Burundi
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Le peuple a la mémoire longue

Des langues mielleuses vont chanter les hauts faits, les trois ans de pouvoir d’Évariste Ndayishimiye. Les griots vont rivaliser de prouesses et métaphores poétiques pour vanter tel acte réussi haut la main ou exécuté d’une main de maître. D’autres chantres, subtils, vont masquer à travers une campagne de ’’com’’, maladresses, échecs, violations et abus…

Et d’autres langues fielleuses ne vont pas se faire prier pour égrener leur chapelet de critiques réelles ou fondées, d’injustices avérées ou supposées. Ils vont exagérer les impairs inhérents à tout exercice du pouvoir, au Burundi ou ailleurs.

A côté de ces béni-oui-oui et des « contestataires professionnels et « éternels », une troisième voie existe. Tenue. Têtue. Celle des faits. Ces voix, qui gardent la voie de la raison, existent encore et heureusement. Ils sont activistes de la société civile (du moins ce qui en reste), journalistes, (une espèce menacée de disparition) ou simple citoyen, courageux, debout.

C’est notre voix. C’est notre voie. Nous disons que le chef de l’Exécutif burundais a hérité d’une situation pas facile. Au vu des affaires qui surgissent, les Burundais découvrent effarés l’étendue des dégâts et des dossiers laissés sur sa table ou dans ses tiroirs. Un système de prédation verrouillé.

Le Président Ndayishimiye essaie de faire le ménage. Il ne veut plus de cet héritage. La démonétisation des billets que vient de connaître le Burundi est une mesure économique, mais riche symboliquement aussi. Le Président cherche à s’affranchir de certaines emprises. De certains boulets au pied trop lourds à traîner.

Les Burundais sont impatients. Mais démanteler tout un « système » bien structuré durant plusieurs d’années, qui a fait de la prédation économique sa spécialité n’est pas aisé.

Le Président n’hésite pas à hausser le ton, à menacer. A un certain moment, les Burundais pensaient que ce n’était qu’un discours soporifique. Mais comme pour signer ces trois ans à la tête du pays, les citoyens ont assistés, médusés, à quelques surprises.

Mais rien n’est gagné. « Ces gens plus riches que l’État », pour reprendre les mots d’un militant anticorruption, restent potentiellement forts et n’ont, peut-être, pas encore désarmé.

Mais « Neva » n’a pas le choix. Il ne peut pas reculer, il ne peut plus reculer. Le sort en est jeté. Son cheval de bataille reste la bonne gouvernance avec son discours engagé, mais qui demande toujours des actes.
Bon anniversaire M. le Président. Trois ans, ce n’est pas rien. Je vais vous faire un cadeau : vous dire les mots glanés du Burundi profond, dans les « bananeraies » où me transporte mon métier, mais aussi ce que j’entends souvent autour de moi, ici en ville. Ne dites plus dans vos discours que « vous êtes seul », M le Président. Non, plusieurs Burundais apprécient ce que vous êtes en train de faire.

Par contre, il y a eu ces annonces des cas de corruption, les dizaines de milliards engloutis dans les barrages de Mpanda et Kajeke par exemple. Avez-vous oublié ? Je ne pense pas, vous aviez promis une « suite rapide ». Mais c’est vrai que ces derniers mois vous avez été très occupé. Le dossier reste sur votre agenda, j’espère. Le peuple a la mémoire longue.

Ah ! J’oubliais, l’espace politique continue à se rétrécir et s’assombrir avec ce nuage d’intolérance politique qui s’épaissit de plus en plus. A l’approche des élections, ce n’est pas bon signe. Faites quelque chose.
En attendant, bon anniversaire tout de même. « Kazi ipo ! » (Il y a du travail ! ndlr), comme dirait feu président tanzanien Magufuli.

Abbas Mbazumutima