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Caroline Désir, ministre de l’Éducation, est notre invitée de ce dimanche: «La réforme doit réduire les inégalités entre les enfants»

Publié le dimanche 2 Octobre 2022 à 08h00

Par Vincent Liévin

Bruxelles, à deux pas du Parlement fédéral et de la petite ceinture, la ministre de l’Éducation de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Caroline Désir vit sa première rentrée sans Covid.

Vidéo

Un événement.

« Il y a un peu plus de sérénité. Heureusement parce qu’il s’agit d’une rentrée avec beaucoup de réformes qui entrent en vigueur. »

Juriste, toujours curieuse de l’actualité, elle réagit notamment aux résultats des élections en Italie (voir vidéo) : « Même si les résultats étaient attendus, il faut continuer à lutter contre l’extrême droite et faire respecter le cordon sanitaire chez nous. »

Au quotidien, toute son attention est centrée sur les semaines qui viennent.

Vous craignez un rebond de l’épidémie ?

« Le changement du rythme scolaire avec les 15 jours de coupure pourra nous aider à mieux gérer une éventuelle vague. Sur le long terme, les écoles sont de mieux en mieux équipées. Nous avons aussi rappelé les consignes de base au personnel comme le fait d’aller chercher leurs doses de booster. »

Les enfants et les enseignants sont prêts ?

« On sent que le personnel est essoufflé après deux années difficiles. Pour les enfants, je ne veux pas être alarmiste, mais il faut qu’ils retrouvent une régularité d’apprentissage. La crise a fait des dégâts. Les résultats du CEB sont dans la fourchette basse. Ce qui nous inquiète davantage… c’est que ce sont toujours les élèves les plus fragiles au niveau socio-économique ou pédagogique qui sont les premières victimes. »

Avec la réforme, tous les élèves peuvent avoir droit à un accompagnement personnalisé ?

« L’accompagnement personnalisé arrive dans le cadre du tronc commun des première et seconde primaire cette année et les troisième et quatrième primaire l’année prochaine. Pendant deux à quatre périodes par semaine, les élèves vont pouvoir avoir des enseignants/logopèdes qui vont faire du co-enseignement. Cela va permettre de la remédiation et des exercices de dépassement. »

Que pour les enfants en difficulté ?

« Non, justement, nous n’allons pas aider que les plus fragiles. Nous tenons aussi à faire progresser tous les élèves. On va prendre le temps de respecter les rythmes scolaires de chacun. Plus vite les problèmes seront identifiés, plus vite l’enfant pourra s’améliorer. Cela doit se faire à l’école pour ne pas qu’il y ait encore plus d’inégalités entre les enfants. En effet, à l’extérieur de l’école, certains parents peuvent payer des cours particuliers là ou d’autres ne peuvent pas. Notre idée est vraiment de rapatrier cette prise en charge dans l’école. »

Publié le samedi 1 Octobre 2022 à 21h42

Avec votre projet de pôles territoriaux, les écoles vont mieux travailler ensemble ?

« Tout d’abord, nous avons un enseignement spécialisé de grande qualité en Belgique avec des professionnels passionnés. Cela représente 36.000 enfants et beaucoup d’enfants français viennent chez nous. Toutefois, nous avons trop d’enfants dans l’enseignement spécialisé par rapport à la moyenne de l’OCDE. On sait qu’il y a des orientations inadéquates vers l’enseignement spécialisé pour des enfants qui ne maîtrisent pas suffisamment la langue par exemple. Certains enfants pourraient être maintenus dans l’ordinaire avec des financements adéquats. »

C’est possible ?

« 48 pôles territoriaux sont présents sur notre territoire. On doit faire travailler les deux univers ensemble et les décloisonner. On va aussi chercher l’expertise de l’enseignement spécialisé parce qu’on a depuis des années travaillé dans la différenciation avec les équipes pluridisciplinaires. Sur le terrain, il y a des zones qui pratiquent déjà l’intégration depuis des années. Ce qui nous intéresse vraiment, c’est qu’il y a des enfants à besoin spécifique partout et qu’ils sont de mieux en mieux diagnostiqués. Par contre, les enseignants n’ont pas toujours de formation pour suivre (TDAH, dyslexie…). »

Que faire pour les PMS débordés ?

« Les PMS jouent aussi un rôle important indispensable dans la relation entre les parents et les écoles. Ils ont eu beaucoup plus de situations à gérer avec le Covid qu’avant. Des enfants et des adolescents souffrent encore énormément des conséquences de la pandémie. »

Un mot sur la réforme du temps scolaire ?

« Cette réforme des rythmes journaliers ne sera pas pour ce gouvernement-ci. On a lancé les prémices de la réflexion. On a mandaté la Fondation roi Baudouin pour voir ce qui se fait sur le terrain et comment on peut améliorer cette réforme… et comment on pourrait diffuser ces bonnes pratiques. Il faut aussi s’adapter à la réalité des parents : quel parent peut encore aller chercher son fils à 15h30 à l’école ?

