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Ça ponce. Ça pique. Ça tape. Ça peint. Sur le quai Vauban, au cœur de la base navale de Toulon, règne un incroyable vacarme en ce mois de septembre! Quatre mois et demi après son entrée au bassin pour un vaste programme de travaux d’entretien, le Charles-de-Gaulle se refait toujours une beauté.
Visible depuis les vedettes à passagers qui traversent la petite rade, son château - les superstructures qui dominent le pont d’envol - n’est plus qu’un gigantesque échafaudage. Malgré les apparences, le navire amiral de la Marine nationale doit pourtant reprendre la mer et les essais au plus tard le 1er janvier prochain. D’après son commandant, le capitaine de vaisseau (CV) Georges-Antoine Florentin, visiblement confiant, le bâtiment doit même sortir du bassin d’ici la fin du mois d’octobre.
Sans bouilleur, pas d’opération
Pour tenir les délais, Naval Group, l’industriel qui a la maîtrise d’œuvre du chantier, et le Service de soutien de la flotte ne lésinent pas sur les moyens. "C’est un chantier hors normes. En « deux-huit" ou "trois-huit", chaque jour, quelque 2.000 personnes y travaillent, dont bon nombre de marins du bord. Outre Naval Group, 180 sous-traitants interviennent sur le chantier. Rien qu’en peinture, c’est l’équivalent de deux terrains de rugby qui doivent être traités ». Un chantier "colossal" qui nécessite une coordination des plus pointues. À ce sujet, le commandant Florentin loue le rôle de la SMUC, pour structure mutualisée de coordination. "Pour prévenir les accidents, analyser les risques liés aux coactivités, autrement dit pour assurer la sécurité du chantier, un travail d’équipe, mélangeant en un même lieu marins et personnels de Naval Group, est absolument nécessaire".
Mais revenons au chantier, désigné sous le sigle IEI pour indisponibilité pour entretien intermédiaire. S’il n’a pas la durée d’un arrêt technique majeur (ATM), il en a la densité. "Je dirais que l’ATM est un 5.000m, quand l’IEI est un 400m haies!", glisse le CV Florentin, pas mécontent de sa métaphore sportive. Et ce n’est pas parce que le cœur des chaufferies nucléaires n’est pas changé, que le chantier est moins important. "L’idée est toujours de redonner du potentiel aux installations, de maintenir les capacités opérationnelles aux plus hauts standards internationaux pour que nous restions les meilleurs en opération", martèle encore le commandant.
L’hôpital entièrement reconstruit
L’une des principales opérations consiste cette fois à remplacer deux des quatre bouilleurs du porte-avions. "À première vue, cela peut paraître accessoire, mais sans ces équipements qui permettent de produire de l’eau douce à bord, le porte-avions ne peut rien. Ni avancer, ni catapulter les avions", commente un officier du Charles-de-Gaulle. Et de préciser: "Les bouilleurs actuels ont l’âge du bateau, admis au service actif en 2001. Ces équipements produisent, à partir de l’eau de mer, de l’eau déminéralisée extrêmement pure qui sert pour les douches, le rinçage des aéronefs, et la production de vapeur. Cette dernière étant ensuite utilisée, via des turbines, pour la propulsion, la production d’électricité et le catapultage des avions".
Et puisqu’on parle de catapultes, l’une des deux, celle de la piste axiale, est en partie démontée pour de la maintenance préventive et corrective. "On va notamment remplacer la vanne de lancement qui délivre la quantité de vapeur nécessaire au catapultage des avions", explique le maître principal Loïc, l’un des spécialistes du bord.
Nommé médecin-major du Charles-de-Gaulle cet été, le médecin-chef Gautier a dû prendre peur en voyant son hôpital. Car pour l’heure, les blocs opératoires sentent plus la soudure que la bétadine. Plus qu’une rénovation, c’est une reconstruction que subit en effet l’hôpital. "Mais une fois fini, il préfigure ce qui se fera sur le porte-avions de nouvelle génération", assure le médecin. Ce dernier évoque "une optimisation du parcours du blessé avec une salle hybride qui regroupera le scanner, un hall opératoire, mais aussi de nouvelles capacités techniques telles que la cœlioscopie ou la radiologie interventionnelle (1). L’objectif étant de gagner du temps dans la prise en charge du blessé et donc d’augmenter ses chances de survie".
1. Une technique moins invasive qui remplace la chirurgie ouverte en passant par voie artérielle.