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Changement de régime pour les donations à Bruxelles : "Ce n’est pas juste. On a déjà une fiscalité très lourde sur le patrimoine"

Dans son budget pour 2024, le gouvernement bruxellois vise un objectif : réduire le déficit régional de 150 millions d’euros par rapport à l’exercice 2023. Présenté la semaine dernière, le plan contient une mesure qui s’attaque au régime fiscal des donations.

Le dispositif vise seulement deux types de donations mobilières – les manuelles (une somme d’argent en cash, par exemple) et les indirectes (un virement bancaire sans communication) – car celles-ci ne sont pas soumises à l’obligation d’enregistrement, ce qui permet aux donataires d’éviter de payer les droits de donation, dont le taux s’élève à 3 %. Les autres dons, notamment immobiliers, font déjà l’objet d’un enregistrement et donc, d’une taxation ou d’une prise en compte par un notaire.

Concrètement, en matière de donation mobilière, le régime fiscal bruxellois actuel impose une période de minimum trois ans entre le décès du donateur et son don pour que ce dernier soit exonéré tant de droits de donation que de droits de succession. En deçà de ce délai, le don est soumis à des droits de succession qui, eux, sont beaucoup plus élevés (taux de 30 % à partir de 500 000 euros). Le gouvernement Vervoort entend faire passer cette période dite "suspecte" de trois à cinq ans pour pouvoir bénéficier de cette taxation avantageuse – comme en Wallonie depuis 2022.

Le but : "pousser les gens à enregistrer et contribuer à davantage de recettes fiscales", explique Julien Limet, avocat spécialisé en droit fiscal au sein du cabinet Tetralaw. "Un don mobilier non enregistré est un patrimoine qui, s’il n’est pas rattrapé au niveau successoral, finit par n’être taxé à aucun moment de la chaîne de transmission, ce qui préjudicie les Régions en ce qui concerne leurs recettes fiscales. Porter de trois à cinq ans la période suspecte permet de mettre plus de pression sur les donateurs et les donataires. C’est une mesure qui vise clairement à davantage taxer le patrimoine."

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Concurrence entre les Régions

Pourquoi ne pas rendre toutes les donations obligatoirement enregistrables dans ce cas ? "Permettre une transmission plus favorable se justifie dans la mesure où les droits de succession sont quand même très élevés en Belgique. Le taux de 30 % à partir de 500 000 euros a été fixé en 1919 et ce montant n’a jamais été indexé depuis. Ne pas soumettre l’ensemble des donations à la fiscalisation est une compensation du système. Cela favorise le saut de génération du patrimoine."

guillement

C’est une mesure qui vise clairement à davantage taxer le patrimoine.

La Flandre, elle, applique encore une période suspecte de trois ans. "À ma connaissance, ce n’est pas quelque chose qu’il est prévu de changer en Région flamande, qui est quand même assez favorable en matière d’impôts de donation et de succession par rapport à la Wallonie et à Bruxelles-Capitale. Toutes les Régions se font une concurrence fiscale depuis la régionalisation de ces droits fiscaux, chacune fait sa popote interne selon ses besoins."

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5 millions de recettes fiscales

En cas d’approbation de la réforme, Julien Limet estime qu’on peut s’attendre à une augmentation des donations mobilières non enregistrées d’ici son application. "Si la nouvelle mesure devait entrer en vigueur à partir du 1er janvier 2024, et ne pas être rétroactive à l’égard des donations antérieures tel que cela était le cas en Wallonie, toutes les donations qui auront été faites avant seront toujours soumises au délai de trois ans. Il vaut donc mieux faire une donation le 31 décembre 2023 plutôt que le 1er janvier 2024."

guillement

On a déjà une fiscalité qui est très lourde sur le patrimoine. Ce n’est pas une mesure qui va dans le sens de la justice fiscale.

L’avocat trouve cette nouvelle mesure malheureuse. "On a déjà une fiscalité qui est très lourde sur le patrimoine, la Belgique est l’un des pays où les taux en matière de succession sont assez prohibitifs, alors qu’on est déjà fortement imposé sur nos revenus. Ce n’est d’ailleurs pas une mesure qui va dans le sens de la justice fiscale car elle va toucher tout le monde, tant la personne qui va donner 100 000 euros que celle qui va en donner 100. Pour moi, c’est une règle purement budgétaire qui vise à combler des trous et à venir chercher de l’argent là où on peut en trouver." La mesure devrait apporter 5 millions d’euros de recettes fiscales à la Région.

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