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Pour les soldats ukrainiens de retour du front, des blessures morales “impossibles à panser”

À l’annonce de la guerre le matin du 24 février 2022, il s’est pressé dans un centre de recrutement près de Kiev. Comme tant d’autres, il voulait prendre les armes, aider à défendre son pays envahi. Mais, pour lui, cela voulait dire repartir à la guerre, celle qui hante ses nuits.

Roman Marinov, 31 ans, est un jeune vétéran de guerre. Il a passé deux ans sur le front du Donbass avant d’être déclaré inapte au service. À son retour à la vie civile, il a été diagnostiqué d’un mal qui fauche les anciens combattants : le trouble de stress post-traumatique, aussi connu sous le nom de “PTSD”, en anglais. Roman se souvient de la bataille de l’aéroport de Donetsk, en 2015. Le choc des combats, d’une extrême violence, lui fera perdre l’usage de la parole pendant six mois. Il en restera bègue et malentendant.

“Je pensais avoir surmonté ce mal, pansé mes blessures, mais en revenant du centre de recrutement j’ai su que c’était impossible.”

Les jours qui suivent, l’ancien conducteur de tank s’isole, ressent une chaleur “qui monte dans tout le corps” avant de faire une crise de tétanie. La guerre, ce n’est plus pour lui. Depuis 2016, Roman Marinov passe deux semaines par an dans un centre psychiatrique militaire de Zaporijjia. Cette année, il y a rencontré deux autres soldats qui, comme lui, avaient voulu retourner aux combats après une blessure psychologique. Ils ont passé quelques mois au front. Aujourd’hui, leurs hallucinations auditives et visuelles sont devenues incontrôlables.

Un nombre incalculable de stigmates

En Ukraine, la dureté des combats, des destructions et l’usure de la guerre détériorent la santé mentale des militaires. Selon le gouvernement ukrainien, près de 60 % des soldats pourraient souffrir de différents troubles psychiatriques. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) prévient que près de 10 millions d’Ukrainiens risquent de développer une maladie psychologique à long terme et exhorte à une prise en charge rapide de la population. Car, même une fois achevée, la guerre laissera dans son sillon un nombre incalculable de stigmates, aussi invisibles soient-ils.

Au cœur des bois, à quelques kilomètres au nord de la capitale, la guerre semble lointaine. Il y a quelques mois, elle était pourtant si proche, dans les villes voisines d’Irpin ou de Boutcha. Au milieu des pins sylvestres, un immense et austère palais soviétique se dresse. C’est le centre de réhabilitation psychologique de Forest Glade. Ici, on chasse les cauchemars des militaires.

“Dépression, anxiété généralisée, sentiment de culpabilité, hallucinations, insomnie… On ne pense souvent qu’au PTSD, mais ce serait comme résumer les problèmes cardiaques à l’infarctus”, explique Ksenia Voznitsyna. Dans son bureau, cette neurologue, psychologue et directrice du centre énumère les maux de ses patients en uniforme. Avant la guerre, le centre accueillait des vétérans. Aujourd’hui, à part quelques civils victimes de torture, il est réservé aux soldats en activité.

Près de 3 000 militaires ukrainiens sont passés par Forest Glade depuis le début de l’invasion russe. Ici, en plus des consultations psychiatriques et médicales, pendant près de trois semaines, du matin au soir et suivant u