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Usina 22 : l’union fait la force! 

Une journée pour le pop-rock, une autre pour les familles et un week-end entier pour célébrer le collectif : le festival Usina 22 a ressuscité, avec succès, l’ancienne friche industrielle Schmelz à Dudelange. Au point d’espérer une suite.

Ce dimanche, à Dudelange, l’ambiance ressemblait à celle d’un lendemain de gueule de bois. Les sonorités mordantes n’étaient plus qu’un lointain écho, résonnant sous la casquette. Et la folle énergie qui anime d’habitude un festival laissait place à une quiétude molle, accentuée par la douce circulation des poussettes. Deux journées, deux ambiances, un peu comme au Macumba! Un certain Marc, déambulant avec sa famille alors qu’il était la veille dans la fosse, synthétise bien l’esprit : «Une soirée pour moi et un après-midi avec femme et enfants!» Et comme après toute bringue, il y a aussi un temps pour ranger, à l’instar de cette imposante scène, démontée en catimini, la même qui a accueilli, samedi, dans la touffeur, le groupe Kings of Leon.

La tête d’affiche, c’était le public

Les Américains étaient clairement l’appât d’Usina 22 parmi la quarantaine d’artistes au programme ce week-end. Un festival imaginé, comme le rappelle le directeur d’Opderschmelz, John Rech, appuyé sur sa trottinette électrique, pour «donner aux gens l’occasion de vibrer». Ces derniers ne se sont d’ailleurs pas fait prier pour le lui rendre. «Il y avait de la joie, des sourires et un état d’esprit magnifique», témoigne-t-il. Sûrement en raison de ce site, baignant encore dans son jus, à la fois sauvage et vétuste, et ses nombreuses installations parsemées çà et là entre cinq scènes. Du coup, de la bonne musique, il y en a eu, comme celle, de plus en plus rodée, de Francis of Delirium, promesse nationale, et celle d’autres acteurs locaux, loin d’être des faire-valoir (avec en tête de gondole Klein et Tuys). Sans oublier des valeurs internationales, au statut plus ou moins avéré (Crack Cloud, MNNQNS, The Mysterines…).

Rien dans les poches, tout dans le cœur!

Au plus fort de l’ambiance, samedi, l’ancienne friche industrielle comptabilisait, sur ses 40 hectares, pas moins de 8 500 personnes. «La tête d’affiche, ce sont eux!», balance John Rech qui, malgré sa mine fatiguée, se rappelle quand même que l’endroit avait déjà accueilli en 2007 Renaud et Zucchero, sous chapiteau, à l’occasion du centenaire de la ville de Dudelange. La véritable première tient finalement à la réalisation du projet, «un geste unique» porté par trois organisateurs qui comptent au pays : l’Atelier, Opderschmelz et le Gudde Wëllen, auxquels se sont joints d’autres «curateurs», comme Koll an Aktioun, DKollektiv, De Läbbel, Itinerantes… «L’idée était de réunir les maisons du Sud, et d’un peu plus loin, afin que chacun propose des choses qui le représentent le mieux», complète Luka Heindrichs, habitué aux propositions hors norme comme Food for Your Senses.

D’ailleurs, à l’état d’ébauche, embryonnaire, Usina 22 devait s’appeler festival «des vitrines», qualification pas très accrocheuse, mais plus limpide pour défendre cette volonté de transparence sur la culture musicale et associative du cru. «Il y a eu de beaux échanges, rapides, limpides, sans aucune trace d’égocentrisme», se remémore John Rech, pour aboutir à un étonnant patchwork d’idées. Un «remix», corrigerait sûrement «Esch 2022», l’un des deux piliers financiers de la manifestation avec, bien sûr, la commune de Dudelange. Deux partenaires qui ont permis d’offrir une «grosse affiche à un prix réduit». «On ne réalise aucun bénéfice dessus!», renchérit le directeur d’Opderschmelz, grand seigneur. Rien dans les poches, tout dans le cœur!

Énergie associative et faire-ensemble

Mais le festival, aussi insouciant paraît-il, est également un bon moyen de rappeler que l’ancienne cité ouvrière se transforme vite, emportant dans sa mutation certains éléments du passé. Et le site n’est pas épargné, d’ailleurs aujourd’hui renommé NeiSchmelz, projet prévoyant la construction de plus de 1 000 habitations. Comment ne pas voir le symbole avec cet énorme chapiteau rouge qui a troqué hier les amplis pour les rampes. Dessus, et sur des rythmes qui claquent, la jeunesse, à vélo ou en trottinette, rivalisait d’audace et de figures «freestyle», rappelant que leur skatepark sera l’un des premiers à disparaître, «alors qu’il a été le premier résident» du lieu, dans les années 90, précise Serge Ecker. 

Président du conseil d’administration de DKollektiv, équipe aux ramifications multiples installée à Dudelange et qui crée en rapport avec un lieu, son histoire, ses gens et son évolution constante, il connaît bien le sujet et défend, bec et ongles, «l’énergie associative, le faire-ensemble». Ainsi, en mai dernier, il inaugurait le bâtiment Vestiaires et Wagonnage (appelé désormais VEWA) qui, conforme à son ADN, réunissait hier des cours de jardinage (pour les petits), de la sérigraphie ainsi qu’une expérience en chambre noire, à l’ancienne. Un établissement et des idées qui resteront debout, au même titre qu’une brasserie voisine, après la fin des premiers travaux qui ne devrait pas intervenir avant 2028 en raison de la qualité des sols, pollués.

De quoi raviver la flamme d’une nouvelle édition d’Usina en 2023? John Rech ne cache pas les intentions du groupe : «Ensemble, on parle déjà de ce que l’on pourrait améliorer la prochaine fois. Dans nos têtes, en tout cas, c’est bien parti!» Face à l’épineux problème financier, qui reste central dans l’organisation d’un festival, il a déjà la solution, qu’il lâche dans un grand rire : «Ça va coûter combien? Trois rues!»