À l’instar de plusieurs quartiers de la banlieue dakaroise, Guinaw Rails et Thiaroye sur mer font face à l’équation des bâtiments menaçant ruine. Un danger permanent pour des familles qui n’ont pas le choix, car partagées entre le marteau des dépenses courantes à gérer et l’enclume de la cherté du loyer.
Le handicap du loyer cher
Dans une rue de Thiaroye sur mer, l’ambiance est assurée par des enfants courant derrière le ballon rond. Ils jubilent, crient et se plaignent souvent du passage des automobilistes. Non loin de leur aire de jeu, un bâtiment attire forcément les regards. Ses murs en piteux état le détachent du lot des maisons joliment carrelées. Il y en a beaucoup dans cet état de délabrement, d’après Ousseynou Samb, un habitant du quartier. « Les bâtiments en ruine sont légion dans la banlieue. Et la menace est grandissante. Nous avons tous une pensée pour les familles qui y vivent, notamment en période d’hivernage », indique Ousseynou, le cure-dent entre les dents.
Aïssatou Gaye est obligée de vivre dans un bâtiment en état de délabrement avancé, la peur au ventre. « Je n’ai pas les moyens de me payer un appartement, les prix proposés sont très chers. En plus, le versement de la caution est actuellement passé de trois à quatre mois », se désole-t-elle, amèrement. Adama Diop n’a également pas le choix. Elle affronte la peur en attendant de trouver mieux. Mariée et mère de cinq enfants, elle espère sortir un jour de ce calvaire. « Nous voulons quitter. Le problème, c’est où et comment partir ? Nous payons la chambre à 15.000 FCfa depuis plusieurs années. Avec cette somme, il est impossible de trouver une pièce dans un quartier de la banlieue. Donc nous n’avons pas le choix », se résigne Adama. Vêtu d’un boubou traditionnel gris, Abdoulaye Sèye nous invite à visiter sa chambre à Thiaroye sur mer. Le jeune menuisier métallique, hanté par l’état du bâtiment, s’est servi de tubes en fer pour atténuer les risques d’effondrement. Trois y sont installés au total, en attendant de trouver une chambre où il pourra vivre en toute quiétude. « Personne n’aimerait vivre constamment sous la menace d’un tel danger. Nous y vivons en attendant de trouver des logements plus sécurisés, plus confortables », dit-il. Lui aussi, il se heurte à l’équation de la cherté de la location et au paiement de la caution.
Les bailleurs pointés du doigt
Entre bailleurs et locataires, les relations sont souvent tendues. Abdoulaye Sèye dénonce un manque de considération de certains propriétaires de maison, qui, dit-il, ne sont intéressés que par les versements mensuels du loyer. « Nous avons à plusieurs reprises alerté notre bailleur. Il a toujours fait la sourde oreille. Quand il s’agit de réfectionner, il disparaît », se plaint Abdoulaye. Adama Diop partage ses complaintes. Pour lui, une capacité d’anticipation des bailleurs aurait permis d’atténuer les risques et permettre aux locataires de vivre en toute sécurité. « La plupart des bailleurs sont insensibles à la souffrance des locataires. On ne les voit qu’à la fin de mois alors qu’une meilleure collaboration aurait permis de bien entretenir la maison », lâche la dame.
Cependant, une réfection pourrait exposer sa famille. Car, « après réfection, les bailleurs font de la surenchère. Les tarifs passent automatiquement du simple au double. Les familles démunies en souffrent énormément », déplore-t-il. Ousmane pointe également du doigt l’attitude des bailleurs, qu’il juge « irresponsable ». « C’est anormal que la location passe du simple au triple en l’espace de quelques années. Exiger quatre mois de caution, c’est de l’usure. Et quand ils vous demandent de sortir, pour réfection, sachez que c’est fini pour vous. Ils céderont les chambres aux plus offrants », s’offusque Ousseynou Samb.
leSoleil.sn
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