Il faut réfléchir avec les clubs sportifs du coin, l’extrascolaire, l’académie, l’enfant… »

V.Li.

Publié le samedi 1 Octobre 2022 à 21h42

L’école a besoin d’aide à tous les étages ?

« Les directeurs d’école reconnaissent qu’ils ont eu une rentrée très compliquée aussi. Ils se plaignent depuis longtemps d’une surcharge administrative. Un groupe de travail avance à ce sujet. Nous avons une enveloppe de 41 millions d’euros en plus pour le soutien administratif. Ils me disent toutefois qu’ils ne voient pas concrètement sur le terrain que cela se traduit par une aide significative. J’ai conscience aussi que le souhait premier des équipes de direction est de refaire du travail pédagogique. »

Que faire contre la pénurie ?

« Le phénomène de pénurie est complexe, multifactoriel et mondial. Il n’est pas que financier. La Flandre possède de meilleurs barèmes que nous et malgré tout, elle manque d’enseignants. Elle est même touchée plus fortement que nous. On travaille évidemment sur la formation initiale (on fait passer à partir de cette année la formation de 3 ans à 4 ans, on espère par là aussi réduire le taux d’abandon lors des premières années de pratique) et continue (il faut des formations en cours de carrière). Les parents ne se rendent pas toujours compte que les enseignants se forment énormément notamment lors des congés pédagogiques, mais aussi le week-end. Pour l’instant, nous avons toujours des problèmes de pénuries sévères dans les maîtres de langues, les profs de pratiques professionnelles dans le qualifiant… »

Une formation à la violence verbale des parents aussi ?

« C’est quelque chose que l’on entend de la part des enseignants. Il existe en effet des formations à la gestion de conflits. »

L’arrivée d’un nouveau type d’enseignant ?

« On veut attirer des enseignants en seconde carrière. Cela répond aussi à une évolution de la société qui veut que l’on ne réalise plus une carrière unique dans un seul domaine. Ce n’est pas évident parce que ces personnes arrivent sans ancienneté. On a donc fait une exception pour pouvoir attirer des enseignants en langue moderne. On tiendra compte d’une ancienneté. On valorisera donc l’expérience jusqu’à 5 ans d’ancienneté. »

V.Li.

Publié le samedi 1 Octobre 2022 à 21h43

Que répondre aux manifs des professeurs de cette semaine ?

« Mon cabinet et moi-même avons rencontré les syndicats à plusieurs reprises depuis la rentrée, que ce soit lors de nos réunions récurrentes ou dans le cadre des groupes de travail mis en place pour répondre à leurs revendications. Concernant la taille des classes, une première réunion a eu lieu et une deuxième était planifiée cette semaine. »

Et pour la charge de travail ?

« Concernant la charge de travail dans le cadre des plans de pilotage, des bilatérales ont eu lieu avant les vacances et une réunion aura lieu la semaine prochaine sur des propositions de balises. Des échanges ont également lieu sur l’évaluation pour faire évoluer le texte. »

Enfin, au niveau de l’apprentissage du néerlandais, la ministre devrait déposer prochainement une note au gouvernement pour que l’apprentissage du néerlandais, ou de l’allemand, soit imposé en Wallonie comme à Bruxelles dès la troisième primaire, à partir de la rentrée 2027-2028. « Pas de commentaire pour l’instant à ce sujet » précise le cabinet.

V.Li.

Publié le samedi 1 Octobre 2022 à 21h44

Le dimanche, n’est pas nécessairement un moment de repos pour la ministre de l’enseignement. « Je travaille un peu en effet. Dimanche passé, j’étais au Congrès du parti. Je participe beaucoup aux activités locales. J’aime rencontrer la population, les enseignants et les parents sur les marchés. »

Ils vous apostrophent ?

« Ils me parlent toujours gentiment de leur problème, des difficultés du secteur. C’est normal surtout avec les réformes que l’on met en place. »

Quelques heures en famille ?

« J’accorde aussi du temps à ma famille parce qu’il faut maintenir l’équilibre. J’ai la chance d’avoir de grands enfants mais j’ai envie de partager beaucoup de choses avec eux. Mais aussi de faire un peu de sport et aller au cinéma, au théâtre… La vie a repris. »

Quelle est votre lecture en cours ?

« Je suis en train de lire Virginie Despentes « Cher Connard ». Un livre très intéressant… un peu de lecture féministe. »

Justement, il faudrait plus de filles dans les cours de codage ?

« Les mentalités évoluent, mais il y a encore un gros travail à mener auprès des parents. On doit vraiment attirer les jeunes filles vers les filières scientifiques. »

V.Li.