On ne le sait peut-être pas assez mais la Belgique possède un nombre indéfinissable de biens protégés. Ceux-ci présentent une série de caractéristiques, forcément historiques, qui les font entrer dans un catalogue à part portant la mention de « patrimoine ».
Le problème est de les restaurer. Pour aider tous les propriétaires de biens patrimoniaux, qu’ils soient privés (les particuliers qui possèdent par exemple une maison Horta) ou publics (la Belgique compte un nombre impressionnant de maisons communales qui sont classées), un nouveau groupe professionnel a vu le jour au sein de la Confédération Construction : le groupement des Professionnels de la restauration de patrimoine. « Il comporte pour l’instant une vingtaine de membres fondateurs. A terme, ce chiffre devrait monter à 50. Il concerne les entreprises générales engagées dans la restauration du patrimoine, mais le groupement veut également mettre en avant et soutenir les artisans au nombre de 600 à 700 en Belgique », explique Patrice Dresse, le directeur général du groupement.
Restaurer des mosaïques anciennes, remettre à neuf une charpente datant du XIIIe siècle, colmater un toit fait d’ardoises à tailler dans les règles de l’art, remplacer des vitraux ou encore effectuer un travail de maçonnerie telle qu’elle était pratiquée il y a plusieurs siècles n’est pas à la portée de tout le monde. « Pour cela, il faut des spécialistes mais ils sont de plus en plus rares », confesse Patrice Dresse.
A cette pénurie de main-d’œuvre spécialisée s’ajoute un autre problème : la difficulté qu’il y a à restaurer certains biens dans leur jus. « Aujourd’hui, il faut tenir compte des performances énergétiques d’un bâtiment, de la notion de “bien-être” de ses occupants, du respect des normes incendie, j’en passe et des meilleures », expose notre interlocuteur. « Or, restaurer dans son jus va souvent à l’encontre de ces éléments. Cela n’a plus de sens d’opérer comme on le faisait il y a 20 ou 30 ans. Beaucoup trop de biens ont été classés et sont devenus des musées. Sauf qu’il manque les visiteurs… »
Une définition élargie
C’est d’autant plus un problème qu’aujourd’hui la définition du « patrimoine » est en train de s’élargir. On en veut pour preuve le très grand nombre d’ouvrages particuliers qui sont protégés. Un exemple parmi d’autres : les sites industriels.
Autre (gros) souci : le coût de ces restaurations si particulières. « C’est souvent impayable ! », n’hésite pas à clamer Patrice Dresse. « Ce n’est pas pour rien si les travaux sont souvent largement subsidiés par les pouvoirs publics. Peut-être est-il plus judicieux de donner une autre destination à un bien classé. C’est déjà le cas avec des hôtels qui ont été aménagés dans d’anciennes églises, d’autres biens pourraient accueillir du logement, des espaces collectifs, un restaurant… Le tout est de savoir jusqu’où on peut aller. Le débat est aujourd’hui présent dans tout projet. »
Le nouveau groupement instauré au sein de la Confédération Construction veut donc mettre en avant le savoir-faire des métiers liés à la conservation du patrimoine, mais il entend aussi être, comme l’explique Julie Bajart, la coprésidente du groupement pour la Wallonie, « un partenaire proactif en vue d’instaurer un dialogue constructif avec l’ensemble des parties prenantes du secteur de la restauration ».
En Belgique, les acteurs impliqués dans le domaine ne manquent pas. Citons-en quelques-uns : la Commission royale des monuments et sites à Bruxelles, l’Agence wallonne du patrimoine (Awap) ou l’Union des artisans du patrimoine (UAP) en Wallonie, l’Agentschap Onroerend Erfgoed et l’association de promotion du patrimoine Herita en Flandre…
Si restaurer du patrimoine n’est pas un long fleuve tranquille, Patrice Dresse tient toutefois à préciser que la Belgique ne part pas de zéro, loin de là. « Le Centre des métiers de la Paix-Dieu est un véritable bijou de la Wallonie », explique-t-il. « Un exemple à suivre. »
Installé au cœur même d’une abbaye cistercienne à Amay, en province de Liège, le Centre a pour vocation de préserver et de transmettre le savoir-faire dans le domaine du patrimoine architectural et du bâti ancien. Un point de départ idéal pour attirer les jeunes vers ces métiers particuliers mais passionnants ; un autre défi majeur.
La chronique
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