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Trump appelle à suspendre la Constitution, provoquant gêne et tollé

Donald Trump a appelé samedi 3 décembre, sur son réseau Truth Social, à “abroger la Constitution” et à revenir sur le résultat de l’élection présidentielle de 2020 remportée par Joe Biden, après les révélations sur certaines pratiques de Twitter qui l’ont, estime-t-il, défavorisé. Ses propos ont été condamnés par une partie de la classe politique américaine et ont embarrassé son propre camp, dont la plupart des responsables sont restés silencieux.

Allez-vous jeter le résultat de l’élection présidentielle de 2020 et déclarer le vrai vainqueur, allez-vous faire une nouvelle élection ? Une fraude de ce genre et de cette envergure permet l’abrogation de toutes les règles, réglementations et articles, y compris ceux de la Constitution”, a ainsi déclaré samedi l’ancien président, cité par la chaîne d’information CNN. Il a également accusé les “Big Tech Companies” de faire collusion contre lui, au profit des démocrates.

Trump réagissait à la publication samedi des délibérations internes au sein de Twitter, qui ont abouti en 2020 à “la décision de bloquer sur le réseau les liens vers un article du New York Post qui décrivait des e-mails trouvés sur un ordinateur portable appartenant à Hunter Biden, le fils de Joe Biden”, contextualise le New York Times.

Le rapport, publié sous forme de fil Twitter par le journaliste indépendant Matt Taibbi à partir d’informations divulguées par Elon Musk, reproche aux employés de l’époque – notamment à la responsable juridique Vijaya Gadde, licenciée le jour où la plateforme a changé de propriétaire – d’avoir cédé aux injonctions de l’équipe de campagne de Biden. Ces révélations, appelées “Twitter Files” par leur promoteur, ont été qualifiées de “très décevantes”, et même de “siestival” (ou festival de la sieste) par le magazine culturel Rolling Stones (où Matt Taibbi fut jadis journaliste).

Condamnations habituelles

“La Constitution américaine est un document sacro-saint qui garantit depuis 200 ans que la liberté et l’État de droit prévalent dans notre beau pays”, a commenté samedi un porte-parole de la Maison-Blanche, Andrew Bates, cité par Axios. “Attaquer la Constitution et tout ce qu’elle représente est un anathème pour l’âme de notre pays et il faut le condamner”, a-t-il ajouté. “On ne peut pas n’aimer l’Amérique que lorsqu’on gagne.”

“La semaine dernière, il (Trump) dînait avec des antisémites. Maintenant, il appelle à mettre fin à la démocratie constitutionnelle en Amérique”, a de son côté tweeté Chuck Schumer, le chef des démocrates au Sénat. Il faisait référence à un dîner la semaine dernière à Mar-a-Lago en présence du rappeur Kanye West, désormais apologue de Hitler, et de Nick Fuentes, néonazi et négationniste notoire.

Liz Cheney, une des plus “farouches opposantes de Trump” au sein du parti républicain, a dénoncé sans ambiguïté la déclaration, rapporte le site d’information politique Politico. “Aucune personne honnête ne peut maintenant nier que Trump est un ennemi de la Constitution”, a écrit la représentante, élue pour encore un mois à la Chambre, où elle a été vice-présidente de la Commission d’enquête sur le 6 janvier.

Son collègue Adam Kinzinger, lui aussi républicain dissident et membre de la même Commission d’enquête, lui a emboîté le pas. “Avec l’ancien président qui appelle à rejeter la Constitution, pas un seul conservateur ne peut légitimement le soutenir, et pas un seul de ses partisans ne peut être qualifié de conservateur”, a-t-il affirmé sur Twitter.

Silences gênés

Bien que Trump soit apparu affaibli ces dernières semaines, après une contre-performance de ses poulains aux élections de mi-mandat, peu de républicains osent encore l’attaquer frontalement. La prudence reste de mise.

Questionné par la chaîne conservatrice Fox News, Mike Pence, qui a pourtant pris ses distances avec le milliardaire au point de lui demander des explications après son dîner avec West et Fuentes, s’est abstenu dimanche de condamner ses propos sur la Constitution. “Les candidats qui se sont concentrés sur le passé, particulièrement ceux qui se sont concentrés sur la remise en cause de la dernière élection, n’ont pas eu de bons résultats aux élections de mi-mandat”, s’est-il contenté de rappeler, très sobrement.

De fait, la plupart des élus républicains sont restés “silencieux”, constate le Washington Post. Kevin McCarthy et Mitch McConnell, les deux chefs républicains respectivement à la Chambre et au Sénat, n’ont ainsi “pas répondu pas dimanche aux demandes de commentaires”. Or, rappelle cruellement le quotidien, “le mois dernier, McCarthy (avait) annoncé que les républicains liraient chaque mot de la Constitution à haute voix sur le sol de la Chambre lorsque le Grand Old Party (GOP) prendrait le contrôle de la chambre en janvier”.

Interrogé par le Post, Laurence Tribe, professeur de droit constitutionnel à la Harvard Law School, estime quant à lui que cette déclaration de Trump, qui semble n’être qu’une parmi tant d’autres, “ne doit pas être ignorée”, en particulier après l’attaque sur le Capitole. Car elle revient à dire : “Vous voulez voir une insurrection ? Je vais vous montrer une insurrection. Je vais tout déchirer.”