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Intolérance dans des discours, frein à la cohésion sociale

L’intolérance dans les discours a des conséquences fâcheuses dans la société. Livin Budabuda, journaliste et doctorant en communication politique appelle, chacun à s’abstenir de toute parole violente.

Qu’est-ce qui caractérisent les discours d’intolérance dans une société post-conflit ?

Dans le langage courant, un discours de haine désigne un discours injurieux visant un groupe ou un individu et pouvant menacer la paix sociale.
Les Nations-Unies définissent le discours de haine comme tout type de communication, orale ou écrite, ou de comportement, constituant une atteinte ou utilisant un langage péjoratif ou discriminatoire à l’égard d’une personne ou d’un groupe en raison de leur identité.

Ces discours de haine peuvent être véhiculés par toute forme d’expression, notamment des images, des caricatures, des objets, des gestes et symboles. Ils peuvent être diffusés hors ligne ou en ligne. Il s’agit de discriminer ou d’écarter un groupe donné de la compétition politique ou des intérêts.

Dans quels contextes ces discours d’intolérance politique sont-ils utilisés ?

Ces discours sont utilisés dans des contextes de guerre et de crises. Aux USA, dans l’Etat du New Jersey, après l’attaque du 11 septembre 2001, des écrits racistes contre les musulmans étaient nombreux, à l’instar de « Musulmans et 11/9, ne les servez pas, ne leur parlez pas, et ne les laissez pas entrer » ; « Ils s’appellent tous Oussama (Ben Laden) » sur une grande photographie d’enfants musulmans.

Avant et pendant le génocide au Rwanda, les Tutsi étaient assimilés à des cafards (« Inyenzi ») qui peuvent être écrasés sans aucune forme de procès. Et lors de la colonisation, on pouvait trouver des endroits réservés aux blancs. Des entrées portaient la mention : ‘’Interdit aux chiens et aux nègres.’’

Dans notre pays, on parle souvent d’un climat d’intolérance politique à l’approche des échéances électorales. C’est entre le parti au pouvoir et les autres formations politiques de l’opposition. C’est un climat caractérisé le plus souvent par le rétrécissement de l’espace politique sous plusieurs formes.

Quelles sont les visées des auteurs de ces discours d’intolérance politique ?

C’est pour écarter les autres de la scène politique, discriminer un groupe socio-politique.

L’écrivaine Dorlin Elsa dans « Se défendre, une philosophie de la violence », publié en 2017, explique comment la haine en tant que construit social commun se trouve vécue comme une émotion de groupe et partagée dans l’horreur. Du point de vue de l’analyse du discours, l’intolérance s’inscrit clairement dans une perspective de rapports de domination. Le jugement, l’évaluation et la croyance exprimés dans une énonciation intolérante n’ont d’autres visées que d’afficher et d’affirmer un système de valeurs qui serait supérieur aux autres.

Quelles sont les conséquences de ces discours d’intolérance politique dans la communauté ?

Divers actes peuvent se manifester. Il s’agit de la propagation des messages de haine, la défiance, la suspicion, l’exclusion sociale d’un groupe, les violences physiques et psychologiques. Le vivre-ensemble est remis en cause. La société risque de basculer dans la violence comme au passé.

Quel doit être le rôle des pouvoirs publics face aux discours d’intolérance ?

Les dirigeants politiques doivent encadrer la population dans sa diversité. Le moyen le plus efficace est de renforcer les principes de la démocratie, des droits de l’Homme et de l’Etat de droit. Il faut promouvoir un modèle de société tolérante de la diversité et respectueuse de la dignité humaine. Ils doivent s’abstenir de toute déclaration susceptible de remettre en cause la cohésion sociale ou de promouvoir la discrimination.

Ils devraient, en outre, réagir à des déclarations du genre. Le silence pourrait être perçu comme une approbation tacite et créer un climat d’impunité. À cette fin, les organismes publics devraient définir des règles claires régissant le comportement des individus et punir les auteurs des messages de haine.

Propos recueillis par Jérémie Misago