Guinea
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Simandou : ces preuves qui ont accablé BSGR au CIRDI…

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La compagnie minière Beny Steinmetz General Resources (BSGR) a perdu son procès en arbitrage au Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) contre l’Etat de Guinée. Ce dénouement a été rendu possible grâce aux preuves accumulées patiemment par le Comité de revue des titres et conventions miniers (CRTCM), présidé à l’époque par l’incorruptible Nava Touré.

Quelques mois après la première élection de l’ex-président Alpha Condé, en  décembre 2010, l’affaire concernant les conditions d’octroi des droits miniers à la compagnie BSGR est remise sur la table.

Les responsables, chargés de la gestion du dossier, s’interrogent sur plusieurs points dont l’un des plus frappants était le fait que les permis miniers ont été obtenus par BSGR au pire moment de la maladie de l’ex-président Lansana Conté.

Les protagonistes ont-ils profité de la position de faiblesse du numéro 1 guinéen à l’époque ? Il fallait fouiller.

Comment les permis de recherche sur les blocs 1 et 2 qui venaient juste d’être retirés au géant Rio Tinto, suite à l’application stricte de la loi sur la rétrocession de la moitié des surfaces jugées économiquement rentables, ont pu être immédiatement refilés à BSGR, sans concurrence réelle, sans appel d’offres, même restreint ? Mystère et boule de gomme.

Il est vrai que Rio Tinto avait traîné pendant plus d’une décennie sur ses engagements d’accélérer le développement du Simandou, sans rien faire ou presque, en tout cas pas grand-chose de réellement déterminant dans le cadre d’une mise en valeur rapide d’un projet aussi gigantesque.

L’ex-président Alpha Condé réunit ses équipes et confié une tâche délicate à un expert, reconnu pour sa grande compétence et sa probité : Nava Touré.

« Les deux hommes avaient pourtant subi beaucoup de pression pour abandonner ce dossier face à un homme d’affaires aussi puissant que le milliardaire Beny Steinmetz. C’était en effet risqué. Ils ont tenu bon et c’est ce qui a permis à la Guinée de remporter ce procès », a expliqué une source proche du dossier.

En effet, en quelques mois, grâce à l’appui de spécialistes en investigation, basés à New York, la trame du système de corruption se révélait clairement. Le rapport des détectives mentionnait deux noms qui allaient permettre de comprendre comment les choses se sont réellement passées : Mamadie Touré, présentée comme une ex-épouse du président Conté (1) et surtout Frédéric Cilins, cité comme un « agent » de BSGR en Guinée.

Ces deux là indiquaient des pistes qui menaient tout droit vers Asher Avidan, Directeur Général de BSGR Guinée à cette époque, et Beny Steinmetz, considéré comme le patron de tout le business. Un autre nom va apparaître après la saisie des documents par les autorités américaines : Avraham Levran…

Il semble que tout le stratagème a été organisé à l’insu de l’ex-président Lansana Conté qui croyait que le deal avec BSGR était « normal », a expliqué une source à WESTAF MINING. Le rapport des détectives parle tout de même d’un cadeau anecdotique d’une montre d’une valeur de 100.000 dollars USD « offerte » à Conté…

Le 14 avril 2013, dans des circonstances dignes d’un film hollywoodien, Cilins sera arrêté par le FBI (Federal Bureau of investigation), en Floride, alors qu’il tentait de convaincre Mamadie Touré de détruire des dossiers compromettants détenus par elle.

En fait, il s’agit, outre les premiers accords signés en 2005, de plusieurs contrats dont « Contrat de commissions » contenant un engagement de paiement d’un montant de 4 millions USD en faveur de Matinda and Co Limited (la société de Mamadie Touré), établi le 27 février 2008, un « Protocole d’accord » signé le 28 février 2008 (Ndlr : Conté est décédé entre le 22 et le 23 décembre 2008), un « Contrat » entre une société, dénommée Pentler Holdings Ltd et Matinda and Co Limited, faisant référence à un accord de 2005, une « déclaration » de réception d’une somme de 2 .400.000USD, signée à Freetown où la dame s’était rendue précipitamment après le décès de Conté.

Le dossier, constitué par le FBI, comporte également des « lettres d’engagement » de Mamadie Touré, des « protocoles d’accord », etc.

WESTAF MINING a vu la plupart de ces documents dont l’un d’eux mentionne clairement que sur un paiement de 4 millions USD dont 2 millions USD revenait à la société Matinda and Co Limited, que « le reste de la somme (soit 2 millions USD) sera répartie entre les personnes de bonne volonté qui auraient contribué à la facilitation de l’octroi desdits blocs (ndlr : 1 et 2) »…

Selon un spécialiste du droit américain, tout porte à croire que Mamadie Touré a choisi de coopérer avec la justice américaine pour éviter la prison, face aux preuves accablantes qui lui ont été présentées.

Devant l’amas d’éléments tangibles récoltés, le FBI va pousser le dossier. Il procède à des écoutes, et réunit aussi des vidéos. Quelques uns de ses éléments vont d’ailleurs se rendre à Conakry pour interroger systématiquement la plupart des protagonistes du dossier BSGR, en commençant par les fonctionnaires clés du ministère des Mines.

L’opération d’audition des témoins va être complètement bouclée aux alentours de l’année 2018 et c’est sur la base de toutes ces preuves que le CIRDI a sonné le glas des ambitions de la compagnie israélienne en République de Guinée.

Comme l’a indiqué à une de nos sources, l’un des avocats de DLA Piper, l’histoire de BSGR, un vrai succès à l’actif de l’ex-président Condé, Nava Touré et de quelques- uns de leurs collaborateurs au sein du CRTCM et du ministère des Mines (notre source cite Ibrahima Kalil Kaba, alors directeur de cabinet de Condé, Abdoulaye Magassouba, ex-ministre des Mines, etc), permet tout de même de tirer une leçon dans le cadre de la lutte contre la corruption.

« Elle révèle non seulement comment il est difficile de trouver des preuves de corruption, mais en plus elle permet de démontrer comment des éléments concrets patiemment réunis ne permettent aucune injustice. Il faut toujours prendre le temps d’enquêter et de réunir les preuves pour éviter de bâcler une telle opération », affirme notre source.

Westaf Mining