Burkina Faso
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BENIN : Des législatives pour tourner la page ?


Hier, dimanche 8 janvier 2023, plus de 6,5 millions d’électeurs béninois étaient appelés aux urnes pour désigner leurs représentants à l’Assemblée nationale. Sept partis dont quatre de la mouvance présidentielle et trois se réclamant de l’opposition, sont en lice pour conquérir les 109 sièges en jeu dans les 24 circonscriptions électorales que compte le pays. Cette forte participation des partis et formations politiques au scrutin, tranche très nettement avec les dernières législatives boycottées par l’opposition avec pour résultat, une Assemblée nationale monocolore. Même si toutes les formations politiques ne prennent pas part à la compétition, l’on peut se risquer à dire que c’est un scrutin quasi inclusif qui est intervenu après une campagne apaisée, malgré la menace terroriste. C’est sans doute la raison pour laquelle les Béninois n’ont pas boudé leur plaisir d’aller s’acquitter de leur devoir civique en prenant d’assaut dès 6 h, les bureaux de vote. La pression est maintenant du côté de l’autorité en charge du processus électoral, notamment la Commission électorale nationale autonome (CENA) qui doit mettre un point d’honneur à réussir une élection propre et transparente pour barrer la route à toute contestation qui pourrait entacher la crédibilité du scrutin.

Ce scrutin constitue pour les opposants béninois, un test grandeur nature

Cela dit, ces législatives sont d’un enjeu capital pour les partis de l’opposition béninoise qui, après 5 ans d’absence sur les listes électorales, renouent avec les urnes. Il s’agit non seulement de mesurer véritablement leur poids sur la scène politique nationale, mais aussi de se donner tout le poids et la légitimité nécessaires pour prendre le relais du président Patrice Talon qui a engagé, en 2021, son dernier mandat. C’est dire si ce scrutin constitue pour les opposants béninois, un test grandeur nature. Du côté de la majorité présidentielle, l’enjeu n’en est pas moins important. Car, il s’agit, pour elle, de parvenir à se maintenir pour permettre d’abord au président de disposer de tout le confort pour terminer les grands chantiers de son dernier mandat et aussi de préparer la succession de Talon en son sein. Qui donc des deux camps l’emportera ?

Seuls les électeurs ont la réponse à cette question. Mais à ce que l’on dit, il n’est pas évident, pour le camp présidentiel, de pouvoir conserver la majorité au parlement à l’issue de cette élection. Mais quel que soit le vainqueur de ce vote, c’est la démocratie béninoise qui gagne véritablement. Car, ces législatives qui ont eu le mérite de faire le consensus au sein de la classe politique, permettront de tourner la page d’un passé plein de tourments. Et cela est d’abord à l’actif de l’opposition dont la longue et difficile lutte a fini par payer. L’on garde tous en mémoire les images du siège du domicile de l’ex-président Yayi Boni affaibli par la maladie, comme l’un des épisodes de cette âpre lutte des opposants béninois.  Mais cela est aussi à l’honneur du président Patrice Talon qui a lâché du lest, sans nul doute pour préparer sa sortie qui s’annonce dans 4 ans.

Le scrutin de ce dimanche devrait connaitre des lendemains apaisés

L’on imagine qu’en le faisant, l’homme veut laisser en héritage politique, un pays réconcilié avec lui-même, qui renoue avec sa réputation de phare de la démocratie dans la sous-région ouest-africaine, mais aussi veut présenter un front uni contre l’adversité des groupes armés. L’on sait, en effet, que le Bénin, tout comme les autres pays du golfe de Guinée, est dans le viseur de la nébuleuse terroriste qui, dans son expansion au Sud du Sahara, rêve de conquérir les rivages de l’Océan atlantique.  En tout cas, Patrice Talon, régulièrement accusé par ses adversaires d’avoir fragilisé la démocratie béninoise, tient là une belle revanche sur l’histoire et embellit par la même occasion, son image largement écornée par les critiques qui tendaient à faire de lui un dictateur naissant.

En tout état de cause, l’on peut se risquer à dire que contrairement aux législatives de 2019 qui n’avaient connu que la participation de deux partis, tous de la mouvance présidentielle et qui s’étaient soldées par de nombreux heurts dans plusieurs villes du pays avec en prime une très faible participation, le scrutin de ce dimanche devrait donc connaitre des lendemains apaisés. Et cela dépendra en partie de la diligence et de la transparence avec lesquelles la CENA traitera les résultats de cette élection qui a mobilisé 714 observateurs de la société civile sur le terrain, 40 observateurs de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et des émissaires des ambassades des Etats-Unis et du Canada qui ont été autorisés à observer le déroulement du scrutin.

En attendant de connaître les résultats et la nouvelle configuration de l’Assemblée nationale béninoise, l’on ne peut qu’encourager le chef de l’Etat et tous les acteurs politiques béninois qui ont fait un pas de géant vers la réconciliation nationale à travers ce scrutin, à garder le cap du renouveau de la démocratie au Bénin. Et cela passe certes par des élections consensuelles, mais aussi et surtout par l’élargissement des opposants qui croupissent encore dans les geôles du régime. Sans nul doute que cette fête de la démocratie au Bénin aurait, en effet, été plus belle si tous les acteurs politiques y avaient pris part. S’il accédait à cette requête de libération des prisonniers politiques, Talon inscrirait son nom dans la belle lignée des pères de la démocratie béninoise, celle de Kérékou, de Soglo et de Boni.

« Le Pays »