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Sophie Binet, première femme à la tête de la CGT : pourquoi c'est une petite révolution

Son nom est sorti in extremis... Sophie Binet devient la première femme élue à la tête de la CGT. Il aura fallu 128 ans au plus vieux syndicat de France pour choisir une femme. Elle succède ainsi à Philippe Martinez. Contre toute attente, Sophie Binet emporte le poste originellement promis à Marie Buisson, la dauphine que voulait imposer le sortant.

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A 41 ans à peine, Sophie Binet, secrétaire générale de l'Union des ingénieurs, cadres et techniciens, milite dans les instances nationales de la CGT depuis plus d'une dizaine d'années. Elle connaît bien l'organisation. Très tôt, elle s'est positionnée sur ce credo : la lutte pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Aussi, offre-t-elle une image plus moderne de la CGT, à tous ceux notamment qui qualifiaient la centrale de Montreuil de « dinosaure ».

A l'issue d'un congrès agité, elle a offert une troisième voie

Pendant plus de huit heures, dans la nuit de jeudi à vendredi, les discussions au sein des instances de la CGT, sont allées bon train. Avec de nombreux rebondissements, et des débats houleux. Une première proposition portant Marie Buisson a été rejetée dans la nuit. Sa principale concurrente, Céline Verzeltti ne l'a pas non plus emportée. Les soutiens de Marie Buisson ne voulant pas au petit jour voter pour la concurrente.

Face à cette impasse, les instances se sont alors tournées vers Sophie Binet. Son statut de cadre, l'écartait, à priori, pourtant, de la possibilité de rassembler ce syndicat traditionnellement ouvrier. Néanmoins, Sophie Binet a bénéficié de cette situation de blocage. Cela ne signifie pas pour autant qu'elle fera l'unanimité, les plus radicaux de la CGT risquant de ne pas lui rendre la vie facile.

Pour tenter de rassembler, Sophie Binet a toutefois choisi dans la foulée, de constituer une équipe reflétant les différentes mouvances du syndicat. Elle s'entoure ainsi de Laurent Brun de la SNCF, de Sébastien Menesplier, de la fédération de la Chimie. Elle a également intégré l'ancienne candidate, Céline Verzeletti, de la fédération des services publics.

Lors de son discours, elle a d'ailleurs remercié, Philippe Martinez : « qui a tout fait pour installer une femme , » a salué aussi Marie Buisson « Marie, je sais que tu as vécu des choses dures, tu pourras compter sur le soutien de l'organisation pour ce que tu souhaites ». Elle a aussi eu un mot pour Olivier Matheu, qui avait été candidat. « Je sais que la CGT pourra compter sur toi pour élever la lutte. »

Féminisme, digitalisation et écologie

Sophie Binet sera désormais en première ligne pour représenter la CGT. Cette ancienne conseillère d'éducation et chroniqueuse au journal l'Humanité, ou à Alternatives Economiques a fait ses armes lors du combat contre le CPE, le contrat première embauche.

Proche des organisations féministes, comme Osons le féminisme, elle a souvent représenté la CGT sur les plateaux de télévision, portant par exemple, la proposition d'augmenter les femmes à la même hauteur que les hommes, pour résorber, le déficit des retraites.

La persistance des stéréotypes entretient les inégalités professionnelles femmes-hommes

Avec une parole posée et nuancée, cette quadragénaire s'intéresse aux évolutions du travail, au télétravail, à la digitalisation du capitalisme, ou encore à l'écologie.

Des sujets qui ne font pas toujours l'unanimité en interne, et qui ont souvent été délaissés. Avec Sophie Binet, ils seront portés au premier plan. Elle l'a d'ailleurs bien précisé lors de sa première allocution ce vendredi matin « l'écologie n'est pas secondaire, la CGT saura s'occuper de la fin du mois comme de la fin du monde. » Et de rappeler la nécessité de prendre en compte les rapports du Giec.

L'intersyndicale renforcée

Sophie Binet ne devrait avoir aucun mal à échanger avec Laurent Berger de la CFDT, ainsi qu'avec les autres chefs de file. L'intersyndicale risque donc d'être plutôt renforcée après ce scrutin. Alors que la CGT a souvent hésité sur la ligne à tenir avec ses homologues, Sophie Binet va s'inscrire sur ce point dans la mouvance portée par Philippe Martinez de maintenir des liens. Et de jouer la carte de l'unité syndicale.

Aussi, a-t-elle annoncé son intention de se rendre au rendez-vous proposé par Elisabeth Borne, la première ministre, la semaine prochaine. Et d'ajouter à la tribune : «  Nous ne lâcherons rien, il n'y par pas pas de trêve, pas de médiation, pas de suspension.  »

Pour le gouvernement, Sophie Binet promet d'être une interlocutrice ardue et exigeante, qui connaît bien ses dossiers.

Mais, si l'exécutif misait sur une division de l'intersyndicale, il devra revoir ses plans.

Un baptême du feu sur les retraites

Sophie Binet connaîtra donc  un baptême du feu animé puisque le premier sujet qu'elle devra traiter sera bel et bien la bataille contre la réforme des retraites.

A charge pour elle de trouver le bon positionnement, sans se mettre à dos en interne, les durs de durs de la centrale, qui ont souvent reproché à Philippe Martinez d'être trop conciliant avec le gouvernement dans ce conflit, et d'avoir aussi laissé le leadership à Laurent Berger.

Quant à ses liens avec le politique, Sophie Binet connaît bien les partis de l'extrême gauche. Reste à savoir si elle mettra autant de soins que l'a fait Philippe Martinez pendant ses deux mandats, à garder la distance avec la France Insoumise, et la Nupes.