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Trois livres de poche conseillés par François Angelier : Cristina Campo, Sébastien Le Fol, John Donne

François Angelier

Collaborateur du « Monde des livres »

Le journal des lectures en poche du journaliste.

Temps de Lecture 2 min.

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« Les Impardonnables » (Gli imperdonabili), de Cristina Campo, traduit de l’italien par Francine de Martinoir, Jean-Baptiste Para et Gérard Macé, Gallimard, « L’imaginaire », 312 p., 12,50 €.

« La Fabrique du chef-d’œuvre. Comment naissent les classiques », sous la direction de Sébastien Le Fol, Pocket, 508 p., 9,50 €.

« Poèmes sacrés et profanes », de John Donne, préface de Virginia Woolf, traduit de l’anglais par Bernard Pautrat, Rivages poche, « Petite Bibliothèque », édition bilingue, 204 p., 9,50 €.

C’est sans doute le mot qui qualifie le mieux ce qu’est et doit être ­l’écrivain : « impardonnable ». De Dante à Proust ou Tchekhov, nul grand créateur qui, par la sonde qu’il a jetée dans nos gouffres, n’ait œuvré à se rendre impardonnable à la communauté, toujours soucieuse, elle, de tamisage et de mitigation, de choses avouables ou de plaisirs acceptables. En plaçant sa méditation sous le ­signe de l’irrémissible, la poète, critique et traductrice italienne Cristina Campo (née Violetta Guerrini, 1923-1977) a définitivement réglé la question. Témoin unique de sa vision, Les Impardonnables (1992), miraculeuse suite d’essais illuminés par une terrible ascèse intérieure, où se condense sa vision, toute rilkienne, du secret littéraire. Une vision qui, s’appuyant sur Pasternak, John Donne, Proust ou Les Mille et Une Nuits, convoquant l’hagiographie mystique (les Pères du désert, Jean de la Croix) et son maître Borges, fait de l’acte littéraire un risque. L’écriture étant, pour Cristina Campo, une science extrême, celle du tisseur de tapis magique jouant de l’entrelacs des fils et du concert des motifs graphiques, mais aussi la grâce du joueur de flûte traversé par le génie pneumatique de la musique ou de Chopin, dont les doigts dansaient sur les touches du piano, guidés par cette qualité suprême : la sprezzatura, « messagère de l’ineffable et du terrible ». Les Impardonnables, ou l’alpha et l’oméga de l’art de lire.

Lire aussi (2006) :

Si Cristina Campo a tenté de percer le secret alchimique de l’écriture, jamais elle ne donne, avec les œuvres dont elle traite, ce sentiment de la familiarité, du plain-pied heureux que l’on trouve dans La Fabrique du chef-d’œuvre, dirigé par Sébastien Le Fol. On y a le sentiment d’érudits effectuant une randonnée cycliste dans la vallée des chefs-d’œuvre. A chaque monument, on freine et l’un, amoureux spécialiste, analyse le site, détaille la façade et qualifie le génie du lieu. Sébastien Lapaque débouche Gargantua, de Rabelais (1534), pour le faire humer à la cantonade, Antoine Compagnon narre l’histoire des ­Essais, de Montaigne (1580-1588), et Laurence Plazenet fait circuler les manuscrits des Pensées, de Pascal (1670), forés du trou infime par où passait le fil qui en assurait la cohésion. Nicolas d’Estienne d’Orves claque du palais avec la Physiologie du goût, de Brillat-Savarin (1825), laissant à Jérôme Dupuis le soin de nous rappeler que l’impardonnable Céline écrit « pour rendre les autres illisibles ». La virée s’achève avec les Mémoires de guerre, de Charles de Gaulle (Plon, 1954-1959), dans lesquels Arnaud Teyssier voit les « fondations d’une cathédrale en construction ».

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