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Un plan trop sobre face à l’ivresse du défi [Le point de vue de CL]

Un plan trop sobre face à l’ivresse du défi [Le point de vue de CL]

Photo AFP

Par Maurice BONTINCK - m.bontinck@charentelibre.fr, publié le 6 octobre 2022 à 21h35, modifié à21h35.

Retrouvez notre éditorial du vendredi 7 octobre.

C’est la mesure phare des 50 pages du plan gouvernemental de sobriété énergétique. Parce qu’elle est simple à imprimer et se résume à un chiffre : 19 °C. Parce qu’elle représenterait de loin la plus grande économie d’énergie. Mais aussi parce que cette incitation à baisser le chauffage à cette moyenne démontre tant la philosophie que les...

C’est la mesure phare des 50 pages du plan gouvernemental de sobriété énergétique. Parce qu’elle est simple à imprimer et se résume à un chiffre : 19 °C. Parce qu’elle représenterait de loin la plus grande économie d’énergie. Mais aussi parce que cette incitation à baisser le chauffage à cette moyenne démontre tant la philosophie que les limites d’un plan qui refuse de mettre en place des contraintes collectives et s’appuie sur le bon vouloir de chacun, du particulier aux entreprises.

L’objectif affiché est de « passer l’hiver » avec 10 % d’énergie consommée en moins. Rappelons qu’en 2020, année de confinement et d’hiver doux, la France à l’arrêt a connu une baisse historique de sa consommation d’électricité de… 3,5 %. On ose à peine évoquer la baisse annoncée de 40 % de notre consommation énergétique d’ici 2050. À moins de multiplier les confinements et les guerres de l’énergie provoquées par Poutine, la sobriété espérée ne pourra pas se contenter des mesurettes dérivées de cette incitation à baisser son chauffage à 19 °C.

Mais ce chiffre en dit long sur le chemin à parcourir et la lenteur de la prise de conscience. D’abord parce que cette limite moyenne de 19 °C est à la sobriété ce que la règle européenne des 3 % de déficit est aux comptes publics. C’est un choix au doigt mouillé. Ensuite, ce chiffre contraignant existe dans les textes réglementaires depuis… 1978, date à laquelle il a été inscrit dans le Code de l’énergie suite aux chocs pétroliers ! Théoriquement, ceux qui ne le respectent pas peuvent même écoper d’une amende de 1.500 euros.

Près d’un demi-siècle plus tard, ce retour vers le futur résume à quel point aucune leçon n’a été apprise. S’il y a autant d’économies d’énergie à faire en baissant le chauffage, c’est aussi parce que décennie après décennie, il n’y a pas eu de politique réellement volontariste pour rénover et isoler les bâtiments. C’est aussi ce que raconte ce plan à 19 °C : le prix à payer de la réparation climatique ou énergétique coûtera toujours plus cher au final que les investissements massifs à faire en amont.

L’énergie la moins chère étant celle que l’on n’utilise pas, on peut construire toutes les centrales nucléaires possibles, les éoliennes inimaginables ou les plans de sobriété d’urgence basés sur un civisme fantasmé, cela ne sert qu’à adapter le système et nos comportements et non à le transformer du sol chauffé au plafond isolé. Pour y arriver un jour, il faudra bien plus qu’un plan d’astuces de 50 pages qui reprend des recommandations des années 70.