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Séisme : les opérations de secours entravées

Il y a d’abord eu l’onde de choc, la secousse brutale et inattendue. Les immeubles qui tombent, et le sauve-qui-peut général. Au lendemain des deux séismes – 7,8 et 7,5 sur l’échelle de Richter – qui ont secoué le sud de la Turquie et le nord-ouest de la Syrie, l’angoisse succède à la stupeur. Celle d’un bilan qui ne cesse de grimper. Qui compte déjà, ce mardi soir, plus de 6 250 morts. Ceux tués sur le coup dans les effondrements. Et ceux à venir. Bloqués dans les décombres. Privés d’air et transis de froid. Car la neige a eu la mauvaise idée de tomber dans un moment de malheur. Une angoisse qui dure et qui s’allonge. Qui redouble même à chacune des répliques qui se succèdent – plus de 185 depuis lundi matin. L’angoisse qui s’installe, car les secours tardent, et que l’on progresse difficilement dans les montagnes de débris.

Le bilan devrait «grimper considérablement car des centaines de personnes restent piégées sous les décombres», avertissent les Casques blancs, des volontaires de la protection civile dans les zones rebelles de Syrie. Qui plus est dans une région aussi instable que cette frontière turco-syrienne, affectée de part et d’autre par plus d’une décennie de guerre civile, par les combats et les bombardements côté syrien, par l’arrivée et l’installation de centaines de milliers de réfugiés côté turc. Dans de nombreuses localités détruites par les tremblements de terre, la solidarité internationale affichée dans les heures qui ont suivi le drame se fait encore attendre. Les mauvaises conditions météorologiques, notamment la neige qui recouvre une bonne partie de la zone touchée, compliquent la tâche des secours. Dans les ruines de Kahramanmaras ou de Hatay, où l’on se réchauffe comme on peut autour de braseros dans des abris de fortune, on se demande où est passé l’Etat turc. Dans la province syrienne rebelle d’Idlib, il y a bien longtemps qu’on a cessé de se poser ce genre de questions.

Un acheminement complexe

Les premières équipes de secouristes étrangers, qui peinent à atteindre les zones les plus touchées, sont arrivées ce mardi. L’Union européenne a mobilisé pour la Turquie 1 185 secouristes et 79 chiens de recherche auprès de 19 Etats membres dont la France, l’Allemagne ou la Grèce. Pour la Syrie, l’UE est en contact avec ses partenaires humanitaires sur place et finance des opérations d’aide. La Chine a annoncé, selon un média d’Etat, l’envoi d’une aide de 5,9 millions de dollars, incluant des secouristes spécialisés en milieu urbain, des équipes médicales et du matériel d’urgence. Le président américain, Joe Biden, a promis à la Turquie «toute l’aide nécessaire, quelle qu’elle soit», tandis que deux détachements américains de 79 secouristes chacun se préparaient à se rendre sur place. Même l’Ukraine en guerre a annoncé l’envoi d’un groupe de 87 secouristes en Turquie.

Sauf que le casse-tête de l’acheminement de l’aide humanitaire ne se limite pas à la mauvaise météo. «Les infrastructures endommagées risquent de freiner l’acheminement de l’aide», prévient l’International Rescue Committee (IRC). Qui plus est dans les régions rebelles syriennes, où s’imbriquent et s’opposent de nombreux intérêts géopolitiques entre soutiens et opposants au régime de Bachar al-Assad. Le principal accès via la Turquie, le poste frontalier de Bab al-Hawa, a lui aussi été touché par la catastrophe. «Les multiples séismes et répliques ont endommagé les routes, les passages frontaliers et les infrastructures, ce qui entrave sérieusement les efforts humanitaires, s’alarme la directrice de l’IRC en Syrie, Tanya Evans. Même avant le tremblement de terre, l’accès humanitaire était limité dans le nord-ouest de la Syrie, la plupart de l’aide entrant par un seul point de transit avec la Turquie. En cette période de besoins exacerbés, il est essentiel que les volumes d’aide traversant la frontière augmentent en conséquence.»

«Il est impératif que tout le monde considère cette situation […] pour ce qu’elle est, une crise humanitaire où des vies sont en jeu», a lancé le porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU, Jens Laerke, de Genève, qui appelle à ne pas «politiser» l’aide internationale. L’Organisation mondiale de la santé estime qu’avec ce double séisme, au moins 23 millions de personnes sont «potentiellement exposées, dont environ 5 millions de personnes vulnérables». Chaque heure qui passe voit s’essouffler les espoirs de retrouver des survivants. Les plaintes étouffées se font moins nombreuses. Le silence de plus en plus pesant.