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Interview avec Patherson “Le slam et la poésie sont deux strophes d’un même poème.”

De l’écriture de l’aventure à l’aventure de l’écriture, l’art romanesque et poétique s’est sémantiquement initié à des strates idéelles hautement éclectiques. De même, l’invité de votre page people est un aventurier des idées et des expériences, humaines comme intellectuelles. Livre ouvert au monde, Patherson est fils de sa parole qui épouse sa liberté non licencieuse mais formative au swing du partage idéel et idéal dans le dialogue qu’est l’altérité humaine. Slameur au talent reconnu, Patherson est un diamant brut scintillant au milieu des artifices. Lauréat de son originalité, sa singulière plume fait son pluriel lectorat. Dont vous, lecteur de Rewmi à qui le privilège de boire à cette fontaine verbale est donné via cette interview.

Patherson, votre nom de scène, quelle est l’histoire qui se cache derrière ?

Patherson n’est ni une sophistication, ni le besoin de suivre une tendance consistant à avoir un nom qui sonne américain. C’est le fruit d’une longue histoire d’amitié et d’affection avec une personne qui faisait dix fois mon âge lorsque je la rencontrais. Je dis affectueusement que c’est le grand-père que la rue m’a donné. Pa Mbengue, il s’appelait. Sur le chemin de l’école coranique, nous le croisions toujours en face de sa maison, sur sa chaise, en train de lire le journal ou de jouer aux mots fléchés. Au début, on passait en le saluant, avec le temps, une familiarité s’est construite entre des enfants de huit ans et un octogénaire passionné de partage. Donc, nous restions souvent quelques minutes à ses côtés pour jouer aux mots fléchés avec lui, et parfois, c’était une occasion pour lui de nous raconter des anecdotes de sa jeunesse. Du football aux arts martiaux qu’il pratiquait, il m’a transmis de ce cocktail l’amour des mots. Depuis un journal. Un jour, il me demanda l’origine de mon prénom Pathé. Je suis l’homonyme de mon grand-père paternel, rétorquai-je. Il rebondit en ces termes, sur un ton taquin :
« Donc tu es Pathé the Son », signifiant Pathé le fils. C’est ce jeu de mot qui a donné « Patherson », que je porte sur scène par affection et en hommage à ce grand-père ramassé dans la rue.

Qu’est-ce qui vous motive en tant qu’artiste?

Semer sincèrement une graine de bonheur en une personne. Faire un heureux, un seul, après une prestation est un applaudissement auquel on ne s’habitue jamais. Partager une raison d’espérer, une brindille qui participe à élargir les horizons me suffit pour reprendre la plume. Revenir sur scène. L’art aussi me permet d’être face à moi-même dans un univers que je construis par les briques de mon idéal, le vent de mes errances, les battements d’une main tendue à l’autre.

Comment est née cette envie d’écrire ?

L’aptitude d’un enfant à s’émerveiller face à son grand frère m’a poussé à écrire. Je voulais juste lui ressembler. Point final. Lorsque je faisais mes premiers textes, je ne savais même pas ce qu’est la poésie. Je lui remettais toujours mes ratures pour correction et j’ai écrit de la classe de CM1 à la classe de Seconde pour avoir mon premier « c’est bien, ce texte est bien écrit ». A côté de ce frère-maître, aîné-lanterne, j’ai appris à manier une langue, mais aussi à être patient. J’écris encore pour garder l’enfant en moi, continuer à m’émerveiller face aux choses invisibles de la vie, et face à l’amour fraternel.

Quand et comment avez-vous commencé à vous intéresser au Slam ?

Après mon Bac au Prytanée, j’ai créé mon Blog « Silence des rimes » où je continuais à publier mes textes et à les partager sur les réseaux sociaux. Durant ces premiers pas dans le blogging, j’avais senti le besoin de toucher un autre public, celui qui ne lit pas ou qui lit autrement. J’ai commencé à lire mes textes à haute voix. Ensuite, ma rencontre avec le Vendredi Slam m’a permis de mieux connaître cet art et de découvrir des techniques pour améliorer mon style. J’avais besoin d’une plume de plus, j’ai trouvé la voix, la rencontre a fait un slameur.

Quels sont les thèmes que vous abordez dans le slam ?
Tout ce que la nature veut bien m’offrir.

D’où vous vient votre inspiration ?
Je ne sais pas.

Quelle est la frontière entre le slam et la poésie ?

Pour moi, le slam et la poésie sont deux strophes d’un même poème. Il y a un grand débat sur les différences, et c’est légitime, la poésie étant un genre littéraire d’abord. Mais dans mon processus d’écriture et mon rapport avec cet art, j’écris d’abord un poème ou un texte poétique et c’est ce produit que je déclame. Mon slam c’est mon poème déclamé. A la place des frontières, je vis des voies de continuation.

Enfant de troupe au Prytanée militaire. Qu’est-ce que cela vous a apporté aujourd’hui ?

Le Prytanée Militaire Charles N’Tchoréré de Saint-Louis a été une belle fabrique pour ma plume. Nous avons dans ce moule un journal trimestriel appelé la Voix de l’Enfant de Troupe, communément appelé la VET. J’ai eu la chance de saisir cette belle tribune pour partager avec un large public mes premiers poèmes et textes de réflexion sur divers sujets. La VET m’a donné la conscience qu’écrire nous mène vers ce qui nous dépasse, ce qu’on ne contrôle pas. A côté de ce journal, je faisais du théâtre à l’école. Avec le théâtre, je faisais mes premiers pas sur scène et je découvrais mes atouts d’acteurs. Naturellement, en allant vers le slam, j’arrivais en étant un habitué des scènes grâce au théâtre et au « Débattons ». Je faisais partie de l’équipe de Débattons du Prytanée aussi. Donc mon passage dans ce lycée militaire d’excellence m’a appris à être toujours dans la pluridisciplinarité et la transversalité dans tout ce que je fais. Je ne me laisse pas définir par une discipline, je navigue entre elles pour aller vers les surprises de l’inattendu.

Que pensez-vous de l’utilisation des instruments de musique dans le slam ?

Il y a un slam qui se veut puriste ou de compétition qui est chronométré et qui ne fait intervenir que la voix. Cela a ses charmes, mais tout art, pour survivre et aller conquérir d’autres publics, a besoin de réinventer ses sonorités. L’introduction des instruments de musique, s’ils sont bien choisis, ajoute de la couleur à cet art et peut élargir les horizons. L’essentiel c’est que l’instrumental ne noie pas le message et la poéticité du texte déclamé. Quand c’est bien fait encore une fois, je l’appelle tout simplement une heureuse innovation. Un souffle de plus.

Vous êtes auteur du livre « J’ai écrit un roman, je ne sais pas de quoi ça parle ». Qu’en est-il ?

Je ne sais pas de quoi ça parle.

Quels sont vos projets ?
Je vis au présent. Demain est un autre monde.

ANNA THIAW