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Chaos au Stade de France: les premières conclusions autour du fiasco

Deux semaines après les incidents de la soirée du 28 mai, avant et après la finale de la Ligue des champions Liverpool-Real Madrid, les premiers rapports mettent en lumière des failles dans les dispositifs d'accueil et de sécurité mis en place. Mais entre la France et le Royaume-Uni, certains points cruciaux concentrent toutes les tensions.

Après avoir accueilli les finales de la Ligue des champions en 2000 et en 2006, le Stade de France de Saint-Denis, dans la banlieue nord de Paris, a été choisi fin février pour la finale de cette édition 2022, en remplacement du Stade de Saint-Pétersbourg. Une décision prise après l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe.

Il est fort probable que l'enceinte dyonisienne ne soit plus sélectionnée avant un bon moment tant les événements du 28 mai ont sali la réputation de la France en matière d'organisation. C'est d'ailleurs l'un des enseignements du rapport gouvernemental remis à la Première ministre, Elisabeth Borne, vendredi 10 juin : cette (mauvaise) soirée porte « atteinte à l'image de la France ».

Retour sur les diverses explications livrées ces deux dernières semaines.

Mauvaise signalisation, désorganisation, délinquance et faux billets

Michel Cadot, délégué interministériel aux Jeux olympiques et aux grands événements, a remis le 10 juin à Elisabeth Borne un rapport de 30 pages, relatif aux incidents du Stade de France. Il confirme ce que les images et les témoignages recueillis avaient dépeint : des défauts dans la signalisation pour les supporters venus en transports en commun, des points de filtrage surchargés face à l'afflux de spectateurs et des actes de délinquance aux abords du stade.

Sur ce dernier point, le parquet de Bobigny a d'ailleurs annoncé l'ouverture d'une enquête pour « vols, vols aggravés et violences aggravées » pour traiter les plaintes formulées par les supporters étrangers victimes d'infractions.

L'ensemble des paramètres réunis ce soir-là a donné lieu aux scènes de chaos vues aux entrées du stade, avec des spectateurs sans billets escaladant les grilles et des forces de l'ordre faisant usage de gaz lacrymogènes à l'encontre des supporters de Liverpool, principales victimes dans cette soirée cauchemardesque.

Michel Cadot désigne « l'afflux mal maîtrisé du public excédentaire, sans billets ou avec des faux billets » comme principale source de désordre. Un point essentiel sur lequel les regards divergent côté français et côté britannique. Toutefois, le délégué interministériel appelle à « relativiser » la version de Gérald Darmanin, ministre très critiqué depuis deux semaines.

Timides rétropédalages, mea culpa et pluie de critiques

Le ministre de l'Intérieur avait parlé d'une « fraude massive, organisée et industrielle » qui aurait permis l'arrivée de « 30 000 à 40 000 supporters britanniques sans billets ou avec des billets falsifiés ». Gérald Darmanin et la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, avaient maintenu cette version lors de leur audition au Sénat, le 1er juin.

Depuis, le chiffre de 35 000 faux billets a été avancé. Il n'empêche que ces propos ont ulcéré les autorités britanniques et le club de Liverpool, qui rejettent de telles proportions et taclent avant tout le manque d'organisation.

Jeudi 9 juin, un autre acteur majeur de ce dossier a été auditionné par le Sénat : le préfet de police de Paris, Didier Lallement. Alors que le lendemain, le rapport gouvernemental a fait état de « problèmes d'exécution » dans le dispositif du maintien de l'ordre (1 300 policiers mobilisés le 28 mai), Didier Lallement a reconnu « un échec » et admis que les chiffres de faux billets, qu'il a fournis au ministre de l'Intérieur, n'étaient peut-être pas « parfaitement justes ».

Malgré tout, le préfet de police, tout en reconnaissant un usage parfois excessif, a assumé le recours au gaz lacrymogène sur les supporters. C'était « le seul moyen policier pour faire reculer une foule sauf à la charger », se disant quand même « désolé pour les gens de bonne foi ». Le rapport gouvernemental évoque lui des moyens « disproportionnés ».

Borne veut « tirer toutes les leçons »

Derniers couacs en date : la destruction des images de vidéosurveillance du Stade de France, sept jours après les faits, faute de réquisition par la justice. Même chose du côté des images de la RATP, automatiquement effacées au bout de trois jours quand elles ne sont pas saisies par la justice. Seules les images de la SNCF sont encore disponibles. Au Royaume-Uni comme en France, en particulier dans les rangs de l'opposition, les critiques indignées se multiplient.

Et maintenant, que va-t-il se passer ? Difficile à déterminer, les auditions n'étant pas terminées. La semaine prochaine, le Sénat doit recevoir la SNCF et la RATP. L'enquête pour « vols, vols aggravés et violences aggravées » n'en n'est qu'à ses prémices. On ignore encore combien de plaintes ont été déposées au Royaume-Uni, alors que le club de Liverpool, estimant ses supporters injustement désignés comme bouc-émissaires, a demandé à ces derniers de témoigner de leur expérience à Saint-Denis. Des milliers d'entre eux se sont déjà exprimés.

De son côté, le Real Madrid a appelé à « déterminer qui sont les responsables » des scènes chaotiques du Stade de France. Même si Didier Lallement a martelé, lors de son audition au Sénat, qu'il est « le seul responsable opérationnel de l’ordre public sur l’agglomération parisienne », aucune décision n'est prise pour l'heure.

Elisabeth Borne, elle, veut que cette soirée ratée serve de leçon pour la France. Il faut en « tirer toutes les leçons » selon son expression, alors que le pays doit organiser la Coupe du monde de rugby l'année prochaine (du 8 septembre au 28 octobre 2023) et les Jeux olympiques dans deux ans (du 26 juillet au 11 août 2024).

(Avec AFP)