Monaco
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Pourquoi la métropole de Toulon veut détruire ce yacht de luxe de 35 mètres?

Les informations ne manquent pas au sujet du yacht Osprey et son atypique "carrière". À l’origine, le navire construit en 1953 est un dragueur de mines de la Royal Navy, l’HMS Chillingham. Sa reconversion en havre de luxe ne date que des années 70. Tour à tour baptisé Finola, Mangusta, Vana of Cranborne puis Osprey, il a parcouru toutes les mers du globe, accueillant des générations de buveurs de caïpirinha. Les dernières photos connues montrent un bateau blanc de 35m de long aux lignes élégantes; une invitation sincère à glisser sur l’azur de la Méditerranée.

Mais ce qu’internet ne dit pas, c’est que depuis quatre ans, l’Osprey ne navigue plus. Et que le moelleux de ses canapés comme l’éclat de ses menuiseries en acajou se sont largement altérés. Arrivé en rade de Toulon en septembre 2019, le yacht n’en est plus jamais reparti. Et s’il est effectivement prévu qu’il quitte un jour le plan d’eau, ce sera pour finir à la casse… tout en laissant une note salée à régler aux pouvoirs publics.

Le ou les propriétaires aux abonnés absents

"C’est une histoire un peu longue", soupire Alexis Villemin, directeur général adjoint (DGA) à la Métropole TPM. Et douloureuse, au sens propre comme au figuré: "La première alerte, c’est quand le capitaine de l’Osprey et le chef mécanicien se sont plaints de ne plus être payés. Puis, ce sont les redevances portuaires qui n’étaient plus réglées à la Chambre de commerce…"

Le yacht, alors stationné au carré du port, devant la mairie d’honneur, arbore le drapeau des îles Caïmans, un pavillon de complaisance. Son propriétaire n’est autre qu’une société écran où il est bien difficile de distinguer une ou plusieurs personnes physiques, une pratique courante dans le monde du yachting. Bref, pas facile de demander des comptes à qui que ce soit dans l’affaire.

Un bateau squatté

La Chambre de commerce se retrouve donc avec un navire sur les bras, que les derniers membres d’équipage finissent par quitter. Conséquence: "Le bateau se retrouve squatté et la police doit intervenir", raconte Alexis Villemin. Pour couronner le tout, une voie d’eau se déclare en 2020!

Un potentiel acheteur se manifeste toutefois. Il faut dire qu’on ne parle pas là d’un vulgaire rafiot mais d’un "super-yacht" encore estimé à près de deux millions d’euros en 2010. Et qui, pour dix passagers, se louait la bagatelle de 42.000 euros la semaine du temps de sa splendeur.

Le chantier IMS 300, à Pin Rolland, est sollicité pour un devis des travaux de rénovation à réaliser. L’Osprey file direction Saint-Mandrier. Ce sera sa dernière "nav". D’acheteur, finalement, il n’y aura pas. Tandis qu’une nouvelle brèche apparaît sur la coque, IMS n’a d’autre choix que de se mettre à l’ouvrage pour éviter que la superstructure en bois ne se transforme en récif artificiel.

Il faut attendre début 2023 pour que le préfet prononce la déchéance de propriété de l’Osprey, dont l’autorité portuaire – la Métropole TPM – devient seule responsable. Mais pour quoi faire? "Quand les réparations à effectuer sur le navire coûtent plus cher que le bateau lui-même, il est temps de s’en débarrasser", glisse un connaisseur du dossier.

Une facture de 250.000 euros à régler pour TPM

Reste pour ce faire à trouver un chantier agréé. "On estime l’opération d’enlèvement à environ 250.000 euros", annonce Alexis Villemin. Pour ne pas solliciter le contribuable plus que de raison, la Métropole a déposé une demande auprès du "fonds vert", dispositif ministériel permettant de percevoir jusqu’à 200.000 euros pour les territoires souhaitant "accélérer la transition écologique". Un joli terme censé englober la suppression des épaves.

En attendant de savoir si l’État va accepter de passer à la caisse, l’Osprey a été sorti de l’eau. Soixante-dix ans après sa construction, le yacht s’apprête à finir sa carrière de la plus triste des manières.