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Scopelec placée en redressement judiciaire et à la merci de repreneurs potentiels

Après quasiment une année d'incertitudes, l'avenir de la première Scop de France est désormais plus clair (à très court terme). "Par un jugement du 26 septembre 2022, le tribunal de commerce de Lyon a décidé de placer les sociétés Scopelec SA et Setelen (filiale de Scopelec, ndlr) en redressement judiciaire", a confirmé dans la matinée du 28 septembre Scopelec.

À Scopelec, le début d'une semaine décisive pour ses 2.500 salariés

Spécialisée dans les télécommunications, et notamment l'installation et l'entretien du réseau fibre, l'entreprise tarnaise qui emploie 2.500 personnes était sous la protection de l'instance depuis mars dernier. Mais il faut remonter quelques mois en amont pour comprendre le pourquoi de ce redressement judiciaire.

"Cette procédure intervient à la suite de la décision de non-renouvellement des marchés dans le cadre d'un appel d'offres lancé par Orange en 2021. Depuis le 16 novembre 2021 et l'annonce par Orange de la perte de 65% des contrats dans le cadre de l'appel
d'offres RC Centric, Scopelec n'a eu de cesse de vouloir amener l'ensemble des acteurs (privés et publics) du dossier à trouver une solution afin de garantir la pérennité du groupe et l'emploi de l'ensemble des collaborateurs", ajoute l'entreprise occitane dans sa communication du 28 septembre.

"Scopelec, en Occitanie, n'a pas respecté ses engagements contractuels" (Orange)

Avant ce nouvel appel d'offres, Scopelec représentait 23% de la sous-traitance d'Orange en France, contre 8% à présent. Une dégringolade qui correspond à une perte nette de chiffre d'affaires de 150 millions d'euros pour la Scop, soit 40% de son chiffre d'affaires de 2021.

Orange juge "le niveau de risque trop important"  sur le BP de Scopelec

Malgré cette importante amputation économique, la direction de Scopelec a tenté de trouver des solutions et tout d'abord à un accord à l'amiable avec son premier client, Orange, avec comme médiateur le Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) dépendant du ministère de l'Économie. Plusieurs fois, un accord a été annoncé entre les deux parties sur une "indemnité" de 20 millions d'euros et 40 millions de chiffre d'affaires sur 18 mois en faveur de Scopelec. Mais l'opérateur de télécommunications français a fait parvenir une lettre au tribunal de commerce de Lyon quelques jours avant le rendu du jugement lui annonçant son intention de ne pas accompagner son sous-traitant historique.

"Force est de constater que malgré le soutien de l'État et la mobilisation exemplaire des salariés pendant ces 11 derniers mois, Orange n'a pas souhaité accompagner l'entreprise à hauteur des 20 M€ pourtant promis, lesquels devaient permettre de réorganiser le marché de la sous-traitance, de solder les contentieux en cours et de présenter un plan de sauvegarde crédible pour l'ensemble du groupe Scopelec", pointe du doigt la Scop.

Du côté d'Orange, la direction se défend de toute promesse avancée sans contrepartie.

"Cette décision de justice est la conséquence d'un ensemble de choses et pas seulement de l'évolution des parts de marché avec Orange. L'abandon des créances à hauteur de 20 millions d'euros a toujours été conditionnée à la présentation d'un plan de redressement et d'activité qui doit garantir la qualité de service dans la durée. Aujourd'hui, ces conditions ne sont pas réunies. Le business plan présenté par la direction de Scopelec à Orange présente un niveau de risque trop important", réagit Marc Blanchet, le directeur technique et du système d'information chez Orange.

Si la direction d'Orange reste impassible sur le sort de Scopelec, une partie de ses salariés s'est quant à elle fendue d'un communiqué pour témoigner un certain soutien à leurs confrères.

"Malgré les performances en deçà des attentes contractuelles, nous élus de la CFE-CGC sommes solidaires des salariés de Scopelec car estimons qu'Orange ne fait pas assez preuve de responsabilité sociétale à leur égard. Les élus et les habitants d'Occitanie ne pourront s'empêcher de rapprocher la situation de celle, par exemple, des « métallos » aveyronnais de l'entreprise SAM laissés sur le carreau par Renault leur client historique mais malheureusement unique", ont-ils déclaré par communiqué quelques heures après l'annonce de la décision du tribunal de commerce de Lyon.

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Une position qui ne passe pas du côté de la direction.

"Nous avons des engagements très forts vis-à-vis de nos sous-traitants. Nous estimons avoir travaillé avec beaucoup de respect avec nos partenaires dans le cadre de cet appel d'offres RC Centric, avec notamment un délai de prévenance de deux ans. Mais la qualité de service que nous devons à nos clients nous impose une certaine exigence (...) Aujourd'hui, Scopelec reste un partenaire majeur pour Orange mais a du mal à honorer les contrats actuels car il manque de ressources humaines et de compétences techniques", réagit Marc Blanchet.

Depuis le début du conflit avec Orange, Scopelec a en effet favorisé le départ de plus de 1.000 salariés, chez des concurrents ou en reconversion professionnelle, sans oublier le plan social de plus de 500 personnes annoncé au début de l'été. Ce qui amènerait à 2.000 emplois la première Scop de France à périmètre constant contre 3.600 un an plus tôt et donc une perte inévitable de compétences en interne.

La crainte d'une cession omniprésente

Dans cette situation désormais, trois scénarios se dressent face à la direction de Scopelec et ses équipes. Premièrement, la mise en redressement judiciaire avec le pilotage de la société par un administrateur permet de redresser suffisamment la société. "Mais sur le plan commercial, un placement en redressement judiciaire complique grandement les choses", reconnait la direction auprès de La Tribune.

De plus, les 20 millions d'euros nécessaires pour relancer la société et enclencher sa diversification sont toujours d'actualité. Ce qui privilégie l'hypothèse de la cession d'une partie des actifs de Scopelec voire totale. "Les entreprises candidates au rachat partiel ou total des activités ont jusqu'au 2 novembre pour se manifester auprès du tribunal", précise d'ailleurs la direction dans son communiqué du jour. Ces dernières semaines, c'était le scénario privilégié et craint par les représentants du personnel si aucun accord n'était trouvé avec Orange.

Dernier scénario, la liquidation pure et simple de Scopelec et donc sa disparition avec la destruction de 2.500 emplois. "La direction est à pied d'œuvre afin de trouver une solution qui permette de sauver un maximum d'emplois", promet-elle. Des discussions sont notamment engagées avec le conseil régional d'Occitanie pour faire la passerelle avec d'autres industriels régionaux et ainsi nouer des collaborations commerciales.

Scopelec change sa direction, après son plan social et le conflit avec Orange

Joints à plusieurs reprises par La Tribune, les représentants syndicaux du personnel Scopelec ne souhaitent pas s'exprimer pour le moment.