France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Ukraine : sur le front, les contours de la possible offensive russe du printemps se dessinent

Les mouvements russes de troupes et d’équipement sur le front ukrainien permettent d’entrevoir les desseins militaires de Moscou. Une nouvelle offensive est redoutée dans les semaines à venir.

C'est l'épée de Damoclès qui semble s'agiter en plus au-dessus de la tête des soldats ukrainiens. L'offensive de printemps russe dont tout le monde parle se dessinerait à un horizon de plus en plus proche. 

Quand et où aura-t-elle lieu ? Est-ce que l'Ukraine aura les moyens humains et logistiques d'y faire face ? Un sentiment d'urgence semble s'installer, aussi bien à Kiev que dans les capitales occidentales qui ont promis de soutenir l'effort de guerre ukrainien.

Des paroles aux actes

Les Russes voudraient lancer l'assaut aux alentours du 24 février, soit un an jour pour jour après le déclenchement de la guerre, a assuré le président ukrainien Volodymyr Zelensky lors de son allocution télévisée du 5 février. 

Plusieurs centaines de milliers de soldats russes supplémentaires "achèvent leurs entraînements à la frontière avec l'Ukraine", avait affirmé Oleksii Reznikov, le ministre ukrainien de la Défense, interrogé par BFM le 3 février.

Les Ukrainiens ne sont pas les seuls à agiter le chiffon rouge d'une grande offensive en préparation à Moscou. Julianne Smith, l'ambassadrice américaine auprès de l'Otan, l'a également évoquée début février pour insister sur "l'urgence" de faire parvenir des chars à l'Ukraine au plus vite pour contenir l'assaut russe.

Même le président russe Vladimir Poutine y a fait allusion, sans pour autant parler ouvertement de grande offensive. Il "a averti l'état-major de l'armée qu'il voulait que les territoires perdus par la Russie dans la région de Donetsk [à l'issue de la contre-offensive ukrainienne, NDLR] soit repris avant mars", souligne Sim Tack, un analyste militaire pour Forces Analysis, une société de surveillance des conflits.

Mais les paroles n'ont jamais suffi à mener une offensive. Sur le terrain, il est actuellement "très difficile de savoir ce que la Russie prépare, même si nous disposons de signes montrant que Moscou est effectivement en train de renforcer ses positions", note Sim Tack, qui a accès à des images satellites des zones de combats.

Nouvelles troupes et nouveaux chars russes

Il y a ainsi effectivement des "nouvelles troupes qui sont redéployées à plusieurs endroits de la ligne de front", a constaté cet expert. Ce sont essentiellement des soldats qui effectuaient leur entraînement en Biélorussie après avoir été appelés à la guerre lors de la mobilisation partielle de septembre 2022.

Selon Sim Tack, les chiffres avancés par certains responsables ukrainiens - près de 500 000 soldats supplémentaires - semblent "quelque peu surestimés". L'expert suppose "une certaine exagération pour maintenir la pression sur les pays occidentaux et leur faire comprendre qu'il y a urgence à honorer leur promesse d'envoyer les équipements militaires promis".

Par ailleurs, Moscou ne semble pas masser de nouvelles unités autour d'une ville ou d'un objectif de guerre en particulier.  Les mouvements de troupes constatés n'accréditent pas l'imminence d'une offensive dans la région de Zaporijjia, hypothèse suggérée par certains analystes

Mais la Russie ne se contente pas d'envoyer des hommes supplémentaires. De l'artillerie et, surtout, de nouveaux chars se dirigent aussi vers de front. "Il s'agit essentiellement de T-90, c'est-à-dire des blindés plutôt modernes, qui sont déployés dans la plupart des secteurs où des combats ont lieu", précise Sim Tack. 

Avant l'arrivée des renforts occidentaux

Moscou semble cependant envoyer davantage d'artillerie et de chars vers la ligne de front allant du nord à Koupiansk (au sud de Kharkiv) au sud à Vouhledar (au sud de Donetsk). Une zone où se trouve aussi Bakhmout, une ville qui fait l'objet d'intenses combats et où l'armée russe semble gagner lentement mais sûrement du terrain. 

Des chars T-90 ont aussi été envoyés vers la région de Louhansk, "là où se trouvent des parachutistes russes [unités d'élite, NDLR]", souligne Sim Tack. 

Ces préparatifs russes suggèrent que la très attendue offensive de printemps serait essentiellement "une intensification des efforts là où Moscou essaie déjà de faire céder les forces ukrainiennes", estime Sim Tack. 

Autrement dit, Moscou n'envisagerait pas d'ouvrir un nouveau front. Accentuer la pression sur l'actuelle ligne de front correspond aussi à l'objectif fixé par le Kremlin de contrôler la région de Donetsk au printemps. "La prise de Bakhmout ouvrirait la voie par le sud aux Russes vers les principales zones de la région de Donetsk qui leur échappent encore, à savoir celles autour des villes de Kramatorsk et Sloviansk. Ces  centres urbains seraient aussi accessibles par le nord si l'armée russe parvenait à faire une percée à Koupiansk", résume Sim Tack.

Moscou se doit aussi lancer cette probable offensive au plus vite… et si possible avant l'arrivée des chars d'assaut occidentaux et des nouvelles munitions promises par les États-Unis et les autres membres de l'Otan. 

La date du premier "anniversaire" du début de la guerre semble correspondre à cet impératif de rapidité. Car la plupart des blindés et des nouveaux armements promis aux Ukrainiens ne devraient pas encore être disponibles pour les troupes aux fronts

"Cette offensive de printemps sera probablement déterminante pour la suite du conflit", estime Sim Tack. Les Ukrainiens vont tout faire pour que la ligne de front ne bouge pas jusqu'à l'arrivée du nouveau matériel occidental. Ils pourront alors lancer leur contre-offensive face à des troupes russes qui auront du mal à concilier deux impératifs contradictoires : gagner du terrain pour satisfaire les objectifs du Kremlin, tout en défendant leurs positions face à des Ukrainiens "dopés" au matériel perfectionné occidental.

En revanche, si les Russes réussissent à contrôler tout le district du Donetsk, "ils pourront se concentrer uniquement sur les tâches défensives" ce qui les rendrait plus efficaces, conclut Sim Tack.