hypothétique retraite à 64 ans. « Les micro-ajustements que veut proposer le gouvernement, c’est de la merde. Il va falloir qu’il revienne sur l’âge légal et, pour cela, on va monter d’un cran », tranche-t-il.

Si les militants se sont déplacés en masse, les retraités, les familles et les groupes d’amis étaient aussi nombreux à longer les rives et arpenter les rues. Florian, 13 ans, n’a pas lésiné sur les préparatifs. Avec son père, Ludovic, ouvrier chez Renault Cléon, il a agrémenté son gilet fluorescent d’un message provocateur :  « J’arrête le collège, je vais bosser pour ma retraite ! » Le jeune homme inscrit en sport-étude est sincèrement préoccupé par l’avenir :  »Je regarde les infos et c’est chaud de bosser jusqu’à cet âge-là. Surtout qu’après ma carrière de footballeur, j’envisage d’être kiné. »

« on a envie de profiter de la vie »

Hélène, infirmière en clinique, marche avec sa fille Marilou, dont l’école est fermée en raison de la mobilisation : « Elle est autant concernée que nous », explique-t-elle. La paramédicale, déjà sur la brèche le 19 janvier, n’envisage pas de s’arrêter là : «J’ai réussi à m’organiser pour faire grève et motiver plus de collègues que la dernière fois, même si on ne peut pas laisser les patients en plan. J’ai fait une simulation : je pourrai prendre ma retraite à taux plein à 68 ans alors que j’ai commencé ma carrière à 25 ans », sourit-elle, amère.

Avec sa pancarte « On n’est pas des Michel » , ornée d’une photo de Michel Drucker, Wided, 32 ans, ingénieure pédagogique à l’université, signale qu’elle n’est pas prête à travailler aussi tard que l’illustre présentateur de télévision.  » Nous, on a envie de profiter de la vie. J’ai vu mes parents arriver en retraite très fatigués », dit-elle. Pour sa collègue Louise, cette question est transgénérationnelle. « Mon père et ma mère, qui étaient très engagés, sont décédés à 62 ans et 58 ans. Je suis bénévole dans le milieu associatif, qui tient en partie grâce aux retraités. Comment fera-t-on dans le futur si la vie professionnelle s’allonge ? »