Senegal
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Paix Sociale: Macky Sall rattrapé par ses engagements non tenus

Après douze années d’exercice sans partage du pouvoir, le président Macky Sall semble aujourd’hui rattrapé par ses engagements non tenus. En effet, son régime fait aujourd’hui face aux démons qui avaient fortement ébranlé la fin de règne du président Wade.

La situation actuelle du pays est loin de cette « démocratie apaisée », souvent citée comme un exemple dans une région ouest-africaine en proie aux coups d’Etat et autres changements anti démocratiques à la tête du pouvoir exécutif. La preuve, à moins d’un an de l’élection présidentielle du 25 février prochain, une incertitude totale règne autour des candidats à ce scrutin aussi bien dans le camp du pouvoir que celui de l’opposition.

Contrairement aux précédents scrutins, le débat sur le processus électoral pour une première fois de l’histoire politique du pays est relégué au second plan. Toutes les attentions sont tournées vers la tension politique actuelle alimentée par le débat sur la controversée troisième candidature de l’actuel chef de l’Etat.

Pourtant, opposant en 2012, le Président Macky Sall avait farouchement combattu la troisième candidature de son prédécesseur et ex-mentor, le Président Abdoulaye Wade. Avec ses anciens camarades de l’opposition d’alors dont Moustapha Niasse, leader de l’Alliance des forces de progrès (Afp), Abdoulaye Bathily, parton de la Ligue démocratique, feu Ousmane Tanor Dieng ex-Sg du Parti socialiste et feu Amath Dansokho, ex-leader du Pit, entre autres, il avait pris part aux manifestations contre cette 3ème candidature de Wade qui avait plongé le Sénégal dans une profonde crise politique. Aujourd’hui, douze ans après, voilà le Sénégal de nouveau confronté à cette même tension autour de la 3ème candidature.

Candidat de la coalition « Macky 2012 » à la présidentielle de 2012, Macky Sall avait signé le 29 mai 2009, au même titre que les 12 autres candidats qui se réclamaient de l’opposition lors de présidentielle de 2012, les conclusions et la Charte de bonne gouvernance démocratique des Assises nationales. Ce document issu des larges concertations qui ont regroupé des organisations de la Société civile, des syndicats, des partis politiques, des organisations non gouvernementales, des organisations religieuses, professionnelles, féminines, patronales, entre juin 2008 et mai 2009, proposait une nouvelle vision de la gouvernance du pays avec une nouvelle Constitution.

Ainsi, il s’était engagé une fois élu à appliquer toutes les recommandations de cette Charte de bonne gouvernance démocratique qui promeut une nouvelle République moderne avec notamment une séparation et un équilibre entre les pouvoirs, l’incompatibilité de la fonction de président de la République avec celle de chef de parti politique pour ne citer que ces réformes. Seulement, une fois élu président de la République, Macky Sall n’a pas mis du temps à revenir sur cet engagement en déclarant que «la Charte des Assises nationales n’est ni la Bible ni le Coran ».

Ainsi, en lieu et place de l’application des conclusions des Assises nationales, il a choisi de mettre sur pied la Commission de réforme des institutions (Cnri) à la tête de laquelle il a placé le doyen Amadou Makhtar Mbow, président des Assises, à qui il a confié la mission de lui faire des propositions de réforme des institutions, un travail déjà effectué par les Assises nationales.

UNE STRATEGIE POLITIQUE DE CONSERVATION DU POUVOIR BASEE SUR LE CHOIX DE SES ADVERSAIRES.

Outre la non-application des conclusions des Assises nationales et de la Commission de réforme des institutions, la tension actuelle que traverse le Sénégal peut être expliquée également par cette nouvelle stratégie politique de conservation du pouvoir basée sur le choix de ses adversaires, érigée en règle par Macky Sall consistant à vouloir « réduire l’opposition à sa plus simple expression ».

En effet, en sept ans de gouvernance (2012- 2017), l’actuel régime s’est positionné comme celui qui a le plus opéré des modifications tendancieuses dans le Code électoral consensuel de 1991. Grâce à sa majorité très confortable obtenue sous la douzième législature (2012- 2017), le régime en place est parvenu au gré des réformes déconsolidantes des règles du processus à dénaturer ce Code électoral consensuel de 1991.

Saisissant le prétexte des nombreuses listes enregistrées lors des législatives de 2017, le Président Macky Sall a fait adopter à quelques mois du dépôt des candidatures pour la présidentielle de 2019 deux lois très controversées. Il s’agit de la loi généralisant le parrainage citoyen à tous les candidats à l’élection présidentielle et celle modifiant l’article L.57 en 2018 avec le rajout du mot « électeur » candidat.

En 2019, cette généralisation du parrainage a permis au régime en place d’invalider 22 dossiers de candidatures dont celui de Malick Gakou, leader du Grand parti. S’agissant du nouvel article L.57, il est à l’origine de l’invalidation des candidatures de Karim Wade et Khalifa Ababacar Sall lors de la présidentielle de 2019. Aujourd’hui, c’est le leader de Pastef qui est dans le viseur du régime en place.