Burundi
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Affaire Ruyumpu : Instruction dans un sens

On croyait avoir tourné la page. Du moins, les politiques de haine et d’intolérance politique s’observaient pendant la période pré et post-électorale. Ce n’est pas le cas sur la colline Ruyumpu, en commune de Kiremba de la province de Ngozi. Des militants dominés par les jeunes des partis Cndd-Fdd et Cnl se rentrent dedans.

Par Léandre Sikuyavuga

Les journalistes d’investigation du journal Iwacu présents sur le lieu des heurts parlent des blessés graves des deux côtés. Dans la foulée, les membres du Cnl sont arrêtés, condamnés. Absents dans la séance, seize militants de ce parti sont condamnés par le Tribunal de Grande Instance de Ngozi à quinze ans de servitude pénale, une amende de cent mille francs chacun et un dédommagement collectif de seize mil- lions de francs burundais. Chef d’accusation : « tentative d’assassinat des jeunes militants du Cndd-Fdd. » Ce cas de Ruyumpu interpelle sur la procédure judiciaire et l’intolérance politique.

En effet, il y a lieu de s’interroger sur la manière dont l’instruction du dossier a été faite. Puisqu’il y a eu affrontements entre deux groupes, est-ce que le magistrat instructeur s’est porté sur terrain pour entendre les témoins ? Normalement, le ministère public est appelé à instruire à charge et à décharge, pourquoi il n’y a pas eu de confrontation des allégations des « agresseurs » et des « agressés » ? Dans mon entendement, l’instruction a été faite dans un seul sens.

La mission d’un juge est d’appliquer la loi, de « dire le droit ». Dans le cadre d’un litige, il doit accomplir sa fonction de manière impartiale, sans pression d’aucune sorte. A maintes reprises, le Chef de l’Etat a demandé aux juges et aux tribunaux de faire du droit à un procès équitable leur cheval de bataille qu’ils doivent pro- mouvoir ou défendre en toutes circonstances. Cependant, le traitement du dossier de Ruyumpu semble à l’antipode de ce désidérata. J’ose espérer que le juge d’appel pourra lire et dire le droit.

L’autre question qui me taraude : Qui peut justifier ces violences entre les jeunes d’une même colline à ce moment ? Que des individus aient des convictions poli- tiques différentes, cela est normal. Nous sommes dans une démocratie, une voix dissonante doit être tolérée. Nos politiques doivent le comprendre ainsi.

Plutôt que de les dresser les uns contre les autres pour assouvir leurs intérêts égoïstes, ils devraient plutôt appeler ces jeunes à s’atteler aux travaux de développement. Ces jeunes ont des défis communs. Ils ont besoin de l’emploi, de la formation professionnelle, de l’entrepreneuriat. C’est ce qu’ils devraient réclamer des politiques. Aussi sont-ils appelés à se demander pourquoi leurs maîtres à penser se respectent.

En politique, il n’y a pas d’amis ou d’ennemis éternels, il n’y a que des intérêts. L’exemple kényan peut nous inspirer. Le président en exercice, Uhuru Kenyatta, a déclaré qu’il mènerait campagne pour son adversaire historique et leader de l’opposition, Raila Odinga, pour l’élection présidentielle prévue le 9 août.

Pour lui, le chef de l’opposition a à cœur les intérêts du pays. « Les nations ne progressent pas à cause d’un changement de garde d’un président à un autre ou d’un changement de pouvoir d’un parti à un autre. Il faut un leadership, une foi dans le pays, une vision ». Pourtant, des gens, surtout les jeunes, s’étaient entretués lors des dernières élections de novembre 2017. Un cas d’école…