France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Vivre sur un bateau : une alternative qui a le vent en poupe

Sous l’effet des bourrasques, les amarres se tendent. Le grain qui frappe le pont résonne dans le carré de Major Tom. Amarré au ponton du bassin à flot de Lorient, le grand voilier de Grégoire et Brunehilde Durousseau est ballotté par la météo d’automne. « Depuis trois semaines, on subit le passage des dépressions… C’est un peu bruyant », confirme le couple dont le carré se transforme en bureau quand les enfants sont à l’école.

La famille lorientaise s’est installée, depuis septembre, à bord de son confortable RM 12.60, faute de trouver un logement à terre le temps des six mois de travaux dans sa nouvelle maison. Une manière de se rappeler son périple, il y a cinq ans, de plusieurs mois, dans l’Atlantique nord.

Avec une cinquantaine de résidents répartis dans les ports de la rade de Lorient, ils sont de plus en plus nombreux à loger sur la mer, faute de place à terre. Une contrainte qui n’en est pas forcément une. En formation par alternance dans une entreprise de La Base, spécialisée dans la course au large, et étudiant à Saint-Brieuc, Vincent Rossé a, lui aussi, « toujours été attiré par la mer. »

Un choix de vie

Habiter son bateau n’a pourtant rien de nouveau. Et si la forte tension sur le marché de l’immobilier conduit quelques plaisanciers à se replier dans quelques mètres carrés à flot, « il ne s’agit pas d’un développement à marche forcée », estime Brieuc Morin. Pour le directeur de la Sellor, gestionnaires de six ports de la rade, habiter sur son bateau, notamment l’hiver, « relève plus d’un choix de vie ».

Sur son Challenger Scout rouge, un petit voilier de 7,20 mètres, Vincent Rossé y voit d’ailleurs, à 20 ans, un formidable logement étudiant pour 150 euros par mois. « Le mien est tout petit mais c’est juste une histoire d’organisation », confie-t-il.

Réunis au ponton "visiteurs" du port de Lorient, cinq bateaux y passent l'hiver dans une ambiance "Colloc".
Réunis au ponton « visiteurs » du port de Lorient, cinq bateaux y passent l’hiver dans une ambiance « Coloc ». (Photo Jean Le Borgne/Le Télégramme)

Du travail à terre

Lors de ses semaines à Lorient, l’étudiant briochin a trouvé une véritable communauté au ponton visiteur. En dehors de John et Alexia, un couple de Belges dont l’escale se prolonge en raison de la météo, tous ont fait le choix d’habiter au port et de travailler à terre, souvent avec de petits budgets. À l’heure du café, « la coloc », comme ils l’appellent, se retrouve sur le pont de Rayon vert, le Biloup 770 d’Allan et Coline.

« Ce n’est pas facile de dire au revoir au confort mais c’est un choix », raconte la jeune femme qui a adhéré au projet de son compagnon. En formation de préparateur de bateaux de course, il voulait retrouver les bons moments de ses années d’enfance, sur le voilier familial. Parmi leurs nouveaux amis, Raphaël et Sophie préparent, quant à eux, une transat pour voyager en limitant leur impact sur l’environnement.

Les ports s’organisent

Face à ces nouveaux habitants, les ports s’organisent, réglementant, pour certains, la vie à bord sur les terre-pleins, pour raison de sécurité. Après avoir rénové ses sanitaires, Lorient réfléchit à un lieu de vie à terre pour ces plaisanciers. « Un espace convivial pour qu’ils puissent se rencontrer », souligne Brieuc Morin.

Mais les plaisanciers ne sont plus les seuls habitants des ports de plaisance. Partout en Bretagne, des nuits à bord sont proposées par des propriétaires via des plateformes de location de courte durée.

Mardi 9 juin 2020, Sealoft dans le port de plaisance de Guidel Plage à l'embouchure de la Laïta face au Pouldu Finistère.
Construit à Lorient, le SeaLoft est un véritable appartement avec vue sur mer à 360 degrés. (Photo ©Yvan Zedda)

Le tourisme aussi

La Sellor a, de son côté, fait le choix d’accueillir des bateaux d’un autre genre. Construits à Lorient, deux SeaLoft sont amarrés aux pontons des ports de Kernével, à Larmor-Plage, et de Guidel, à l’embouchure de la Laïta, depuis près de trois ans. Homologués pour le moment comme des navires de plaisance, ces bateaux de près de 45 m² sont, en fait, des logements dont le flotteur est surmonté d’une construction en ossature bois. Des appartements à 200 000 euros qui font le bonheur des touristes. Le nombre de nuitées, plus de 200 par an pour chacun des SeaLoft, témoigne de l’intérêt de la démarche qui associe, notamment, la Sellor et SeaLoft.

Un succès synonyme de nouvelles perspectives pour les ports et de marché potentiel pour le chantier lorientais. Son dirigeant, Éric Sechaud, se veut confiant, malgré la difficulté pour les clients potentiels de trouver une place dans les ports du Sud-Bretagne, les plus convoités. Alors l’entreprise lorgne les ports de la Manche. En attendant, elle s’apprête à signer pour trois unités « en fluvial, dans l’agglomération de Lorient », décidément très dynamique sur la question de l’habitat flottant.