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Théâtre : Thomas Ostermeier s’égare sur la lande du roi Lear

A la Comédie-Française, le metteur en scène allemand présente, sans convaincre, sa vision de la tragédie de Shakespeare.

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C’est étrange. Vous êtes à la Comédie-Française, vous assistez à une représentation du Roi Lear et vous éprouvez un sentiment que vous pensiez ne jamais éprouver en voyant une mise en scène de Thomas Ostermeier. Vous vous ennuyez. Pas tout le temps, bien sûr, il y a des moments drôles, d’autres émouvants, et de fameuses partitions d’acteurs. Mais les deux heures quarante-cinq du spectacle, jouées sans entracte, vous paraissent longues. Tel Lear seul sur sa lande, vous vous posez une question : me serais-je égaré ?

Générations, transmission et héritage sont les trois piliers du spectacle

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la tragédie de Shakespeare est présentée pour la première fois salle Richelieu. Selon la terminologie de la Maison de Molière, elle entre au répertoire, dans une traduction alerte d’Olivier Cadiot, qui avait déjà signé celle de La Nuit des rois ou Tout ce que vous voulez, mise en scène à la Comédie-Française par Thomas Ostermeier, en 2018. Né en 1968, le directeur de la Schaubühne de Berlin dit rêver de Lear depuis l’adolescence. Il y arrive après un long chemin sur les terres de Shakespeare, dont il a monté cinq pièces, avec des succès fulgurants, comme Hamlet ou Richard III, portés par une star de sa troupe, Lars Eidinger. Pour Le Roi Lear, il retrouve des acteurs de la Comédie-Française qu’il a déjà dirigés dans La Nuit des rois, en premier Denis Podalydès, à qui revient le rôle-titre.

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Thomas Ostermeier est clair sur sa vision de la tragédie de Sakespeare. « Le Roi Lear est souvent présenté comme une pièce sur la mort », écrit-il dans une note d’intention. « Avant la mort viennent la vieillesse et la succession qui m’intéressent davantage et qui cristallisent le propos de cette œuvre extraordinaire. » Soit donc un vieux roi qui décide de laisser le pouvoir et de partager son royaume entre ses trois filles. A une condition : que chacune lui prouve son amour, en le lui déclarant. Goneril (Marina Hands) et Regan (Jennifer Decker), les deux aînées, obtempèrent. Cordelia (Claïna Clavaron), la cadette et fille préférée, refuse de se prêter à un jeu qu’elle juge hypocrite. Lear la déshérite et la renie.

Féministe et sociétal

A la Comédie-Française, cette scène fondatrice se joue sur la lande. Une vaste lande, à l’herbe grise comme les cheveux de Lear, qui s’enfonce dans la nuit. Baignée de brume, elle donne l’impression d’être sans fin (décor de Nina Wetzel). Hors le fauteuil de Lear, il n’y a rien sur cette triste lande reliée au monde par une passerelle qui traverse l’orchestre. La lumière reste souvent allumée dans la salle, et deux trompettistes sonnent le glas de l’espoir qui va s’amenuisant avec le temps. Rejeté par Regan et Goneril, qui avaient promis de l’accueillir avec sa suite, Lear s’enfonce dans sa folle solitude. Mais il ne meurt pas. Thomas Ostermeier récuse la fin écrite par Shakespeare. Sa mise en scène s’achève par l’image du roi, tremblant, qui essaie de recoller sa couronne cassée. Il nous regarde droit dans les yeux. Vous voyez, semble-t-il nous dire, tout cela n’a servi à rien. Ses filles ont beau l’avoir chassé, au motif qu’il était vieux, donc inutile, et qu’il ferait mieux d’accepter sa sénilité capricieuse, il a tenu.

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