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Viager à prix cassé à Montpellier : abusée par un agent immobilier, elle meurt le jour de l'annulation de la vente

Le tribunal judiciaire a récemment annulé la vente du logement d'une dame sans descendance, fragile psychologiquement et qui avait accepté des conditions dérisoires. 

La cession en viager d'un bien immobilier a des avantages mais il peut aussi parfois virer à l'arnaque. Une retraitée héraultaise, en situation de faiblesse, l'a apprise à ses dépens après avoir été abusée. Mais le combat judiciaire mené par son avocate vient de lui donner raison... Au moment même où son décès ajoute pourtant une couche de tristesse supplémentaire à cette affaire.

Fait rarissime, le tribunal judiciaire de Montpellier vient ainsi de prononcer la nullité d'une vente immobilière liée à un viager. L'histoire démarre en 2016, lorsque cette dame de 75 ans, sans famille ni descendant, entre dans une agence immobilière du cœur de Montpellier. Pour un viager dit occupé. 

Tout savoir sur le viager

Il existe deux formes de vente en viager. Soit le viager occupé où le vendeur cède son bien à l'acquéreur mais conserve son droit d'usage et d'habitation, soit le viager libre où le vendeur cède son bien à l'acquéreur qui peut l'occuper dés la signature, sans attendre le décès. Par ailleurs, UniversViager,dans sondernier Baromètre national 2022, surle marché du viager en France, a déterminé le prix moyen observé d’un bien en viager : 308 000 €. Selon SeLoger, le montant mensuel moyen de la rente est de 715 €.

Le logement passe de 128 000 € à 67 000 €

Elle en ressort avec des conditions très surprenantes : son bien, un appartement de 56 m2 non loin du centre, est estimé à 67 000 €, le bouquet (prime à la cession) promis à 25 000 € et la rente mensuelle  fixée à seulement 200 €.

"Cinq ans avant, en 2011, une autre agence avait estimé le bien à 128 000 € avec un bouquet de 30 000 € et 1020 € de rente... Le prix de l'immobilier ne s'est pas effondré entre-temps, ce qu'on lui a proposé est dérisoire" grince Me Alexandra Soulier, l'avocate de la victime. Elle assure que sa cliente affichait déjà des fragilités et en 2019 elle est placée en sauvegarde de justice, soit en curatelle renforcée. C'est d'ailleurs la curatrice qui, en mettant son nez dans les papiers de la septuagénaire, découvre cette étrangeté : l'agent immobilier a cédé le bien à une SCI dont le gérant n'était autre que son neveu... 

Le gérant de l'agence immobilière cède le bien à la SCI de son neveu

"Elle n'avait pas ses capacités de discernement et l'agent immobilier aurait dû dire que l'acquéreur était son neveu, il y a conflit d'intérêts, le consentement est vicié à cause de ce lien de parenté, ils ont profité de quelqu'un de faible" dénonce Me Alexandra Soulier. Qui tacle aussi le notaire qui a validé l'acte sans informer la retraitée de la parenté.

La chambre civile du tribunal judiciaire a donné raison à la plaignante dans son jugement rendu cet automne sur la seule question de la parenté. "L'identité du gérant" de l'agence immobilière n'apparaît pas dans l'acte authentique, ni sur le mandat de vente ... "Aucune pièce ne démontre qu'elle savait" les liens entre l'oncle et son neveu écrit encore le tribunal.

Elle meurt le jour du jugement

La SCI, qui pour sa défense a estimé que cette information de parenté n'était pas "déterminante pour son consentement à l'acte de vente" n'a pas convaincu. Tout comme le notaire avançant sa bonne foi : il a dit ne pas avoir douté de ses facultés mentales et affirmé que la vente au bénéfice d'un membre de la famille d'un mandataire est interdite. Le tribunal lui a pourtant rappelé "son devoir d'information et de conseil" auprès de cette dame.

"L'idée, c'était qu'elle puisse récupérer et vendre son bien et payer l'Ehpad où elle devait aller" rappelle Me Soulier. La vieille dame n'en a pas eu le temps : elle est morte le jour où le jugement a été rendu.  Aujourd'hui, son avocate entend faire exécuter le jugement, que le bien aille à l'Etat, "en son honneur et en sa mémoire".