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« Serions-nous devenus aveugles, pour ne plus discerner la beauté dans la recherche et l’invention ? »

Jacques Marceau

président d’Aromates, membre du conseil scientifique de la Fondation Concorde

Olivier Peraldi

cadre dans une fédération profesionnelle, président du club de réflexion Chiffres et citoyenneté

La défiance devant la science et la remise en cause du progrès inquiètent le consultant Jacques Marceau et l’écrivain Olivier Peraldi qui, dans une tribune au « Monde », font un éloge de l’innovation technologique, à condition qu’elle soit esthétique.

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A notre époque sans nuance, la frénésie informationnelle passe d’un questionnement à un autre sans prendre le temps d’y répondre jamais. A la surface de l’agitation médiatique s’étalent sans espoir incertitudes et périls en tous genres : pollution, pandémies, guerres ; mais aussi et au quotidien, déconstruction collective et abandon de soi. Du passé – mais aussi du présent – il ne faudrait retenir que les heures sombres, les laideurs et les horreurs. Il n’en faut pas plus pour la désespérance.

Nulle beauté ne résiste à la tabula rasa des nouveaux contempteurs, tant manque le recul pour espérer en l’avenir. Les statues sont renversées, les œuvres d’art souillées, les sciences accusées, les hommes et les femmes de bonne volonté suspectés. Serions-nous à ce point devenus aveugles, pour ne plus discerner la beauté dans la recherche et l’invention, au-devant des évolutions techniques et technologiques, dans ses promesses de bienfaits en mieux-être, en mieux-vivre ?

Il fut un temps où la certitude que le progrès générerait son propre antidote aux désordres qu’il pouvait engendrer triomphait. Il fallut se rendre à l’évidence. Dans bien des domaines et le temps passant, ce que l’on nommait progrès ne devenait peu à peu qu’une réponse à ses propres méfaits. Le progrès perdit de son sens tant il est vrai que, quel que soit le remède, la beauté s’accommode peu avec les effets secondaires.

Dufy et « La Fée électricité »

La vision positiviste puis progressiste, issue de l’accélération inédite des avancées scientifiques et techniques tout au long du XIXe siècle, prendra bientôt des allures de croyance au XXe siècle.

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La religiosité scientifique s’inventait une beauté portée par des vecteurs bienfaisants pour l’humanité, telle l’énergie des photons qui éclairaient les rues nocturnes et les foyers à toute heure. Elle multipliait la capacité de production des usines. Le peintre Raoul Dufy (1877-1953) en saisit la beauté dans sa fresque La Fée électricité qui, en 1937, place l’ingénieur au même rang que les dieux antiques. Une prémonition picturale qui connaît aujourd’hui sa révélation avec le discours solutionniste des entreprises de la Silicon Valley pour qui la technologie, et elle seule, pourrait régler tous les problèmes de ce monde.

Face à des désillusions à la mesure des espoirs qu’elle engendre, mais aussi aux questions éthiques semblant rester lettres mortes, l’innovation technologique suscite désormais une défiance inédite qui éloigne les étudiants des cursus scientifiques, les investisseurs de certains secteurs industriels et les consommateurs des produits issus du génie scientifique.

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