France
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Trottinettes électriques : une bataille avant tout politique

Le moment choisi est à questionner. A quelques jours du référendum, qui aura lieu dimanche 2 avril, lancé par la mairie du Paris sur le « pour ou contre l'usage des trottinettes électriques en libre-service ? », le ministre délégué chargé des Transports, Clément Beaune, a annoncé une série de mesures pour la régulation de l'usage de ces engins qui, depuis 2018, déferlent dans les rues des métropoles françaises. Cinq ans plus tard, le nombre d'accidents graves a augmenté de 38% entre 2021 et 2022, selon le ministère. Pour le gouvernement, il serait temps d'agir via un décret qui va paraître « dans les prochaines semaines », a-t-il affirmé, soulignant qu'il souhaitait le mettre en place « avant l'été ».

Faut-il interdire les trottinettes en libre-service à Paris ?

Plus de sanctions pour les usagers

Cela faisait plusieurs semaines que l'on s'y attendait, Clément Beaune a dévoilé ce mercredi son plan d'action national pour la régulation des trottinettes électriques en France. Côté changements : le relèvement de l'âge légal à 14 ans au lieu de 12 ans actuellement, soit « comme pour les scooters », selon le ministre, ou encore la mise en place de clignotants ou de feux stops. Les contraventions pour non-respect des voies pour trottinettes et la circulation à deux sur un même engin passeront de 35 euros à l'heure actuelle à 135 euros.

La vitesse, souvent pointée du doigt par les opposants à cette mobilité, devra se situer en dessous de 25 km/h sous peine d'une amende de 1.500 euros. Le débridage des trottinettes sera quant à lui sanctionné de 135 euros. Il faudra également porter un équipement auto-réfléchissant lorsque la visibilité sera réduite sous peine de payer 35 euros.

En parallèle de ces nouvelles mesures, un observatoire de la micromobilité va être créé et une charte a été signée par les opérateurs. Parmi les engagements pris : côté environnement, l'allongement de la durée de vie des véhicules à plus de 5 ans ainsi qu'un durcissement des mesures de stationnement dans les zones prévues à cet effet.

Trottinettes à Paris : circulez, il n'y a plus rien à voir ?

Des changements qui ne « surprennent pas » les opérateurs. La plupart avait déjà anticipé ces mesures.

Bataille politique avant le référendum

Ces règles sont annoncées avant un référendum inattendu proposé par la maire de Paris, Anne Hidalgo, le 14 janvier dernier. Cette dernière avait déclaré alors : « la trottinette en libre-service, celle qu'on loue, ce n'est pas très écologique. Nous n'arrivons pas à les contenir dans l'espace public, cela pose des problèmes de sécurité routière. Je suis pour l'interdiction de ces flottes en libre-service ». Le ministre des Transports dénonce quant à lui une question « binaire » sur le pour ou contre et estime « qu'on peut faire pour, avec des règles ».

Au niveau européen, ce référendum inquiète. La ville de Paris est vue comme l'un des "laboratoires" des nouvelles mobilités. La député européenne et présidente de la commission transport au Parlement européen, Karima Delli, regrette cette possibilité qu'offre la maire de Paris de les retirer :

« La trottinette est une vraie alternative pour basculer vers la mobilité décarbonée. Elle répond à un usage auquel ne répond pas le vélo. La vraie question concerne la régulation. Ce que reproche la ville de Paris aux trottinettes peut s'appliquer aux vélos. Il y a plus d'accidentologies à vélo qu'en trottinettes, il n'y a pas de réels arguments à cette interdiction. »

Ce référendum est surtout l'occasion pour Anne Hidalgo de reprendre la main sur le devant de la scène politique, avant un nouveau mandat à la mairie de Paris. Ce timing d'annonces de la part de Clément Beaune est également une façon à peine cachée de critiquer la politique de la maire de Paris. Il n'a d'ailleurs jamais caché ses ambitions de se présenter aux prochaines élections municipales en 2026. Le sujet des trottinettes électriques est éminemment clivant depuis leur apparition dans le paysage des mobilités il y a cinq ans et le positionnement en faveur ou en défaveur des politiques permet d'engranger des électeurs.

La trottinette électrique : cinq années de transformation

En outre, peu chères et accessibles, elles séduisent très vite les plus jeunes. Mais leur déploiement attire les critiques. Accidents, trottinettes laissées en vrac au milieu des rues, vitesses excessives...  Aucune régulation n'avait été prévue à leur arrivée. « Il y avait plus de 10 opérateurs, c'était la jungle », confirme David Koral, directeur de l'application sur les mobilités Free now. Depuis, le nombre d'opérateurs a fortement diminué. Aujourd'hui, ils sont trois sur le marché : Dott, Lime et Tier et regroupent près de 15.000 trottinettes, faisant de Paris le plus grand marché européen. D'autres villes françaises ont emboîté le pas à la capitale. En France, plus de 200 villes disposent de trottinettes en libre-service.

Face à l'afflux de critiques et aux multiples accidents, les opérateurs ont du réguler ces mobilités. La vitesse a été diminuée à 20 km/h, des parcs de stationnements de trottinettes ont été mis en place et un contrôle de l'âge a été installé.

Trottinettes électriques : les opérateurs cherchent à séduire avant le référendum sur leur interdiction ou pas à Paris

Si elles peuvent présenter une réelle alternative à la décarbonation avec 19% des usagers qui affirment remplacer leur véhicule motorisé par ce mode de transport (chiffre Lime), elles sont également pointées du doit pour leur empreinte écologique. En effet, les batteries tenaient seulement entre 10 mois et 16 mois à leur arrivée sur le marché. Aujourd'hui, des efforts ont été faits pour les faire durer entre 4 ans à 5 ans. Encore insuffisant pour certains opposants, rappelant au passage que ces batteries proviennent majoritairement de Chine, faute de filière mise en place en Europe.

Les opérateurs multiplient les campagnes de communication pour contrer certaines idées reçues et imposer ce mode de transport dans le paysage des mobilités. Récemment, certains « influenceurs » ont vanté les bienfaits de la trottinette électrique sur les réseaux sociaux sous la mention #sauvetatrott sans mentionner le partenariat rémunéré avec les opérateurs. Une action vivement critiquée, quelques jours avant le vote à Paris.