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Pourquoi, selon Veolia, les déchets et les eaux usées ont leur place dans le mix énergétique

Elle préside depuis juillet 2022 aux destinées de Veolia et de ses 213.000 collaborateurs. Estelle Brachlianoff, directrice générale du groupe spécialisé dans les métiers des déchets, de l’eau et de l’énergie, était de passage dans le Sud pour le Nice Climate Summit où elle participait à une table ronde.


La thématique de votre table ronde était Agir local dans un monde global. Ça vous parle?
C’est tout à fait Veolia. Le groupe agit dans des échelles sans arrêt différentes. Nous sommes à la fois dans du très local, territorial et mondial. Nous sommes présents dans 44pays et avons réalisé l’an dernier un chiffre d’affaires de 43Mds€. On a changé de dimension depuis le rachat il y a dix-huit mois de l’activité international de Suez. Mais Veolia reste un champion mondial aux racines françaises et européennes. La France est le cœur battant de l’entreprise qui y réalise 20% de son chiffre. On continue à y investir, à y installer des pilotes industriels, à y faire de la R&D.

Et au niveau territorial?
La transformation écologique qui est notre métier a besoin de cadres législatifs nationaux et de grandes installations industrielles spécialisées mais quand il s’agit de déployer des solutions (eaux usées, recyclage, dépollution...), la transformation écologique s’opère avant tout à l’échelle d’une agglomération et d’un bassin de vie.

Le chemin de la transformation écologique est long…
Mais je suis une optimiste de combat. Et je vois dans les sources d’optimisme, le fait que la prise de conscience est actée. Au niveau mondial, grâce aux COP successives et au niveau de la France notamment depuis la sécheresse de l’été 2022 qui a été un point tournant sur le sujet de la rareté en eau. Les industriels et les collectivités sont de plus en plus nombreux à se demander comment économiser et régénérer l’eau. Maintenant, il faut accélérer, les solutions sont là et disponibles. De manière générale, j’estime qu’on a la moitié des solutions pour résoudre les problèmes environnementaux. L’autre moitié est à inventer, d’où les centaines de millions d’euros que nous investissons chaque année dans la R&D.

Comment accélérer les 50% de solutions existantes?
En faisant prendre conscience au grand public l’existence de ces solutions et en alignant les différents éléments du puzzle (législation, action des collectivités locales, mobilisation des entreprises…). Mais aujourd’hui encore, cela finit souvent dans des complexités administratives. Si on veut aller plus vite, il faut simplifier les procédures.

On en est encore loin?
Il y a des signaux positifs comme le Plan Eau du gouvernement qui s’est traduit par un décret il y a quelques jours mais il va falloir qu’il soit dans les arrêtés, puis les circulaires afin que toutes les administrations locales soient alignées.

Quelles solutions pour faire face à la rareté de la ressource en eau?
C’est un mix des solutions. Cela commence par la sobriété et des écogestes au quotidien pour éviter le gâchis à la maison. Puis, il faut faire la chasse aux fuites dans les réseaux de distribution. Un litre sur cinq est perdu. La technologie nous aide de plus en plus, notamment l’intelligence artificielle qui détecte les fuites en temps réel.

Nous avons signé un contrat avec la Ville de Lille où on a réussi à faire 10% d’économies grâce à toutes ces solutions. Nous avons aussi besoin de trouver de nouvelles sources d’eau comme la réutilisation des eaux usées et, peut-être un jour, le dessalement.

Pourquoi y a-t-il moins de 1% d’eaux usées réutilisées en France?
C’est 15% en Espagne qui a de très strictes normes sanitaires et environnementales et c’est 89% en Israël.

