France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

A Nantes, la reprise chaotique du traitement des déchets

Prairie de Mauves, à l’est de Nantes (Loire-Atlantique). Sur le sol, une longue traînée noire et des poubelles à moitié calcinées finissent de se consumer. Devant le site d’incinération des déchets d’Alcéa, un cordon de policiers assure les allées et venues des camions bennes. Entre un camp de Roms et une déchetterie, ils sont là, debout, depuis ce samedi matin. Des forces de l’ordre pour assurer le transport des ordures à bon port, et tenir à distance la vingtaine de participants au piquet de grève qui bloquaient l’usine depuis deux semaines maintenant.

«Sardines» de Patrick Sébastien

Dans les odeurs de plastique brûlé, Patrick Guiziou, délégué CGT de cette filiale de Séché environnement, avertit sous son bonnet : «L’interpro ne s’interdit pas de futur blocage, peut-être la semaine prochaine.» L’immense usine d’Alcéa est un maillon clé de la gestion des ordures de la métropole nantaise. Elle brûle une bonne partie des déchets ménagers. Et si jeudi, les éboueurs ont bel et bien voté la reprise du travail, cette décision s’est soldée par un faux départ : ils ont rapidement dû arrêter, faute de pouvoir vider leurs camions. Les deux cellules de traitement, dont celle d’Alcéa, étaient toujours arrêtées. Le même jour, les forces de l’ordre intervenaient dans le second incinérateur de la métropole, celui de Veolia, à Couëron. A nouveau immobilisé quelques heures plus tard par les manifestants.

Vendredi, journée de grand vent, les plastiques continuaient à voleter dans les rues de Nantes. Si les bennes peuvent à présent décharger leurs déchets après l’intervention de la police sur les deux sites, les incinérateurs n’ont pas encore été allumés, sans doute faute de personnel. Ce samedi midi, ils sont encore une vingtaine à être présents devant Alcéa, un mélange de grévistes, d’étudiants et de membres de l’interprofessionnelle solidaire. Le pique-nique est passé. Il reste des clémentines et un cubis de Syrah au sol. Face à eux, le cordon de police ne vrille pas, inflexible même quand le son des Sardines de Patrick Sébastien accapare les enceintes. Seul un participant s’agace : «Franchement, je ne sais pas qui a mis ça. Le problème c’est que tout le monde y a accès via le Bluetooth.»

«Il n’y avait rien à faire»

Sur le côté, Gérard et Arnaud galèrent à maintenir leur cigarette roulée allumée avec les courants d’air. Ces deux salariés tiennent le piquet depuis quinze jours même s’ils ont parfois repris le travail, en pointillé, parce qu’il fallait bien être payé. «De toute façon, il n’y avait rien à faire. L’usine était à l’arrêt !» Ils racontent attendre les décisions «de l’interpro» pour connaître la suite. «Ils nous ont beaucoup soutenus, ont maintenu de la présence sur site, avec les étudiants, les personnels du CHU.» A 56 ans, Gérard a les traits brunis de ceux qui se lèvent tôt. Il est employé ici depuis trente-trois ans, travaille «en trois-huit et pas mal de week-ends». Il soupire : «Avec la réforme, je vais me prendre dix-huit mois au moins.» Il assure que c’est la plus longue grève qu’il ait jamais connue ici. Et pourtant, il y en a eu d’autres…

Quoiqu’il arrive, reprise du travail ou pas, «il faudra attendre au moins trente heures que les fours montent en température», précise-t-il. Sans compter les deux semaines de poubelles accumulées à traiter. Si la métropole a confirmé vendredi que la collecte a bien repris, l’avenir des déchets reste donc incertain. Chez Veolia, l’autre prestataire, un préavis de grève a d’ores et déjà été posé pour lundi. Par les éboueurs, cette fois-ci.