Guinea
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Niankoye Bernard, citoyen de Zogota : "Comment ma vie a basculé depuis les tueries…"

Dans la nuit du 03 au 4 août 2012, le district de Zogota a été le théâtre de violences atroces exercées par des forces de l’ordre sur de pauvres citoyens, réveillés de leur plein sommeil. Six (6) villageois avaient été tués lors de cette expédition punitive sanglante. Le traumatisme hante encore les survivants de ce massacre. Dix ans après les faits, les victimes attendent encore justice et réparation de la part de l’Etat.

M. Plégné Bernard Niankoye, est un fils ressortissant de Zogota. La vie de ce père de famille a basculé  depuis ces attaques meurtrières perpétrées contre son village. Rencontré par notre correspondant régional basé à Nzérékoré, M. Bernard explique qu’à l'époque des faits, il était responsable recouvrement de la compagnie Zetma et importateur de véhicules. Son engagement pour que la lumière soit faite sur ce massacre, lui a coûté très cher. Son témoignage est pathétique.

"J'étais à Conakry. Après le massacre, nous avions mené des démarches puisqu'à l'époque, les autorités de la place y compris certains de nos frères qui étaient en mission, ne voulaient pas que la vérité soit connue sur ce qui s’était réellement passé. Ils ne voulaient pas que l'opinion nationale et internationale connaissent qu'il y'a eu des tueries à Zogota. Ils voulaient cacher les images des atrocités. En coulisse, nous avons mandaté des gens qui ont été au village filmer et faire un rapport. Ils nous ont envoyé les images que nous avions publié. Nous avions organisé une marche pacifique à Nongo pour réclamer justice, les agents des forces de l'ordre étaient intervenus pour arrêter 8 jeunes qu'ils ont conduit en prison. Nous avons mené des démarches avec la coordination de la jeunesse forestière. On a difficilement pu les libérer", nous a confié Plégné Bernard Niankoye.

Et de poursuivre : « Personnellement j'ai eu trop de menaces. J'ai même perdu mon boulot. Parallèlement au service que je faisais à Zetma, j'avais une entreprise d'importation de véhicules. Ils m'ont mis en prison, sous prétexte que je commandite des soulèvements. Ils m'ont arrêté la nuit à 4 h du matin, chez moi, ils m'ont envoyé au PM3, de là, à la maison centrale. Mes véhicules qui étaient au port sont restés là jusqu'à rentrer dans les taxes surestaries. J'ai perdu huit (8) voitures. Jusqu’aujourd’hui, je dois de l’argent à certains clients. J'ai revendu mes domaines pour rembourser certaines personnes. Mais je dois encore à d'autres personnes. J'ai des amis surtout des avocats à qui je livrais des véhicules qui se sont mis dans le jeu et j'ai été libéré. Par la suite, des gens proches du Pouvoir sont venus me dire de m'éloigner de Conakry puisqu'on voulait me liquider. J'ai reçu assez de menaces. J’ai fini par fuir Conakry.

Et cela s'est suivi par un accident que j'ai subi dans lequel mes clavicules, mes côtes ont été cassées. C’était le 29 mars 2017 (…). Je suis resté caché jusqu’à recouvrer ma santé. Je ne suis reparti à Conakry qu’en 2021. Pendant toutes ces années, j'avais peur de m'y rendre parce qu’avec le Pouvoir d'Alpha, j'ai eu trop de menaces…J'ai même perdu ma première femme. J'avais une cour à Conakry, pendant l'accident, celle qui était là a pensé que j'allais mourir, elle a pris tous mes biens », raconté M. Niankoye.

Aujourd’hui, il compte reprendre ses activités. Mais les difficultés ne manquent pas. "J’ai été à Conakry pour voir comment reprendre mes activités. Mais on m’a dit que je dois augmenter ma caution de transit, obtenir quelques quotas pour pouvoir relancer mes activités de transitaire. J'ai de bonnes relations que j’ai pu entretenir, mais tout départ est difficile", dit-il.

Aujourd’hui, M. Niankoye Bernard rêve enfin de voir son combat aboutir : celui de rendre enfin justice aux victimes des tueries de Zogota. « Ce que je demande aux nouvelles autorités, c'est qu'il y ait la lumière sur cette situation et que désormais plus jamais ça », appelle-t-il.   

SAKOUVOGUI Paul Foromo

Correspondant régional d'Africaguinee.com

A Nzérékoré

Tél : (00224) 628 80 17 43