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Schisme de l'église ukrainienne: Moscou perd «une pièce décisive» de son patriarcat

La branche moscovite de l'Église orthodoxe a officiellement rompu vendredi avec les autorités spirituelles russes.  À l'issue d'un concile, ses responsables ont prononcé « la pleine indépendance et l'autonomie de l'Église orthodoxe ukrainienne ».

C’est une initiative historique. Le concile a exprimé un « rejet total de la position du patriarche Kirill à propos de la guerre ». Non seulement le patriarche de Moscou n’a pas condamné l’agression militaire russe en Ukraine, mais il n’a pas non plus trouvé les mots pour le peuple ukrainien qui souffre, a dénoncé un porte-parole de l’Église. « C'était inéluctable », commente l'historien et théologien Jean-François Colosimo.

Dès le début de l’invasion, le patriarche Kirill avait défendu l’opération militaire. Une opération livrée contre les « forces du mal », selon ses mots. Le patriarche, qui a d’ailleurs fait bénir soldats et missiles, est un proche du pouvoir et de Vladimir Poutine dont il reprend les positions. Même si par ailleurs l’Église orthodoxe russe n’a pas de lien officiel avec la fédération de Russie, qui est un État laïc.

Déchirement majeur

Une partie de l’Église ukrainienne, celle du patriarcat de Kiev, avait déjà rompu avec l’autorité du patriarche Kirill en 2019 et prêté allégeance au patriarche Bartholomée d’Istanbul. Mais jusqu’ici l’Église moscovite d’Ukraine était restée fidèle à l’autorité du patriarche de Moscou.

Ce nouveau schisme est un déchirement majeur et très préjudiciable au patriarche de Moscou car la majorité des paroisses d'Ukraine étaient sous l'autorité de l'Église orthodoxe moscovite. L’Ukraine possède certains monastères les plus importants de l’Église orthodoxe russe. « Dans ce patriarcat qui couvre l’ancien territoire soviétique, l’Ukraine était une pièce décisive car si le patriarcat de Moscou pèse environ 50% du monde orthodoxe en termes de ressources, et bien l’Église d’Ukraine, elle, compte pour à peu près 40% dans le patriarcat de Moscou », explique Jean-François Colosimo.

De nombreuses conséquences découleront de cette décision. Maintenant, les deux églises orthodoxes ukrainiennes et puis l’église autocéphale, indépendante, d’Ukraine vont se retrouver presque face-à-face, même s’il y avait des ponts entre les deux églises. L’église autocéphale indépendante accueille cette décision de façon très positive, mais il y a quand même une question de biens matériels qui se pose. Et c’est sûrement sur ce point que les tensions vont s'accroître.

La question est de savoir si ces ex-moscovites vont aujourd’hui rejoindre l’Église nationale indépendante fondée en 2019.

Jean-François Colosimo, historien et théologien

© RFI