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Face-à-face: L’IN 185 après l’IN 179, les initiatives fiscales divisent

Face-à-faceL’IN 185 après l’IN 179, les initiatives fiscales divisent

 

Nathalie Fontanet , Stéfanie Prezioso

Publié aujourd’hui à 11h22

HERRMANN

L’initiative cantonale 185 «pour une contribution temporaire de solidarité sur les grandes fortunes» sera soumise au vote le 18 juin. Cette initiative vise à augmenter l’imposition des plus gros contribuables pendant une période de dix ans. Notre invitée la conseillère d’État Nathalie Fontanet (PLR) fustige cette nouvelle initiative fiscale défendue par la conseillère nationale Stéfanie Prezioso (Ensemble à Gauche).

Une initiative trompeuse et dangereuse

Nathalie Fontanet, conseillère d’État*

Le souverain s’est prononcé le dimanche 12 mars. La majorité des Genevoises et des Genevois a dit «non» à la gauche qui appelait à surtaxer les entrepreneurs, créateurs d’emplois percevant des dividendes de leur PME. On peut certes s’en réjouir, mais pas s’en prévaloir. Car, si vous avez été choqués par l’IN 179, vous ne pourrez qu’être sidérés par l’IN 185 «pour une contribution temporaire de solidarité sur les grande ts fortunes».

Sortir des crises sanitaire, sociale, économique et climatique implique une intervention massive de l’État dans différents domaines. C’est une évidence et c’est exactement le cas dans notre canton qui, ces trois dernières années, a soutenu sa population et les entreprises à hauteur de plus d’un milliard de francs supplémentaires dans le contexte des crises successives traversées. Quant aux défis à venir, l’État a également prévu un plan décennal d’investissement de plus de 11 milliards de francs pour répondre aux enjeux environnementaux, écologiques et numériques notamment. Genève n’a pas besoin de revenus fiscaux additionnels pour remplir sa mission et ses objectifs. Entre 1990 et 2021, soit une période durant laquelle la population genevoise a augmenté d’un tiers environ, nos recettes fiscales ont bondi de 147%.

N’en déplaise à la gauche, notre fiscalité permet aujourd’hui déjà de répondre efficacement aux besoins de la collectivité et d’assurer le rôle redistributif de l’impôt, en tant qu’outil indispensable pour mener à bien nos objectifs en matière de solidarité.  Par exemple, le montant prélevé sur 1% des contribuables concernés par l’impôt sur la fortune couvre aujourd’hui bien plus que l’intégralité des 562 millions de francs de subsides d’assurances maladie versés chaque année par l’État. Grâce aux revenus fiscaux d’un petit nombre d’assujettis, nous corrigeons les inégalités et luttons contre la pauvreté.

Les contribuables imposés sur la fortune à Genève ont conscience d’être taxés beaucoup plus lourdement que partout ailleurs en Suisse. Ils acceptent cette réalité. Ils sont même prêts à payer davantage en valeur absolue si leur fortune augmente. Mais certainement pas autant que ce que prévoit l’IN 185 soumise à votation le 18 juin prochain. Car, contrairement à ce que prétend son libellé, la contribution «temporaire» est en réalité permanente puisque cette initiative fait voler en éclats le bouclier fiscal pourtant voté par le peuple en 2011 pour empêcher une imposition confiscatoire.

À trop vouloir taxer, on finit par pousser les contribuables par la fenêtre, et l’IN 185 se propose de leur faire la courte échelle! Parmi les victimes de cette initiative: les PME genevoises. Les fleurons de notre économie qui créent des emplois seront indirectement touchés. Il est irresponsable de vider les poches de nos entrepreneuses et entrepreneurs sous le couvert d’une nécessité dogmatique et idéologique qui s’acharne à prendre toujours plus aux plus riches. L’impôt est une chance pour toutes et tous, pas la sanction d’un petit nombre. Pour garantir nos recettes fiscales et préserver notre État social, il nous faut combattre avec force cette initiative.

*Candidate PLR à sa réélection

Un petit effort pour les grandes fortunes

Stéfanie Prezioso, conseillère nationale Ensemble à Gauche

Notre initiative formule trois propositions complémentaires. D’abord tripler les déductions sociales sur la fortune pour les porter à 250’000 francs pour un contribuable seul; à 500’000 francs pour un couple marié ou pour un parent célibataire; à 125’000 francs par charge de famille; à 1,5 million de francs pour un indépendant ou un petit entrepreneur, à concurrence de la moitié de sa fortune investie dans son exploitation. Ensuite, percevoir une contribution de 2,5 pour mille (4,4 à 4,9 pour mille selon le centime additionnel communal) sur la part de la fortune nette qui dépasse 3 millions, après déductions sociales. Enfin, atténuer le bouclier fiscal qui surprotège les multimillionnaires. Pour une fortune nette de 5 millions, les contribuables verront leurs impôts augmenter de 1024 francs pour un couple avec deux enfants; de 3916 francs pour un couple sans enfants.

«Pour rétablir la confiance, il faut taxer les riches», voilà ce que réclamaient dans une lettre ouverte l’an dernier un groupe de 102 multimillionnaires. À Genève, les fortunes de plus de 3 millions ont triplé en sept ans, passant de 26 à 69 milliards. Elles représentent 71% de la fortune déclarée, un record en Suisse. De l’autre côté, les classes populaires et moyennes ne disposent que de 29% de la fortune totale. Il est donc juste de demander aux multimillionnaires un petit effort de solidarité. La droite prétend que Genève est le canton qui taxe le plus les grosses fortunes. En réalité, elle ne tient pas compte de la sous-évaluation massive des biens immobiliers, sans laquelle le taux d’imposition effectif serait du même ordre que dans le canton de Vaud. Les fortunes croissent plus vite à Genève que dans le reste de la Suisse, parce que d’une part l’impôt constitue un prélèvement ridicule sur des fortunes de plus de 3 millions qui ont connu une croissance moyenne de 17% par an (sur les 7 dernières années); et d’autre part, qu’une résidence genevoise est un gage de prestige, de confort, de sécurité et de services de haute qualité pour les super-riches.

Un petit prélèvement supplémentaire de moins de 5 pour mille ne provoquera pas le départ de multimillionnaires pour lesquels notre canton est un puissant pôle d’attraction. Le 22 septembre dernier, «Le Matin» révélait que Genève accueillait plus de milliardaires que Zurich, et le 31 décembre, la «Tribune de Genève» titrait que «des familles fortunées quittent Londres pour Genève». En triplant les déductions sociales, notre initiative réduira les impôts des indépendants et des petits entrepreneurs, dont une part de la fortune est investie dans l’outil de travail. Elle mettra un frein à la croissance des inégalités et donnera aux pouvoirs publics les moyens de faire face à la crise sociale, économique et climatique en cours. Elle devrait rapporter 200 millions supplémentaires par an au canton, pendant 10 ans, pour la santé, la formation, l’aide sociale, la réalisation du Plan climat cantonal 2030, etc. Elle rapportera aussi 50 millions de plus aux communes pour développer notamment le nombre de places en crèche. Le 18 juin, votez oui à l’initiative «Pour une contribution temporaire de solidarité sur les grandes fortunes».

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