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En Inde, les hindouistes réclament la restitution de certains bâtiments musulmans

En Inde, les hindouistes sont lancés dans un effort coordonné visant à prendre le contrôle de plusieurs mosquées et bâtiments musulmans, sous prétexte que ces derniers auraient été construits sur des structures religieuses hindoues, il y a plusieurs siècles. Ils ont ainsi saisi les tribunaux, qui ont commencé à instruire ces affaires.

Avec notre correspondant à New Delhi,

La principale affaire concerne une mosquée de la ville de Bénarès. Dans cette ville sacrée, les hindouistes affirment depuis des années que la mosquée de Gyanvapi, construite au XVIIe siècle par l’empereur moghol Aurangzeb, aurait été bâtie sur un temple hindou shivaïte. Ils réclament donc que ce terrain leur soit rendu pour corriger le passé et rétablir le culte hindou.

Une telle « réparation », quatre siècles après les faits, semble obsolète et légalement prescrite. Surtout, une loi interdit de changer la nature d’un bâtiment religieux, en se basant sur des faits d’avant 1947. Mais un tribunal vient d’accepter la plainte, et a envoyé un avocat filmer différentes parties de la mosquée. Immédiatement, des informations ont fuité, selon lesquelles l’équipe aurait aperçu un symbole shivaïte dans le bain d’ablutions de la mosquée. Sans aucune autre preuve archéologique, une partie de la mosquée a tout de suite été scellée, et l’instruction suit son cours. 

À écouter: Inde: comment le gouvernement de Narendra Modi stigmatise de plus en plus les musulmans  

Le célèbre Taj Mahal dans le viseur des hindouistes

Cette affaire est loin d’être isolée puisque dans la ville de Mathura, pas loin de là, une autre mosquée moghole est menacée, car une cour vient d’accepter d’entendre la demande de restitution d’un terrain par des hindous. À New Delhi, les hindouistes réclament le fameux minaret du Qutub Minar, l’un des symboles de la ville du XIIe siècle, classé au patrimoine mondial de l’humanité, après que des idoles non datées du dieu Ganesh ont été trouvées sur le site.

Enfin, ce révisionnisme touche le joyau architectural de l’Inde: le Taj Mahal, construit aussi par les Moghols. Un membre du parti nationaliste hindou du BJP au pouvoir a réclamé une enquête pour prouver la thèse farfelue selon laquelle le Taj Mahal, qui comprend une mosquée, était en fait un temple hindou du nom de Tejo Mahalaya. Cette demande a toutefois été rejetée par les juges.

Touristes au Taj Mahal, septembre 2020.
Touristes au Taj Mahal, septembre 2020. AFP
  

Alimenter la peur des hindous envers les musulmans

Le but de ces procédures contre les bâtiments musulmans est de présenter les hindous comme des victimes perpétuelles des musulmans. Le Premier ministre attaque régulièrement dans ses discours l’empereur Aurangzeb, mort il y a trois siècles, comme s’il était un opposant politique actuel. Il s’attaque en fait ainsi aux musulmans d’aujourd’hui, présentés comme les descendants des Moghols, et qui doivent donc être vus comme les oppresseurs des hindous. Ce combat historique est donc un projet politique qui vise à alimenter la peur des hindous envers les musulmans, afin de capter leurs votes.

La dernière affaire similaire, dans la ville d’Ayodhya, a fini par la destruction illégale de la mosquée par les militants hindouistes, en 1992, entraînant les pires violences religieuses de la décennie et la mort de plus de 2000 personnes. En soufflant ainsi sur les flammes de la division religieuse, les nationalistes hindous courent le risque de voir se répéter ce scénario funèbre. 

À écouter: Aminah Mohammad-Arif (1/2): «On assiste en Inde à une banalisation des violences antimusulmanes» (et volet 2)