Il y a un an, on avait quasiment zéro projet de réutilisation des eaux usées sur le territoire.Désormais, Veolia a un projet à l’étude dans toutes les stations d’épuration du littoral méditerranéen. À Antibes, l’eau recyclée sert déjà à arroser les espaces verts et à nettoyer les rues. Il faut savoir que la plupart des villes de France nettoient des rues avec de l’eau potable…

À Windhoek en Namibie, les habitants boivent de l’eau recyclée. Serait-ce envisageable en France?
Oui mais en dernier recours. Nous œuvrons pour que dans un premier temps, cette eau recyclée soit utilisée pour arroser les golfs, les cultures agricoles, les espaces verts. Il n’y a aucun problème technique pour en faire de l’eau potable. C’est plus un souci d’acceptabilité. Même si plus de 50% des Français se disent déjà prêts à boire de l’eau potable qui viendrait d’une eau recyclée.

Veolia dépense des centaines de millions par an en R&D.
Grâce à l’innovation, des frontières sont sans cesse levées. Concernant les déchets, nous essayons de recycler le plus grand nombre de matériaux différents. Il y a dix ans, nous ne pouvions pas recycler une bouteille d’eau en plastique PET; désormais, Veolia a une trentaine d’usines de ce type dans le monde.

Nous faisons des recherches autour du recyclage du plâtre, des panneaux photovoltaïques. Des projets sont plus avancés au sujet des batteries de téléphone et véhicules électriques qui contiennent des matériaux stratégiques limités (nickel, lithium et cobalt). On a trouvé comment faire de l’hydrométallurgie pour les séparer: c’est aussi "simple" que de séparer le blanc et le jaune d’un œuf déjà battu!

On investit aussi dans l’innovation pour améliorer la qualité de vie de nos collaborateurs. On fait appel à des robots pour effectuer des tâches manuelles. C’est le cas du centre de tri de Villeneuve-Loubet qui est doté d’un bras de tri téléopéré.

Et pour l’énergie?
Il y a en France un énorme gisement de déchets non exploités comme les eaux usées ou la chaleur fatale (résiduelle). Ils remplacent les carburants fossiles, cochent la case Énergie renouvelable et de l’autonomie stratégique et politique des territoires.

Quand la guerre en Ukraine a démarré, l’objectif était de se passer du gaz russe et j’ai calculé qu’en équipant toutes les stations d’épuration et les décharges de France de récupération de biogaz, ce serait 25% du gaz russe qui serait remplacé. En rajoutant l’électricité produite à partir de déchets non recyclables, cela grimpe à 40%. Preuve que dans le mix énergétique, les eaux usées et les déchets ont leur place.

À Nice, grâce au centre de valorisation Arianeo, ce sont 25.000 foyers qui, en 2024, seront chauffés à partir de déchets non recyclables.


Veolia a signé des résultats historiques l’an dernier avec près de 43Mds€ de chiffre d'affaires en 2022.
Deux tiers viennent du rachat de Suez et le tiers restant de la croissance de nos activités partout dans le monde qui sont portées par la volonté de décarboner, de dépolluer et de régénérer les ressources. On devrait avoir de bons résultats pour les années à venir.

Protection sociale pour tous

Le groupe vient de déployer un programme de protection pour tous ses collaborateurs dans le monde: Veolia Cares.

"C’est dans la droite ligne de notre raison d’être et de performance plurielle, assure Estelle Brachlianoff. On mesure tous les ans notre impact environnemental et sociétal. Outre nos résultats financiers historiques (lire par ailleurs), on a permis de retirer 14millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère grâce à nos activités et on a économisé 320millions de m³ d’eau l’an dernier. Nos 213.000 collaborateurs – dont 83% de non-cadres – sont les meilleurs ambassadeurs de la transformation écologique et il faut veiller à ce qu’ils soient bien dans leur travail. On leur offre un socle social de protection à des moments clés de leur vie: Veolia Cares.

Quel que soit l’endroit où ils travaillent dans le monde, ils ont droit à dix semaines de congé maternité rémunérées, une semaine de congé parentalité, une journée payée par l’entreprise donnée à des associations, une assurance santé, une prévoyance d’au moins six mois de salaire et de la flexibilité pour les aidants. Certes, cela coûte de l’argent à Veolia mais je le considère comme un investissement pour nos salariés qui nous le rendent déjà avec un taux d’engagement de 89%. J’en suis aussi fière que de nos résultats financiers."